Après deux victoires à la Pyrrhus, sur les retraites et la loi immigration, qui avaient renforcé l’hostilité à son égard, Macron voulait se relancer en début d’année avec un changement de gouvernement. Las, son remaniement est un fiasco et il a affronté une révolte paysanne populaire. Et avec une croissance en berne, et l’austérité en marche, il lui fallait des diversions pour tenter de rebondir politiquement : avant le « droit à mourir », cela a été l’inscription de l’IVG dans la Constitution et l’Ukraine.
Une manœuvre habile, et une autre ratée
Quelle que soit l’opinion que l’on a de Macron ou de l’inscription du droit à l’IVG dans la Constitution, il faut reconnaître que cette première manœuvre est sans doute assez réussie. En effet,
une large majorité des élus (y compris LR, et même RN) a fini par céder à la pression populaire et a voté le texte, qui est passé sans grand suspens, ravalant les opposants au statut de réactionnaire. 90% des médias ont communié dans un soutien sans réserve à cette première mondiale de l’inscription de ce droit dans la Constitution, servant la communication de l’Élysée,
et culminant avec une inscription officielle le jour précis de la journée des femmes. Il faut reconnaître que
cette première mondiale envoie un message fort pour le droit des femmes, réaffirmant le rôle avancé de notre pays dans ce domaine, alors qu’un recul de leurs droits s’opère dans quelques pays, sous l’influence des islamistes ou des conservateurs.
Malgré tout,
pour qui prend simplement le temps de relire notre Constitution, l’inscription de ce droit, aussi important soit-il, ne semble pas vraiment à sa place.
Une constitution règle l’organisation des pouvoirs et
n’est pas un catalogue de droits, aussi fondamentaux soient-ils. Y inscrire l’IVG, absolument pas menacée en France,
où le consensus est fort sur ce sujet, n’apporte pas grand-chose, augmentant seulement le niveau de difficulté pour revenir sur la loi Veil, une évolution que personne de significatif politiquement ne défend. Il s’agit d’une posture largement inutile, par-delà le symbole. Cela ne va-t-il pas ouvrir de nouvelles requêtes qui vont venir en doublon d’autres textes législatifs ? Pourquoi doubler une loi, populaire qui plus est, d’un texte constitutionnel ? Difficile de ne pas y voir une manœuvre politicienne assez cynique, sans conséquence réelle autre que servir la communication et l’image de Macron.
Toujours pour occuper le terrain,
Macron a cru bon multiplier les déclarations belliqueuses sur la situation en Ukraine. Difficile de ne pas y voir la technique utilisée par Bill Clinton et Georges Bush Jr, qui utilisaient la guerre ou les initiatives bellicistes pour faire oublier leurs difficultés sur le plan intérieur. Macron cherche sans doute ici à cliver et à polariser le débat, d’une manière outrancièrement binaire. Son impopularité très forte peut donner un semblant de pertinence à cette tactique, dans la mesure où il pensait trouver une proportion de la population supérieure à sa cote de confiance pour soutenir sa position jusque boutiste, d’autant plus qu’elle est défendue par une large part des médias, qui souscrivent au narratif sans nuance de choix entre un soutien aux pauvres ukrainiens agressés ou aux méchants russes envahisseurs. Macron est tellement minoritaire qu’une position moins minoritaire qu’il ne l’est peut lui apparaître comme une opportunité d’élargir son audience électorale,
aussi aléatoire soit ce calcul de gribouille.
Car ces prises de position posent plusieurs problèmes. De manière plus anecdotique,
il ne convainc pas : 79% des Français refusent l’envoi de troupes et 59% ne le jugent pas à la hauteur de la situation. Il faut dire que Macron a trop varié et trop parlé sur le sujet pour être crédible. Ensuite, ses initiatives semblent n’être que des foucades purement personnelles, non discutées avec son état-major, ou même ses alliés proches. Résultat, son refus d’exclure l’envoi de troupes le 26 février a été rapidement contredit par nos alliés, de Berlin, à
l’OTAN en passant par la Maison Blanche ! Puis,
il a semblé tempérer ses propos quelques jours plus tard en disant « refuser la logique d’escalade », avant d’accélérer à nouveau en fin de semaine
en prônant un « soutien sans limite » à Kiev, ce qui interroge de la part d’une puissance nucléaire. Plus globalement, sa gestion bien peu diplomatique du sujet l’affaiblit à l’étranger, comme pour les Français…
Car derrière toutes ces manœuvres, destinées à faire oublier
le fiasco de sa politique économique et l’austérité en marche, transpire un cynisme indécent, l’exploitation d’une guerre à des fins de communication… Pire, cette exploitation est outrancière et malhabile, abîmant souvent l’image de notre pays à l’étranger. Macron gesticule, pour sa seule gloire, et les Français ne sont pas dupes…