Le sondage qui fait trembler tout le mond !
Ils ne parlent pas que de ça. Invités sur les plateaux télés, ils se renvoient la balle. En off, on s’inquiète, on tremble. Quant à elle, elle est aux anges, jubile et prépare la suite. Depuis hier, la France s’est réveillée avec une éventualité qui en réjouit certains et qui en fait frissonner beaucoup d’autres : une France bleue Marine. Le sondage publié par Le Parisien a fait l’effet d’une bombe. 23 % pour Marine Le Pen. 21 % pour Martine Aubry et Nicolas Sarkozy. Jamais, un leader d’extrême droite n’avait été aussi haut dans l’opinion publique. A 14 mois de l’élection présidentielle, le spectre d’un 21 avril, à l’endroit ou à l’envers, redevient d’actualité. La faute à qui ?
Nicolas Sarkozy qui avait siphonné les voix du leader frontiste, Jean-Marie Le Pen, avait su avec un certain brio conjugué un double discours mêlant nation et globalisation. C’était d’une part, l’adaptation de la France à la mondialisation, la fameuse rupture. D’autre part, les classes populaires avaient adhéré au discours gaullo-bonapartiste du candidat, cousu par un Henri Guaino au sommet de son art et de sa persuasion. Mais voilà, les épisodes du Fouquet’s, du yacht ont rapidement brouillé le message d’un Président servant le dessein des riches. Les questions migratoires et sécuritaires sont loin d’avoir été résolues. Voyant la patronne du Front National monter et sous le conseil de sa cohorte de conseillers, Nicolas Sarkozy a troqué ses habits de Président en ceux de candidat à sa réélection. Persuadé – et il n’a pas tort - que l’élection se jouera à droite, il court inexorablement derrière Marine Le Pen. Quitte à s’essouffler. Du débat sur l’identité nationale à celui sur l’Islam, en passant par le discours de Grenoble associant immigration et insécurité, Nicolas Sarkozy n’arrive pas reconquérir le précieux électorat perdu tout au long de ses quatre années de pouvoir. Les électeurs préfèrent sans doute l’originale à la copie. Bref, tous les voyants sont au rouge pour Nicolas Sarkozy qui de remaniement en remaniement, d’excès de langage en déclarations importunes, n’arrive pas à stopper l’hémorragie. Pourtant la gauche n’est pas mieux lotie.
En effet, après quatre ans de Sarkozysme, après neuf années de présence de la droite au pouvoir, le Parti Socialiste devrait caracoler en tête des sondages, préparer son triomphe, distribuer les maroquins. Mais voilà avec un projet plus que vague – même Martine Aubry l’avoue au détour d’un lapsus révélateur- voire irréaliste (cf le projet d’égalité réelle cher à monsieur Hamon), le PS suscite plus le scepticisme que l’adhésion. Les querelles de personnes, désormais inscrites dans le patrimoine génétique du parti, brouillent le message. De 20 % dans le pire des cas (pour François Hollande) à 23 % pour le chouchou des sondages (DSK), rien n’est gagné pour les socialistes. La caricature du Président de la République, présenté tour à tour comme un Français au passeport américain ou descendant d’Hitler (voir les affiches des Jeunes Socialistes), a discrédité la parole socialiste. Alors que Martine Le Pen condamnait sévèrement la réforme des retraites, Martine Aubry émettait de simples réserves. Alors que Marine Le Pen s’opposait au traité de Lisbonne, Martine Aubry applaudissait des deux mains, le vieux rêve de son père devenant ainsi réalité. Bref, la frontière entre l’UMP et le PS tend à se réduire, pour ce que la présidente du FN a qualifié, d’une façon habile, d’UMPS.
Car voilà la vraie force du FN, Marine Le Pen elle-même. Elle a su enlever l’image sulfureuse du parti. Elle s’est déjà démarquée de son père en disant qu’elle « n’avait pas les mêmes interprétations de la seconde guerre mondiale que lui ». Là où son père parlait de « détail de l’histoire », elle dénonce les occupations de rue. Marine Le Pen donne une image plus douce car plus féminine. Son score à Henin Beaumont à l’élection législative puis municipale en est la preuve. Elle attire l’attention. Elle n’inquiète pas. Et puis elle représente les femmes d’aujourd’hui : femme de 40 ans, deux enfants et divorcée, c’est en quelque sorte l’égérie des féministes. D’ailleurs Le Pen s’est éclipsé au nom de Marine. Les choix stratégiques sont aussi très bons. Surfant sur une période de crise économique toujours propice aux extrêmes, elle part sabre au clair contre les dérives de la mondialisation (« un totalitarisme moderne »), défend la laïcité, menacée selon elle par l’islamisme. Bref un savant – gagnant ?- mélange entre un discours franchement de gauche et nationaliste. Enfin, ce qu’elle a dû apprendre de son père, c’est un savoir-faire médiatique, toujours avare de la petite phrase qui fait mouche et qui fait mal. C’est elle qui rappelle à Frédéric Mitterrand ses errements touristiques. Invitée dans les émissions politiques, elle attire et fait de l’audience. C’est désormais elle qui dicte l’agenda médiatico-politique ? Un parcours tout tracé pour l’Elysée.
Si les sondages lui sont favorables, Marine Le Pen n’a pas encore gagné. Un premier mouvement commence à percer, celui d’un ralliement à Nicolas Sarkozy pour éviter toute mauvaise surprise au premier tour. A gauche, on pourrait être tenté de rejouer le coup du vote utile qui avait été fatal à François Bayrou en 2007. L’effet de surprise est la principale force du Front National. En se dévoilant si tôt, Marine Le Pen pourrait échouer dans son combat pour la victoire. La campagne sera longue et rude et si son père était un combattant endurant, la fille sera-t-elle capable de tenir la longueur ? La bataille pour l’Elysée a bel et bien débuté. Marine est déjà montée au front et souhaite bien imposé son sa France bleue Marine !