« Union nationale » ? Pour nous enchaîner !

Nous y voilà. Dès le 29 novembre, nous la sentions venir « ... elle est là qui nous guette. La rumeur enfle. Pour résoudre nos problèmes, ils vont les uns après les autres y aller du couplet de leur Internationale : « Il nous faut un gouvernement d'union nationale. ». Il va y avoir, après les coups de sabre, du consensuel dans l'air. ».
Sur les planches du théâtre, les acteurs prennent la place indiquée par une croix au moment prévu :
- Jean-Louis Borloo, le 30 novembre, prône « "une forme d'union nationale" pour redresser la France et estime que l'heure n'est plus à l'"homme providentiel ».
- François Baroin, le 6 décembre, explique « ...sur iTélé que"l'union nationale, ce serait vraiment bien en France". Bernard Accoyer le même jour, a déclaré que « "Quand un Etat est confronté à une telle situation, l'unité nationale est souhaitable".
- « La situation est grave, le pays a besoin d'union », aurait déclaré le chef de l’État au petit-déjeuner de la majorité,
François Bayrou, ce 7 décembre 2011, drapé dans son habit de rassembleur responsable si bien placé pour « négocier et fédérer à gauche et à droite », va lancer un appel à l'union nationale. Peut-être bien même un gouvernement d'union nationale avant la présidentielle.
« Union Nationale », ce n'est plus un élément de langage, c'est un mot d'ordre. Mettons nous à leur place à ces libéraux en place. Ils ne veulent plus assumer seuls les conséquences de leur politique qui fit les beaux jours du système dont ils étaient les missionnés et qui ne trouve plus assez de profits à son goût, ni d'assurance de perpétuer la rente. Ils ont récolté le champ de blé et ont mangé le pain seuls. Ils voudraient qu'on leur prête main pour éteindre le feu qui s'est mis dans la paille.
On va donc nous expliquer sous toutes formes que l'heure est grave. Les centres de pouvoirs et les grands médias vont vite tomber d’accord sur le fait que le salut viendra d’une « union nationale » ponctuelle ou gouvernementale des partis néolibéraux et ceux de la social-démocratie « de gouvernement ». D’éminents spécialistes iront d’un studio à l’autre, de « J.J. Bourdin » en « C dans l'air » pour briser les dernières résistances provenant d'irréductibles pessimistes.
Les jours qui viennent seront, usage électoral oblige, une phase de forcing des esprits, comme une injonction permanente à la soumission. Sauf à nous promettre le litre de lait de nos enfants deux fois plus cher et celui de l'essence à trois euros.
On nous dira qu'il y va de l'intérêt général, sans se pincer les lèvres, comme pour exorciser sur les années passées sous leur gouvernance où ils ne s'encombrèrent pas de cet intérêt-là ! Qu'il y a des sacrifices à faire. Mais sans nous expliquer que l'ardoise à payer fut écrite avec leur craie.
L'intérêt de Nicolas Sarkozy pour la formule n'est que momentanée, car sa droite n'ira pas l'encontre de l'idéologie libérale qui prévaut au sein de l'Europe telle qu'elle s'est construite au fil des ans. Simplement, rapidement, il lui faut plus d'aisance pour faire adopter et voter ce qu'il a décidé seul avec Angela Merckel, car il n'aura pas le courage de convoquer un Congrès avant les présidentielles.
Pour maquiller le passé et pour mieux préparer son avenir, il lui faut unir ses incompétences avec celles des autres. La vraie nature des motivations qui l’ont animé à initier maintenant « l'union nationale » par seconds couteaux interposés, dans ce climat surréaliste est celle-ci : garder le pouvoir.
Dans quelques jours, puisqu'il lui faudra bien respecter le scénario du plan com, il nous fera le coup de « s'il n'y a pas d'union, cela profitera aux extrêmes ». Comme si ses coups de pieds sentis au Front national échappaient aux regards.
Étrange, ce besoin soudain de plus de consensus. Mais le consensus existe déjà : de l'UMP au PS en passant par le centre, tout le monde est d'accord sur le mot d'ordre prioritaire : la rigueur ! L'actualité ne dément pas ce fait. Les différences entre les positionnements politiques sont cosmétiques : "trouver un juste chemin entre la réduction des déficits et le maintien de la croissance et de l’emploi" s'exclament-ils tous en choeur !
Quant à un « gouvernement d'union nationale », cet outil de pays en état de guerre, il n'aurait strictement aucune légitimité.
Reste qu' « union nationale » parlementaire ponctuelle ou « gouvernement d'union nationale » ne sont que des tunnels sous lequels un pays passe très brièvement. Mais aujourd'hui, ici, ce serait pour un passage vers quoi ? Pourquoi les responsables des politiques libérales qui ont provoqué la crise ne règlent-ils pas seuls, avec leur majorité parlementaire issue du suffrage universel, le problème qu'ils ont crée ?
C'est que, simplement, les infréquentables d'hier, « unis », se blinderaient contre toute intervention du mouvement ouvrier et populaire sur la scène politique. Il leur faut, avant la saignée, coûte que coûte, empêcher l'irruption des plus lésés sur la scène politique, scier toute mobilisation populaire. Pour enchaîner l'avenir. C'est une bataille de classes qu'ils éviteraient. Et un projet alternatif et radical.
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