Villepin et Sarkozy, entre cyclisme et politique
En écoutant ce jeudi 13 août le villepiniste Hervé Mariton expliquer sur Europe 1 qu’il soutient l’exécutif en place « pour l’instant », c’est soudain une métaphore cycliste qui m’est venue à l’esprit pour qualifier les stratégies diverses dans la course à la présidentielle 2012.
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Vient alors le dernier col, décisif. A ce stade de l’étape, il n’en reste généralement que deux ou trois en tête. Pour conserver leur avance, ils doivent rouler sans se poser de question : or celui qui prend les plus longs relais - c’est à dire qui roule en tête du groupe, faisant ainsi le plus gros travail, contre le vent - sait qu’il laisse dans cet effort des forces qui lui feront peut être défaut au moment de se battre pour la victoire d’étape. La plupart du temps, ses craintes se confirment : dans les derniers hectomètres, l’un de ses compagnons d’échappée, qui s’illustrait jusqu’alors par sa discrétion dans la prise de relais, surgit soudain sur son côté, le dépasse, et lui enlève la récompense de ses efforts. Erreur stratégique, diront les commentateurs. Justement.
Imaginons Nicolas Sarkozy dans la position de ce relayeur infatigable (à un malaise près) qui fait la course en tête sans se retourner. Plusieurs coureurs sont dans sa roue. Certains l’ont attaqué et se sont vus distancés en quelques coups de pédale. D’autres se sont résignés et ont décidé de rouler pour lui. D’autres encore prennent quelques relais, et attendent "pour l’instant" le moment opportun pour passer du rôle d’adjuvant à celui d’opposant. Hervé Mariton est de ceux-là.
Face à une UMP verrouillée de l’intérieur, sûre de sa force et de sa capacité d’accélération, c’est donc une stratégie inspirée du judo qu’ont choisi les villepinistes : retourner la force de l’adversaire contre lui, voilà le secret de toute duel déséquilibré. L’UMP ne fera jamais aux villepinistes le cadeau d’une expulsion du parti : ce serait leur donner une légitimité bien trop encombrante, et s’exposer à une fronde incontrôlable - sans parler des comparaisons avec le PS que cela nourrirait. Il faut alors assumer l’idée d’une ligne directrice parfois flottante : comme Aymeric Caron le faisait remarquer sur Europe 1, si Hervé Mariton se définit comme membre à part entière de la majorité, Dominique de Villepin ou Jean-Pierre Grand sont eux dans l’opposition la plus frontale. Rester omniprésent, insaisissable, et si possible, imprévisible. Etre, en quelque sorte, sur tous les fronts, la mouche du coche de l’exécutif. Au moins jusqu’en 2011.
D’ici là, l’eau aura coulé sous les ponts : déficits publics, crise économique, Clearstream, régionales... autant de dossiers dont l’aboutissement de chacun redistribuera les cartes. Avant l’entame du dernier col, personne ne peut prédire dans quel état de forme il en enchaînera les lacets, même pas Nicolas Sarkozy, qui aime pourtant régulièrement à répéter son attachement à la "petite reine". Dominique de Villepin, lui, serait plutôt marathonien. Vélo, course à pied... Il ne manquerait plus que Jean-François Copé soit triathlète : rien ne l’empêcherait plus de se jeter à l’eau dès 2012.
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