Vivement Dimanche !
Il ne s’agit pas de cette émission TV dans laquelle tout le monde se congratule, se félicite, et s’aime, mais d’une journée décisive qui aura lieu le 6 mai, et qui verra peut-être une nouvelle page de notre pays se tourner avec le dernier tour de l’élection présidentielle.
Le débat du 2 mai entre les 2 finalistes aura été le point final d’une campagne, riche en surprises et en révélations.
On aura vu la chute d’Eva Joly, dénigrée scandaleusement sur son accent, et sur son manque d’éloquence, mais aussi l’arrivée en fanfare et drapeaux rouges d’un Jean-Luc Mélenchon conquérant, remettant la gauche de la gauche dans le paysage politique français.
On aura constaté aussi l’écroulement mou de François Bayrou, celui-ci n’ayant pas réussi à rassembler les français autour d’une idée centrale, et on aura découvert la conviction d’un François Hollande, lors du meeting du Bourget, face à un Sarközi vitupérant, et aux abois, prêt à toutes les compromissions pour récupérer, une fois de plus, les voix du Front National.
Le Pen aura réussi son pari, celui faire croire son parti fréquentable, réussissant à cacher les liens qui l’unissent aux pires des extrêmes de la droite, échouant à l’inverse de de son père, lequel avait éliminé, on s’en souvient, Lionel Jospin, lequel a abandonné provisoirement la politique, laissant ses électeurs se débrouiller avec les législatives qui suivaient, allant se réfugier dans son île.
Mais pour MLP, ce sont les législatives qui comptent maintenant, élections dans lesquelles elle voudrait bien récolter autant de sièges que son score présidentiel le laissait supposer, afin de refonder peut-être une droite dure qui s’assume, tentant ainsi de reprendre la tête du camp de la droite
Mais revenons au débat : on aura surtout retenu un président sortant sur la défensive, ne réussissant pas à défendre son projet, renvoyé dans les cordes par son adversaire, avec en guise de paquet cadeau, son bilan désastreux.
Maniant l’injure en traitant Hollande à plusieurs reprises de « menteur, de Ponce Pilate et autres petit calomniateur », il a rappelé une évidence : lorsque l’un des débatteurs en vient à injurier son adversaire, c’est qu’il est généralement en manque d’arguments.
On souviendra surement longtemps de l’envoi final de François Hollande, basant tout son programme sur une description sanglante du bilan présidentiel du candidat sortant, écrivant en creux ce qu’il ne veut pas être.
S’il gagne au soir du 6 mai, nul doutes que cette anaphore finale y sera pour quelque chose.
Pour ceux qui auraient raté ce moment de choix, en voici le texte quasi intégral :
« Moi, président de la République, je ne serai pas le chef de la majorité, je ne recevrai pas les parlementaires de la majorité à l’Elysée.
Moi, président de la République, je ne traiterai pas mon premier ministre de collaborateur.
Moi, président de la République, je ne participerai pas à des collectes de fond pour mon propre parti dans un hôtel parisien.
Moi, président de la République, je ferai fonctionne la justice de manière indépendante.
Moi, président de la République, je n’aurai pas la prétention de nommer les présidents des chaines publiques.
Moi, président de la République, j’aurais aussi à cœur de ne pas avoir de statut pénal du chef de l’état,
Moi, président de la République, je constituerai un gouvernement qui sera paritaire,
Moi, président de la République, il y aura un code de déontologie pour les ministres,
Moi, président de la République, les ministres ne pourraient pas cumuler leurs fonctions avec un mandat local,
Moi, président de la République, je ferai un acte de décentralisation,
Moi, président de la République, je ferai en sorte que les partenaires sociaux puissent être considérés,
Moi, président de la République, j’engagerai de grands débats, on a évoqué celui de l’énergie,
Moi, président de la République, j’introduirai la représentation proportionnelle pour les élections législatives,
Moi, président de la République, l’essaierai d’avoir de la hauteur de vue… » lien
Nous avons aussi droit à une « bataille de chiffres » pour laquelle, avec du recul, il n’est pas difficile de trancher.
Alors que, sur le chapitre de la dette française, le candidat PS annonçait 600 milliards de plus depuis que Sarközy est au pouvoir, ce dernier ne reconnaissait que le chiffre de 500, la réalité étant à la fin 2011 de 560, mais si l’on prend le chiffre de la dette en temps réel, on constate qu’elle a dépassé les 1758 milliards d’euros le 3 mai ; Comme elle était de 1152 milliards d’euros fin 2006, ça fait effectivement 606 milliards d’euros, et si l’on veut se souvenir que Sarkozy était ministre du budget dès le 1er avril 2005, Hollande avait donc bien raison. lien
Sur le nombre de chômeurs, le président sortant voulait retenir seulement le chiffre donné par le BIT (bureau international du travail) lequel ne comptabilise qu’un certain nombre de catégories de travailleurs, alors que le candidat socialiste utilisait les chiffres donnés par pole emploi, seule référence basée sur la réalité du terrain.
Depuis le point bas de 2008, d’après pole emploi, on compte, depuis l’élection de 2007, 1 336 200 chômeurs supplémentaires en France. lien
En réalité, on est encore loin du compte, car c’est oublier les travailleurs à temps partiel, et les 500 000 travailleurs rayés annuellement des listes de pole emploi pour des raisons parfois discutables : retard à un rendez vous, ou n’ayant pas reçu cette invitation, mais chômeurs malgré tout, et dans ce cas la, il faudrait ajouter 2,5 millions de chômeurs supplémentaires en 5 ans, car s’il est vrai que ces femmes et ces hommes ne sont plus comptabilisés, ils sont tout de même privés d’emploi. lien
Un sondage en temps réel sur le jugement porté par les auditeurs sur la prestation des deux candidats est sur ce lien, montrant qu’à part le moment où il a été question d’immigration, c’est la plupart du temps Hollande qui l’a emporté.
Le candidat-président voulait l’exploser, le réduire en miette, (lien) à la manière de Bernard Blier dans le célèbre « tonton flingueur, avec les merveilleux dialogues de Michel Audiard, ».
Extrait : « je vais lui montrer qui c’est Raoul ! Aux 4 coins de Paris qu’on va le retrouver, éparpillé par petits bouts, façon puzzle. Moi quand on m’en fait trop, j’correctionne plus, j’dynamite, j’disperse, j’ventile » (lien) mais ça ne s’est pas vraiment passé comme ça.
Celui qui se moquait de Hollande en le traitant de « Flamby », affirmant qu’il était « nul », se sera donc finalement cassé les dents sur un flan, découvrant un adversaire zen, un faux mou, capable de répondre coup pour coup. lien
On attend aussi en vain la confirmation du président candidat, lequel avait annoncé qu’il donnerait le nom de son premier ministre avant le 2ème tour, et les citoyens pourront s’interroger longtemps sur ce nom mystérieux, dont à ce jour il n’est plus question apparemment. lien
Il affirme aujourd’hui qu’il ne l’a jamais promis mais il n’est pas compliqué de constater le contraire. lien
Bayrou, au contraire, a tenu parole et a apporté, à titre personnel, son soutien à François Hollande, au grand dam du camp UMP qui l’accuse d’avoir pris cette décision par dépit, le candidat PS la jouant modeste, affirmant qu’il ne s’agissait pas d’un ralliement à sa candidature, mais seulement d’un geste personnel. lien
Toujours est-il que les manœuvres du président candidat pour séduire et le modem et le FN semblent avoir fait long feu, et il se retrouve isolé, désespéré, appelant à l’aide, voire au secours, menacé s’il n’est pas réélu d’avoir peut-être des comptes à rendre à la Justice dans les différentes affaires dans lesquelles il a été cité.
Du coté gouvernemental, c’est un peu la séquence « des rats qui quittent le navire », car sans attendre le résultat final, ils sont déjà 118 divers conseillers à avoir pris les devant, et à quitter leurs emplois élyséens. lien
Du coté de l’UMP, la lutte est peut-être ouverte pour la succession du candidat sortant entre Copé, Fillon, et Juppé puisque ce dernier a organisé, le lendemain du débat, une rencontre non prévue dans sa bonne ville de Bordeaux, signe probable d’une prochaine guerre de clans. lien
Les mouches auraient donc changé d’âne, comme aimait à dire Pierre Albaladejo, le célèbre commentateur de rugby, lorsqu’il voyait que le vent tournait et que la balance penchait de l’autre coté. lien
Comme dit mon vieil ami africain : « la nuit dure longtemps, mais le jour finit toujours par arriver ».
L’image illustrant l’article provient de « enquête-débat.fr »
Olivier Cabanel
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