Vous reprendrez bien un peu de déontologie Monsieur le Député
Petit à petit la France avance vers un meilleur encadrement des pratiques de lobbying. Le rapport 2012, présenté le 22 février dernier au Président de l'Assemblée nationale, Bernard Accoyer, par le déontologie de la chambre des députés en est une illustration. Même si l'avancée est encore timide.
Le déontologue de l'Assemblée nationale (un poste créé en avril 2011), Jean Gicquel, a remis le 22 février dernier son rapport annuel au Président de la chambre des députés, Bernard Accoyer. Et le gardien de la vertu républicaine s'en prend notamment, dans la trentaine de pages que compte son rapport, au fonctionnement des clubs parlementaires. Ces structures généralement informelles (pas de statuts déposés en Préfecture, ni d'élections en leur sein) sont gérées par des sociétés de conseil en communication et financées par des groupes privés. Elles rassemblent autour d'un thème donné des parlementaires intéressés par le sujet et leur proposent de débattre sur des problématiques liées au domaine du club, avec des intervenants extérieurs (parfois salariés ou proches des sociétés qui financent le club).
Il y a un an l'un de ces clubs avait créé la polémique. Consacré aux questions de santé, le club Hippocrate est financé par un laboratoire pharmaceutique, l'anglais GSK, un groupe de mutuelles privées, Malakoff Médéric (présidé par le frère du Président de la République) et un gestionnaire d'hôpitaux privés, Générale de Santé. Ensemble ces sociétés apportent près de 50 000 euros chaque année pour faire fonctionner le club. On se doute qu'elle ne le font pas par pure philanthropie mais qu'elles en attendent un retour. Le problème est que ce club est alors présidé par Gérard Bapt (PS) et Jean-Pierre Door (UMP) qui sont également respectivement président et rapporteur de la mission d'information parlementaire sur le Mediator à l'Assemblée nationale. Des articles sur Internet mettent en parallèle ces faits et le risque de conflits d'intérêts, GSK est un concurrent de Servier dans le domaine du diabète et au même moment l'un de ses médicaments, l'Avandia, est sur la sellette aux Etats-Unis. Le 25 février 2011 la journaliste Anne Jouan parle dans le Figaro d'un "sponsoring qui fait mauvais effet dans le contexte actuel". Interrogé quelques semaines plus tard par une équipe de France24 dans le cadre d'une enquête sur l'affaire Mediator et l'Avandia, Bapt fera une réponse pour le moins embarrassée à la question sur le risque de conflits d'intérêts. Il a d'ailleurs démissionné peu après la publication de l'article du Figaro.
La question de la place de ces clubs parlementaires dans le processus législatif, mis en lumière à l'occasion de cette polémique autour de Bapt et du club Hippocrate ne pouvait échapper au déontologie de l'Assemblée. Cité dans son rapport, le club Hippocrate fait dire au déontologie "il n'en reste pas moins qu'un club sur la santé publique financé par un grand laboratoire pharmaceutique est un curieux mélange des genres". D'autres clubs sont mentionnés comme le club Athéna (défense), le club Cérès (agriculture, financé par Total), émanations de la société de relations publiques Agora Europe, à l'origine du club Hippocrate.
Si l'on peut regretter la faiblesse des mesures proposées par le déontologue pour encadrer ces clubs (déclaration d'appartenance à un club obligatoire pour les députés, élaboration d'un code de déontologie pour les sociétés gérant ces clubs, retrait de la mention parlementaire dans la dénomination du club) on peut se réjouir de ce premier pas. Mais il reste beaucoup à faire. Pour mémoire les lobbyistes doivent se faire enregistrer auprès de l'Assemblée nationale pour accéder à l'enceinte parlementaire. Dans les faits, comme relaté précédemment, cette démarche est rarement remplie.
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