Caricature du prophète par Charlie Hebdo : Dissipons les passions !
Le siège du journal « Charlie Hebdo » a été détruit dans la nuit du mardi 2 novembre par un incendie criminel. La quasi-totalité des locaux de l’hebdomadaire satirique ont été détruits. Les dirigeants de la rédaction accusent des « intégristes musulmans », alors que le journal publie, ce mercredi, un numéro spécial, baptisé « Charia Hebdo », avec le prophète de l’islam* en rédacteur en chef exceptionnel.
Cela nous rappelle tristement les incidents survenus lors de la publication par ce même journal des caricatures danoises.
Dans son ensemble, la réaction musulmane avait été à l’époque disciplinée et digne. Toutefois, des drapeaux avaient été brûlés, des ambassades avaient été incendiées et des menaces de violence de différentes sortes avaient été reçues par les auteurs des dessins satiriques ;
Ces faits récents et passés sont inacceptables. En tant que musulmane je déplore personnellement ces actions. A mon humble avis, toutes les protestations violentes dans le cadre de cette affaire méritent une condamnation la plus vive.
Bien que l’identité des auteurs n’est à ce jours pas encore connue , il y a de fortes raisons de croire que ce sont des personnes de confession musulmane qui auraient agis au nom de leur religion, en réaction à la publication de la caricature du prophète Mohamed * par le journal Charlie Hebdo.
Ainsi cet article aura but de démontrer que les actions de ce genre ne sont en rien soutenues par les vrais enseignements islamiques. Il s’agira de démontrer que l’islam enseigne aussi des valeurs de liberté, dont la liberté d’expression, et il sera relaté des anecdotes intéressantes du temps du prophète * à ce sujet, qui permettra dans ce cadre tendu , une nouvelle vision et lecture des faits.
La valeur de liberté en islam
Il est clair en effet que la liberté de presse comme nous la connaissons aujourd’hui, n’existait pas à l’époque du prophète*, mais la conception générale de la liberté en Islam montre la position de la religion musulmane sur la question.
Dans le Coran , nous trouvons :
« "Quiconque le veut, qu'il croie, et quiconque le veut, qu'il mécroie" (Coran 18:29).
"Pas de contrainte en religion ! Car le bon chemin se distingue de l'errance..."(al-Baqarah, la Vache 2 : 256)
« Eh bien, rappelle ! Tu n'es là que pour rappeler. Tu n'as sur eux aucun pouvoir despotique. » (al-Ghachiyah, l'Enveloppante 88 : 21-22) »
« Par la sagesse et la bonne exhortation, appelle au sentier de ton Seigneur" Les Abeilles, v. 125
« Nous savons mieux que toi tout ce qu'ils disent et tu n'es nullement là pour les contraindre (à croire) par force. » (Caf, 50 : 45)
A la lecture de ces versets, il est clair et incontestable que la liberté d’expression, d’opinion, et de culte est permise en Islam. L’Islam garantit la liberté de vie et interdit l’oppression et la contrainte.
Ainsi, chaque être humain a le droit de penser comme il le veut et aucun être ne peut le contraindre à avoir telle ou telle opinion : Nous faisons ici référence à la liberté de culte « Pas de contrainte en religion » (coran)
L’on voit bien qu’en Islam, on peut dialoguer, partager ses points de vues , ainsi il est dit dans ce verset coranique « Et discute avec eux de la meilleure façon.] Sourate An-Nahl 16/125. Mais en aucun cas, on ne peut contraindre qui que ce soit et les musulmans n’ont pas pour rôle de dominer les autres. Chacun a le droit de penser et de pratiquer comme il le veut, les hommes ne sont pas à même de juger, ce pouvoir n’appartient qu’à Dieu.
Ainsi, l’on voit bien que la tolérance est une valeur tout comme la liberté, très importante en Islam.
L’Islam préserve, garantit et sacralise la liberté de conscience. « Dis : ‹Ô vous les dénégateurs ! Je n’adore pas ce que vous adorez. Et vous n’êtes pas adorateurs de ce que j’adore. Je ne suis pas adorateur de ce que vous adorez. Et vous n’êtes pas adorateurs de ce que j’adore. A vous votre religion, et à moi ma religion›. » S109
Ca en est ainsi, par une déclaration explicite : Vous, vous êtes libres dans votre choix et moi, je suis libre dans le mien. Y a-t-il plus grande liberté ?
De plus, il n’est pas simplement question de liberté d’expression ou de culte, l’Islam désencourage fortement aussi ceux qui s’attaquent à des personnes qui ont des pratiques qui ne sont pas islamiques : le Coran l’indique bien : "Tu n'es là que pour rappeler. Tu n'as sur eux aucun pouvoir despotique. »(88.21-22)
Nous avons dans l’histoire des prophètes un merveilleux exemple de comportement et de sagesse :
Au sujet de Pharaon, Dieu dit au prophète Moussa (Moïse) « [Et parlez-lui d’une manière douce peut-être se rappellera-il ou craindra-il (Allah).] »
A ceux qui s’adonnaient à l’homosexualité, Lot ne s’est contenté que de rappeler et jamais il ne les a insulter, attaquer ou essayer de faire appliquer son message par la violence. Ainsi, les actions homophobes sont tout à fait condamnables même si l'islam n'approuve pas l'homosexualité .
Maintes exemples comme ceux-ci nous sont rapportés par le Coran, montrant qu’en tant que musulmans, nous nous devons de faire preuve de tolérance et d’ouverture d’esprit : chacun pense, agit et pratique comme il le veut et réciproquement, mais le respect doit primer.
Le respect des sensibilités : une composante de la liberté d’expression
Dans la définition de la liberté, nous avons aussi :« La liberté est la possibilité de pouvoir agir selon sa propre volonté, dans le cadre d'un système politique ou social, dans la mesure où l'on ne porte pas atteinte aux droits des autres et à la sécurité publique. »
En Islam, la non atteinte aux droits des autres et à la sécurité publique est aussi reconnue , nous en venons à traiter de la notion de liberté et de la morale.
On peut être libre mais sans notre conscience , notre liberté n’en n’est plus une et l’on s’oriente vers une destruction individuelle et collective.
Ainsi nous avons à maintes reprises dans le Coran :
Le Coran [16:90]
Certes, Dieu commande l'équité, la bienfaisance et l'assistance aux proches. Et Il interdit la turpitude, l'acte répréhensible et la rébellion. Il vous exhorte afin que vous vous souveniez.
Le Coran [5:8]
Ô les croyants ! Soyez stricts (dans vos devoirs) envers Dieu et (soyez) des témoins équitables. Et que la haine pour un peuple ne vous incite pas à être injuste. Pratiquez l'équité : cela est plus proche de la piété. Et craignez Dieu. Car Dieu est certes Parfaitement Connaisseur de ce que vous faites.
Ainsi, il est clair qu’en Islam, mon propre intérêt n’a pas de valeur si je ne pense pas aussi aux autres.
Ces versets nous le montrent très clairement que nous sommes libres d’agir, de penser mais islamiquement tout comme dans la démocratie, notre liberté ne doit pas nuire à celle des autres.
En fait, l'islam reconnaît le droit à la liberté de pensée et d'expression pour tous les citoyens d'un état islamique, à condition qu'elle soit utilisée pour propager la vérité et la vertu, et non pour répandre la méchanceté et le mal. Le concept islamique de liberté d'expression est donc bien supérieur à celui qui prévaut en Occident.
En effet, l'Islam ne permettra en aucune circonstance la propagation de la méchanceté et du mal. Il interdit à quiconque d'utiliser un langage offensant ou injurieux sous prétexte de critique.
Or il est vrai que par certains aspects, le journal Charli Hebdo abuse de la liberté d’expression pour dénigrer une religion et une communauté toute entière. Le respect des sensibilités communes, bien que légiféré en France, n’est pas respecté, et la liberté d’expression de la presse prime sur cette notion.
Mais il faut aussi prendre en considération que dans le passé de notre pays et de l’Europe, la censure fut utilisée comme une arme, et que cette liberté d’expression, bien que utilisée abusivement parfois, est le garant d’une séparation entre le pouvoir et les médias, bien que cette séparation est aujourd’hui discutable , des journalistes admettent eux même parfois s’auto-censurer mais c’est un autre sujet.
Face aux éventuels abus de cette liberté d’expression, les personnes se sentant bafouées, sont en droit de déposer une plainte devant les tribunaux. C’est un droit qui peut être une réponse respectueuse , légale et surtout PACIFIQUE.
En 2006, deux des principales fédérations de mosquées du Conseil français du culte musulman, La Fédération de la Grande Mosquée de Paris (GMP) et l’Union des organisations islamiques de France (UOIF) avait porté plainte ensemble au pénal dans l’affaire des caricatures Danoises publié par Charlie Hebdo. Le tribunal avait d’ailleurs jugé recevable la plainte , le journal avaient été par la suite dépénalisé.
Mais le dépôt de plainte reste un moyen de marquer tout de même sa désapprobation et de rappeler qu’aucune liberté n’est absolue et que son exercice doit être tempéré par le respect mutuel et l’égard pour les autres.
Nous pouvons relevé ce fait datant de 2005. Le Prince Harry d’Angleterre fut réprimandé pour avoir porté un uniforme nazi à un bal costumé. S’il est vrai qu’en le portant il ne faisait qu’user de sa liberté d’ expression, il est aussi vrai que par cet acte il blessait les sentiments de millions de personnes, qui elles-mêmes, ou dont les proches, avaient souffert des nazis. On lui exigea donc des excuses. Il faut faire remarquer à son honneur qu’il le fit volontier.
De même, s’il est vrai que les journaux et la presse en général font usage de leur liberté de parole pour publier des caricatures sujettes à controverse, il est aussi vrai que le résultat n’est autre que les sentiments de plusieurs milliards de personnes en sont blessés, des personnes pour lesquelles la cible des caricatures est un être très cher et extrêmement respecté.
L’exemple du prophète Mohamed Face à la calomnie
Mais revenons sur l’incendie criminel qui a touché les locaux du magazine Charlie Hebdo. Parmi les différentes réactions dans les journaux télévisés, j’ai relevé parfois de la part de certains musulmans, une sorte d’agrément de ces actes, finalement : « Ils l ‘ont bien cherché … » par exemple.
En surfant sur le net, je vois aussi des réactions de colère, des vociférations, des insultes envers les auteurs des caricatures.
Ces attitudes sont pourtant loin de celles adoptées par le prophète Mohamed * ou ses compagnons du temps de l’avènement de l’islam. Je perçois à regret beaucoup d’ignorance à ce sujet. Beaucoup se soucie d’imiter le Messager * dans sa manière de manger ou de se vêtir, et parallèlement agisse à l’encontre de ses enseignements, dans ce qui est du comportement à avoir avec autrui par exemple.
Pourtant il serait utile d’énumérer un certains nombre de faits . Chacun y verra une leçon à en tirer je l’espère.
Il faut savoir que lorsque le prophète * reçu la révélation du Coran, et commença le prêche, la plupart des habitants de la Mecque ont recouru à la voie de la persécution contre les musulmans. Le Prophète Mohamed * fut leur cible de moqueries et de harcèlement, notamment lorsqu'il se rendait à la prière auprès de la Ka` ba (le 1er édifice qui fut construit une 1ère fois par Adam , sur ordre divin, puis successivement par Noé, et Abraham).
Une fois, Abû Jahl (un des oncle du messager*) tenta de casser le crâne du prophète* lorsqu'il était prosterné .Le prophète* ne réagie pas.
`Uqba ibn Abî Mu`ay , un habitant de la Mecque, devait quand à lui, guetter le moment de la prosternation du Prophète en prière, pour lui jeter sur le dos, les entrailles d'une chamelle. Ce fut d’ailleurs fait. Aucun musulman n'osa alors en débarrasser le Prophète * jusqu'à l'arrivée de sa fille Fâtima qui s'empressa de mettre les déchets de côté. Le prophète* ne se vengea pas de cette humiliation , il n’eu pour seule réaction de relever la tête et de dire par trois fois : « Seigneur, préserve-moi des Qouraichites ».(c’est à dire, les habitants de la mecques)
Une autre fois, alors que le Prophète * priait dans l'Enceinte de la Ka`ba vint `Uqba ibn Abî Mu`ayt, ce dernier enroula son vêtement autour du cou du Prophète * et le lui serra rudement pour l'étouffer. Aussitôt, Abû Bakr As-Siddîq , (un des compagnon et ami du prophète * ) arriva et repoussa l'homme loin du Prophète* en citant ce verset :
« Tuez-vous un homme parce qu'il dit : "Mon Seigneur est Allah ?" Alors qu'il est venu à vous avec les preuves évidentes de la part de votre Seigneur » (Ghâfir Pardonneur 40 : 28)
Quant à Abu Lahab, un autre oncle de Mohammed *, il était le plus enclin au mal. Il accusait de menteur le prophète*. Il traînait derrière lui, dans les marchés, pour le contredire.
Il était également le voisin du Prophète. Il déversait devant sa porte toute sortes d’immondices et de pourritures. Toutes les fois qu'on lui jetait cette saleté, le Messager * la prenait à l'aide d'un bâton puis la jetait dans la rue. Il disait ensuite : « Ô fils de ‘Abdel Mouttaleb !(C'est à dire Abu Lahab) Quelle sorte de voisinage est-ce là ? ».
La femme d’Abu Lahab, Umm Jamil, écrivait des poèmes satiriques sur Mohammed * qu’elle chantait au grand public. Elle forgeait des mensonges et des intrigues à son égard.
La réaction du prophète * face à cela fut toujours pacifique.
Ce que nous venons de voir est une image très réduite de ce que le Prophète* rencontrait comme injustice, humiliation et agression quotidienne. Les musulmans dans les premiers temps de la prophétie de Mohamed *, supportèrent nombres de tourments, en particuliers les plus pauvres et les plus isolés, comme les persécutions, le meurtre , les tortures, et les actes de barbarie.
Les réactions furent toujours pacifiques, enclins au dialogue et à la conciliation. Quelques années années plus tard, alors que Mohamed * avait acquis assez de force pour contester les Qurayshites (les habitants de la Mecque) et, éventuellement, les vaincre et prendre leur ville ; il préféra conclure une entente avec eux, avec ceux la même qui les avaient tant tourmenté. Appelé " traité de Hudaybiya" , du nom de la ville où il fut signé, il était une sorte de pacte de paix. Il ne fut par la suite pas respecté par la partie adverse.
Ainsi par l’énumération des ces faits, l’on remarque le caractère pacifique du prophète* face aux nombreuses injures dont il était victime. C’est une leçon d’humanisme et c’est cette aspect qui devrait être retenu par les musulmans, dans leur souci d’imiter le prophète * et cette aspect là qui devait être encouragé et montré comme véritable image de l’islam, cet islam respectueux et tolérant, trahi bien souvent par ses propres adeptes.
Conclusion
En conclusion, je répéterais encore une fois mon obfuscation face à l’incendie criminel des locaux du journal Charlie hebdo. S'il s’avère que ce sont véritablement des êrsonnes de confession musulmanbe, qui en sont les responsables, ils auraient par la-même trahi le véritable message de l’islam et salit l’honneur des musulmans. Nombre d’exemples en effet, montrent que face à la moquerie , le prophète réagissait toujours pacifiquement.
La liberté d’expression est un droit universel. Néanmoins cette liberté ne devrait pas être employée dans le but de blesser certaines sensibilités.
De simples paroles suffisent pour expliquer cela et en aucun cas , la destruction du bien d’autrui ne devrait être employée comme moyen de montrer une désapprobation, mais il serait plutôt un acte des plus archaïques, et barbares. Les auteurs méritent donc une peine sévère, et les victimes , devront être indemnisées. Quand aux musulmans se sentant blessés par la publications de certaines caricatures, ils sont en droit de se défendre et de déposer une plainte devant les tribunaux .
Laura Asma
* : Que la paix soit sur le prophète Mohammed ainsi que sur tous les prophètes et messagers
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