« Nul ne doit se sentir exclu »
La réintégration par le Pape Benoît XVI de quatre évèques schismatiques et le scandale provoqué par les propos négationnistes de Richard Williamson ont ému à juste titre une grande majorité de catholiques mais cet événement, pitoyable pour l’image de l’Eglise, est peut-être la goutte d’eau qui va faire déborder le bénitier et provoquer la révolte parmi les croyants. Les fidèles de cette église, dans leur grande majorité, ne se reconnaissent plus dans cette institution sclérosée qui tend la main à ses enfants intégristes mais qui, dans le même temps, refuse obstinément de laisser des divorcés-remariés accéder à la communion, interdit aux femmes l’accès à la prêtrise et impose à son clergé séculier un célibat douloureux. Deux poids, deux mesures.
L’Eglise de Rome n’évoluera jamais sur ces questions tant qu’elle n’y sera pas contrainte par une partie de ses fidèles. Les traditionnalistes de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie-X ont réquisitionné par la force, l’église de saint Nicolas du Chardonnet et l’occupe illégalement depuis le 27 Février 1977. Ils n’ont jamais été délogés. Par la force, ils ont réussi à obtenir tout ce qu’ils voulaient. La levée d’excommunication de ses quatres évèques s’est faite sans contrepartie aucune... Cadeau ! Et c’est seulement devant l’immense émotion et la colère suscitées par sa décision que l’infaillibe Benoit XVI a fini par poser certaines conditions à la réintégration de Richard Williamson...
Rêvons un peu... Imaginons qu’un jour, des évêques ou des prêtres, plus courageux que la moyenne, des prêtres mariés, des femmes qui désireraient devenir prêtres, accompagnés de catholiques plus ou moins exclus tels que des divorcés remariés, des homosexuels, se réveillent, sortent de leur soumission, disent "ça suffit !" et eux aussi occupent des églises au nom d’un nouveau "Mouvement Catholique Réformé". Politique du fait accompli. Elle a si bien fonctionné pour les intégristes. Cette "Eglise Catholique Réformée" ne serait pas une énième église protestante mais bien plutôt une partie de l’Eglise catholique qui aurait pris en compte et intégré des éléments de la réforme protestante. Elle resterait en pleine communion avec le reste des catholiques tout en affirmant son autonomie par rapport à l’institution du Saint-Siège. Un jour ou l’autre, cela finira bien par se produire et cette révolution du catholicisme viendra peut-être de France, la turbulente "fille ainée de l’église".
Au nom de la Raison, sans laquelle la Foi n’est que fanatisme, les catholiques progressistes n’ont plus d’autres choix que de bousculer l’Eglise pour la libérer des chaines de la tradition, rendre ses structures plus démocratiques et en finir avec cet absolutisme papal d’un autre âge. L’Eglise doit redevenir vivante. Il est légitime que ceux qui préfèrent la messe en latin soient libres de s’exprimer et libre de pratiquer leur rite, mais il est également légitime que ceux qui souhaitent une église plus ouverte sur la société et prenant en compte les évolutions de cette dernière puissent s’exprimer également.
Par exemple, concernant l’admission des femmes à la prêtrise, l’Eglise Catholique Romaine considère qu’elle n’est pas possible car Jésus a choisi uniquement des hommes pour former le collège des douze apôtres. Cette argumentation ne tient pas compte du fait sociologique de l’époque. Il y a deux mille ans, la place de la femme en Palestine n’était pas la même qu’en Europe Occidentale aujourd’hui. En délivrant une parole qui était révolutionnaire et provocatrice pour l’époque, Jésus pouvait-il encore se permettre de choisir des femmes parmi les douze apôtres ? Son message serait-il passé s’il avait voulu respecter la parité ? Aujourd’hui, dans nos sociétés, l’égalité homme-femme est un fait. L’homme et la femme sont différents mais complémentaires. Selon le récit de la Genèse, la première femme a été façonnée par Dieu à partir de la chair du premier homme. Mais depuis ce temps, chaque être humain sans exception a poussé dans le ventre d’une femme... La femme, tout comme l’homme, est celle par qui la vie est possible. Rien ne justifie que les femmes n’aient pas accès à la prêtrise.
"Catholique" signifie "universel". La force de l’Eglise catholique, c’est sa foi en l’universalité du message du Christ et sa capacité à faire vivre ensemble, bon gré mal gré, plus d’un milliard de fidèles de tous continents et de toutes cultures. Il y a quelques mois, pour justifier le retour de la messe en latin, Benoit XVI avait déclaré : "Nul ne doit se sentir exclu". Aujourd’hui, ce sont pourtant des millions de catholiques progressistes qui ne se reconnaissent plus dans cette Eglise d’une autre époque.
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