Si le Président de la République travaillait à l’hôpital, il serait certainement anesthésiste. Le problème, c’est que ceux qui exercent ce métier sont aussi spécialisés en réanimation et là, notre Président n’a pas la compétence attendue par les Français
Discours du Président à STRASBOURG : « Entre 1998 et 2008 - j’ai pris cette référence parce qu’il y avait des gouvernements de gauche et de droite - la France au travers des dépenses de l’assurance maladie au profit des hôpitaux a augmenté le budget de près de 50%, c’est 23 milliards d’euros de plus pour l’hôpital et les cliniques sur les 10 dernières années. 23 milliards de plus, je ne m’en satisfais pas. Je dis simplement que le budget de la Nation a augmenté de 50% sur les 10 dernières années dans de la situation économique et financière que l’on connaît. 23 milliards d’euros de plus, je livre ce chiffre pour que chacun puisse en débattre et y réfléchir. »
J’ai écouté le Président ; j’ai réfléchi !
Sur les compétences en anesthésie :
En effet quel est le budget qui peut se vanter d’avoir augmenté de 50% en 10 ans ? D’abord je me souvins que sur la seule année 2007 le salaire du Président de la République avait augmenté de 140%. Puis, pour ne pas m’en prendre toujours au même, j’ai observé l’évolution du prix du pain, produit de base par excellence. Depuis 2001, l’augmentation est de 456 % (*) ! Nous ne parlerons pas du budget de l’Elysée, qui a été multiplié par 3 en 3 ans, dont + 11,4% pour la seule année 2009 !
Mais revenons aux chiffres de l’hôpital. Entre 1998 et 2007 les dépenses d’hospitalisations publiques et privées ont augmentées de 31,75% (1) ce qui n’est pas tout à fait les près de 50% annoncés par le Président. Dans le même temps, il omet de préciser que les dépenses de soins de ville (2) ont augmenté de 60,58 %. (1)
Quant aux 23 milliards de plus pour l’hôpital et les cliniques, c’est exactement le montant des exonérations de charges sociales pour les entreprises en 2006, d’après la Commission des comptes de la sécurité sociale.
Les chiffres sont des éléments qui peuvent servir l’anesthésiste ou le réanimateur. Pour l’instant, je reconnais que le Président de la République est doué de compétences en anesthésie.
Sur l’emploi de réanimateur :
La réanimation est une technique qui permet de ramener à la vie des gens qui sont prêt à la perdre. Je veux vous citer en premier une phrase du manifeste contre la pauvreté de Martin Hirsh (3) : Dans notre pays, l’espérance de vie des personnes les plus défavorisées se rapproche en France de celle de certains pays du tiers monde » et de conclure par ces deux phrases relevées dans l’avis n° 101 du Comité Consultatif National d’Ethique des Sciences de la Vie et de la Santé ; (4)
S’agissant de l’hôpital, le Comité recommande « de s’assurer du maintien du lien social pour éviter que la personne ne sombre dans l’exclusion une fois le diagnostic fait et le traitement entrepris. Quelle logique est à l’œuvre, si le succès médical est suivi d’une mort sociale ? »
« De se réinterroger sur la mission primaire essentielle de l’hôpital. Celle-ci a en effet dérivé de sa mission originelle d’accueil de la précarité et de la maladie, puis de sa mission de recherche et d’enseignement, vers la situation actuelle qui fait de plus en plus de l’hôpital un service public, industriel et commercial qui a pour conséquence de déboucher sur un primat absolu donné à la rentabilité économique, au lieu de continuer à lui conférer une dimension sociale. »
Que pouvons-nous ajouter à cela ? Si ce n’est que le Président de la République propose tout le contraire dans son projet de Loi Hôpital, Patient, Santé, Territoire »
Oui, le Président de la République au chevet de l’hôpital, a manifestement des dons d’anesthésiste, mais il est indubitablement incapable de réanimer le corps anesthésié,
Denis GARNIER
(*) En 2001 la baguette de pain était de 1,15 Franc soit 0,18 euros. Sept ans plus tard, en 2008, la même baguette nous coûte 80 centimes d’euro, soit l’équivalent de 5,25 F et une augmentation de 456 %
(1) chiffres de la commission des comptes de la sécurité sociale comparatif dépenses 1998 et dépenses 2007 note point de conjoncture n° 4-5
(2) les honoraires des médecins libéraux, des dentistes, les prescriptions, les indemnités journalières.
(3)“Manifeste contre la pauvreté” par Martin Hirsch et Jérôme Cordelier, Oh Editions, 2004, 180 p