Covid-19 : les Engagés et les Enragés
« Voilà plus d’un an que nous sommes collectivement plongés dans cette crise sanitaire qui semble ne plus finir. Chaque jour, les médias font état d’une réalité douloureuse et de chiffres toujours plus inquiétants (…). Chaque jour, dans les centres de vaccination, dans nos cabinets, dans les pharmacies, à domicile chez les patients, nous, professionnels de santé, contribuons à relever le défi de la vaccination aux côtés des collectivités territoriales, des autorités sanitaires et bien sûr, aux côtés des centaines de milliers de citoyens qui se présentent à nous. (…) Alors gardons espoir et poursuivons nos efforts. » (#DéfiVaccination, initiative soutenue par plus de 7 000 praticiens, le 28 avril 2021).
Comme prévu, l’extension du passe sanitaire à des lieux de vie sociale va être mise en application ce lundi 9 août 2021. Quelques Français, depuis quelques semaines, se sont mis à manifester leur désapprobation de la politique sanitaire du gouvernement. Ils en ont tout à fait le droit et c’est même un acte citoyen de vouloir l’exprimer, c’est ainsi qu’une démocratie vivante s’exprime.
Comme disait Albert Camus, la démocratie, c’est la protection des minorités (dans ses "Carnets" : « La démocratie, ce n’est pas la loi de la majorité, mais la protection de la minorité. »). Non seulement personne n’a interdit à un seul Français de contester une mesure gouvernementale, mais personne non plus n’a empêché un seul Français à le manifester, dès lors qu’il le fait dans une démarche pacifique qui ne mettre en danger aucune personne ni aucun bien. Et d’ailleurs, personne n’a jamais dit que les mesures gouvernementales étaient parfaites : la politique a toujours été l’art insatisfaisant de l’équilibre entre l’idéal et le réalisable.
Ainsi, le samedi 7 août 2021, 237 000 personnes ont manifesté partout en France (dans environ 150 rassemblements) pour exprimer leur désapprobation. C’est un peu plus que le samedi 31 juillet 2021. Pour la première quinzaine du mois d’août, on peut dire, certes, que c’est "pas mal", mais ce n’est pas vraiment nouveau.
Les plus "anciens" se "rappelleront" (?) l’été 1953 (nan, je n’y étais pas !!). À partir du 4 août 1953, de nombreux "mouvements sociaux" ont surgi pour s’opposer à la politique du nouveau Président du Conseil Joseph Laniel, entre autres, une réforme de la retraite des fonctionnaires pour laquelle il avait été mandaté par les députés le 8 juillet 1953. Tous les fonctionnaires se sont mis à faire une grève illimitée, cela a commencé par les postiers, puis les éboueurs, les électriciens, les cheminots, les gaziers, les aiguilleurs du ciel, etc. jusqu’à ce que le gouvernement ait accepté de négocier le 21 août 1953. Certains, d’ailleurs, estiment que ce fut cet été 1953 qui a marqué l’idée que la France était (définitivement) irréformable.
Comme on le voit, l’été 2021 avec ces quelques centaines de milliers de Français qui manifestent, faute d’avoir d’autres activités estivales plus réjouissantes, c’est finalement assez faible par rapport aux millions de personnes qui ont mis en jeu leur salaire cet été 1953 (et je ne parle pas, bien sûr, de la Révolution de 1830).
Mais le plus ridicule, c’est surtout les raisons de la protestation : nous serions entrés dans une dictature horrible. Oxymore avec le droit de manifester et la liberté d’expression ! Et surtout, pourquoi n’ont-ils pas manifesté lorsque c’était pire, lorsque le gouvernement avait imposé (temporairement) le confinement ? Aucune réponse, et pourtant le passe sanitaire, c’est une solution beaucoup moins contraignante que le confinement, ce qui est heureux et sa raison d’être.
Une dictature, du reste, n’a pas de date de péremption. Ici, l’extension du passe sanitaire sera applicable au plus tard jusqu’au 15 novembre 2021, en espérant que la situation sanitaire permette au pays de sortir de l’état d’urgence sanitaire. Je rappelle que cet état d’urgence a été décrété par Emmanuel Macron le 12 juillet 2021, tout simplement parce que l’ancien état d’urgence avait été levé auparavant (il n’était donc pas permanent), levé peu avant sans connaître l’évolution épidémique future (un Président de la République, jusqu’à nouvel ordre, n’est pas madame soleil). Une pandémie est une sacrée mouise pour toute la société, mais heureusement, la plupart des Français ont compris qu’il fallait lutter contre le virus et pas contre le gouvernement qui cherche à prendre les meilleures armes pour combattre le virus (ces armes, ce sont la vaccination et les tests de dépistage).
Ce qui me gêne dans le traitement de l’information, c’est la prime aux râleurs alors qu’il y aurait d’autres sujets d’actualité sanitaire plus positifs, d’autres acteurs de la crise sanitaire qui mériteraient plus d’attention.
On peut donner par exemple des chiffres de la vaccination. Au 5 août 2021, 44 012 990 personnes ont reçu au moins une dose, soit 65,3% de la population française (dont 36 628 258 qui sont complètement vaccinées). Cela signifie aussi que 72% des adultes de moins de 50 ans sont vaccinés, 86% des personnes de 50 ans et plus sont vaccinées, et 88% des personnes de 65 ans et plus sont vaccinées.
J’ai donc tendance à comparer le nombre de manifestants qui refusent de prendre en considération la valeur constitutionnelle de la protection de la santé (merci pour leurs proches fragiles) à ceux qui ont compris qu’il fallait lutter et résister contre l’épidémie. Le nombre quotidien moyen d’injections réalisées sur les sept derniers jours est de 531 643 au total, dont 323 416 pour les premières doses et 207 227 pour les deuxièmes doses (j’insiste : chaque jour, nombre moyen !). Et cela, en plein été.
Ces données sont aujourd’hui extrêmement rassurantes, non seulement sur la capacité de la France à pouvoir faire face à la quatrième vague, mais aussi sur la compréhension du peuple français à vouloir en finir avec ce virus. La France résiste fortement (le taux de reproduction effectif s’effondre), et c’est heureux, heureux pour la santé des Français, heureux pour les milliers de familles qui ne seront pas endeuillées, heureux pour le personnel soignant qui ne va probablement pas être submergé par cette nouvelle épreuve en septembre (je croise les doigts !).
J’ai écrit "et cela, en plein été". Et là, je vais une nouvelle fois insister. J’ai déjà fait part de mon expérience (beaucoup trop minime pour être méritoire) de bénévole dans un centre de vaccination (j’ai repris du service, j’en reparlerai plus tard ; cette expérience me permet surtout de comprendre comment tout fonctionne), et je dois donc rappeler qu’on ne vaccine pas sur simple demande de la personne à vacciner.
Derrière toute injection, il y a une très lourde organisation qui vise à assurer le bon déroulement de la vaccination, non seulement sur la logistique (en sachant que pour Pfizer, par exemple, on doit vacciner par multiples de sept doses en une journée), mais aussi sur la protection individuelle : consultation préalable d’un médecin avant l’injection, attente de quinze minutes avant de repartir (il faut donc connaître l’heure exacte de l’injection, surveiller les quinze minutes et aller voir la personne nouvellement vaccinée qu’aucun effet secondaire immédiat n’a eu lieu avant de la laisser repartir), etc.
Je ne parle même pas des pharmaciens et des médecins qui, individuellement, dans leurs officines ou cabinets, se sont mis aussi à faire des vaccinations selon leurs possibilités (durant la semaine dernière, 603 000 injections ont été réalisées dans les pharmacies et chez les médecins de ville).
Il y a donc des médecins, des infirmiers, des agents communaux (car la plupart des centres de vaccination sont organisés par les municipalités), mais aussi des bénévoles qui prennent sur leur temps libre pour s’occuper de la santé des autres.
Eh bien, quand j’ai vu le panneau mis en avant sur cet article, je me suis dit : chapeau, les bénévoles, chapeau les engagés ! C ‘est l’exemple très fréquent d’un centre de vaccination qui a ouvert même le week-end, même le dimanche matin, en plein été. Pendant que d’autres sont en vacances.
Plutôt que de ruminer sans arrêt sur le nombre de manifestants qui n’apportent rien à la collectivité nationale, j’aurais préféré que les journalistes, les chaînes d’information continue et tous ceux qui sont censés parler d’actualité se penchent un peu plus sur tous ces bénévoles qui sont engagés dans cette résistance nationale contre le virus et sans qui ces statistiques rassurantes n’auraient jamais été atteintes.
Eux, ces engagés, ces bénévoles, prêts à sacrifier leurs vacances pourtant bien méritées, ils ont choisi de résister, ils n’ont pas cherché à savoir si le Conseil Constitutionnel devait avoir des compétences politiques ou médicales (évidemment que non, il ne les a pas, ce n’est pas son rôle !), ils ont compris qu’une épidémie nécessite une réactivité très forte pour empêcher la propagation du virus et qu’il y a urgence. Beaucoup de médecins hospitaliers peuvent témoigner qu’ils reçoivent dans leurs services ou en réanimation des personnes qui n’étaient pas vaccinées, qui pensaient peut-être se faire vacciner mais à leur retour de vacances. Et certains en meurent par simple négligence.
Quand il y a une solution efficace pour lutter contre la maladie, ne pas s’en servir relève d’une non-assistance à personnes en danger. C’est donc du devoir de l’État de tout faire pour inciter à la vaccination. Ces engagés font partie de ces héros qui luttent fièrement tandis que les râleurs et autres grincheux montrent qu’ils sont complètement hors-sol quand on pense à ces nations qui n’ont pas la chance de la France de pouvoir vacciner aussi massivement que souhaitable (dont la Tunisie, le Maroc, l’Indonésie, etc.).
Aussi sur le blog.
Sylvain Rakotoarison (08 août 2021)
http://www.rakotoarison.eu
Pour aller plus loin :
Covid-19 : les Engagés et les Enragés.
Le passe sanitaire validé par le Conseil Constitutionnel.
Décision n°2021-824 DC du 5 août 2021 du Conseil Constitutionnel sur la loi relative à la gestion de la crise sanitaire (texte intégral).
Couverture vaccinale : la France dépasse les États-Unis et l’Allemagne.
L’heureux engagement du Président Macron en faveur de la vaccination des jeunes.
Mathématiques alternatives (une vidéo à voir absolument).
La Science, la Recherche et le Doute.
Covid-19 : se faire vacciner, c’est résister !
Audition d’Olivier Véran au Sénat le 22 juillet 2021 sur le passe sanitaire (à télécharger).
Motion de rejet préalable sur l passe sanitaire le 25 juillet 2021.
Variant delta : la territorialisation des restrictions sanitaires.
Covid-19 : les bénéfices-risques de la vaccination des adolescents.
4e vague : passe sanitaire ou reconfinement ?
Les outrances désolantes des antivax, enfants gâtés de la planète.
Fête nationale : cinq ans plus tard…
Emmanuel Macron, la méthode forte.
Emmanuel Macron face à la 4e vague (2).
Emmanuel Macron face à la 4e vague (1).
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