En Suisse, les thérapies complémentaires ont valeur constitutionnelle
Alors qu’en France les autorités politiques et sanitaires leur font plutôt la guerre, les médecines non-conventionnelles viennent d’être largement plébiscitées en Suisse qui les a inscrites dans sa Constitution suite à une « votation ».

Art. 118a (nouveau) Médecines complémentaires
« La Confédération et les cantons pourvoient, dans les limites de leurs compétences respectives, à la prise en compte des médecines complémentaires. »
Une très large majorité des votants (1 283 838 de oui, soit 67%) a accepté l´article constitutionnel. Un véritable plébiscite !
Ainsi, par la grâce de cette « votation », le pays reconnaît les médecines complémentaires comme légitimes et indispensables au système de santé du pays. Déjà approuvé à plus de 78% des voix par le Parlement, cet amendement permettra notamment d’assurer la prise en charge par l’assurance maladie de cinq méthodes de médecine complémentaire : la médecine anthroposophique, l´homéopathie, la thérapie neurale (qui prend en compte l´idée d´une transmission d´énergie manuelle à la frontière entre médecine et foi), la phytothérapie et la médecine chinoise traditionnelle.
Afin de pouvoir satisfaire le plus rapidement et le plus efficacement possible les revendications du projet, un groupe parlementaire Médecines complémentaires a même été fondé. Il est présidé par la conseillère nationale Edith Graf-Litscher (PS TG) et par le conseiller aux États Rolf Büttiker (PRL SO), qui est à l´origine de l´article constitutionnel. Il se compose actuellement de 23 membres du Conseil national et de 7 membres du Conseil des Etats. Tous les grands partis (PdT, Verts, PS, PEV, PDC, PBD, PLR, UDC) et toutes les régions linguistiques de la Suisse sont représentés dans ce groupe.
Des diplômes de thérapeutes non-médecins
Le Parlement national et les parlements cantonaux devront maintenant satisfaire un noyau de revendications essentielles (outre la réintégration de 5 méthodes de médecine complémentaire dans l´assurance de base) : création de diplômes nationaux pour les thérapeutes non-médecins, et d´un régime d´autorisations cantonales ; intégration dans l´enseignement et la recherche de la médecine complémentaire pratiquée par les médecins ; préservation de la pharmacopée.
Les cinq sociétés médicales professionnelles, correspondant à ces pratiques complémentaires, feront bientôt une nouvelle demande d´intégration dans l´assurance de base au cours des cinq prochains mois. Si les demandes sont une nouvelle fois refusées « pour des raisons idéologiques », note le Comité national à l’origine de l’initiative populaire, une modification de la LAMal (loi fédéral sur l’assurance maladie) sera proposée. Il faudra alors spécifier que « la preuve que ces méthodes répondent aux critères d´efficacité, d’adéquation et d’économicité doit être apportée selon des méthodes scientifiques, mais non selon les méthodes de la médecine classique ».
L´élaboration de diplômes nationaux pour les thérapeutes non-médecins, qui avait été interrompue par le Conseil fédéral, devrait être reprise. Le groupe parlementaire Médecine complémentaire et les associations professionnelles concernées vont travailler dans ce sens avec l´Office fédéral de la formation professionnelle et de la technologie, compétent en la matière, et avec la Conférence des directeurs de la santé, pour que tous les cantons instituent un régime d´autorisations de pratiquer.
En France, une approche plutôt répressive
Dans tous les cantons universitaires, des interventions auront lieu pour demander la création de postes de « professeurs ordinaires de médecine complémentaire ». Objectif : que tout médecin classique reçoive au cours de ses études des connaissances de base sur les thérapies de médecine complémentaire, pour pouvoir informer objectivement ses patients sur ces méthodes qui sont souhaitées par une grande majorité de la population. La recherche scientifique doit par ailleurs pouvoir s´intensifier.
Edith Graf- Litscher (PS TG) n’a pas caché sa joie : « La collaboration entre la médecine classique et la médecine complémentaire, souhaitée depuis longtemps par les patients, devient enfin possible ».
En France, le ministère de la santé et des sports a publié le 3 février dernier un arrêté créant un « groupe d’appui technique sur les pratiques non conventionnelles à visée thérapeutique ». Placé auprès du directeur général de la santé, ce GAT doit l’aider à concevoir, mettre en œuvre et suivre « la politique de lutte contre les pratiques non conventionnelles à visée thérapeutique dangereuses, et de repérage des pratiques prometteuses ».
On pourrait se réjouir qu’enfin les autorités se penchent sérieusement sur la question. Mais on peut craindre aussi que l’approche soit essentiellement répressive et “sécuritaire”. Dans notre pays, diverses institutions et associations ont l´habitude de réprimer globalement les médecines non-conventionnelles : Conseil de l’ordre des médecins, Académie de médecine, Miviludes, Unadfi, etc. Elles seules sont représentées au sein de ce GAT...
La différence d´approche entre les deux pays est pleine de sens...
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