Fin de vie : les familles qui s’empoignent…
Le rapport du Professeur Didier Sicard remis au Président de la république le 18 décembre a établi que la loi Léonetti ne permettait pas de répondre aux situations et aux préoccupations exprimées par les personnes atteintes de maladies graves et incurables, de leurs familles et des personnels soignants. Il a saisi le Comité consultatif national d’Ethique pour qu’il se prononce à ce sujet. Un projet de loi devrait en découler … pour un calendrier indéterminé à ce jour.
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L’histoire de Vincent Lambert, 37 ans, victime d’un accident de la route en 2008 et des démêlés judiciaires entres les différents membres de sa famille, mais aussi l’hôpital de Reims sont exemplaires. Cela souligne d’autant plus cruellement la nécessité de prendre à bras le corps ce sujet. Alors que l’hôpital avait pris avec son épouse la décision d’arrêter l’alimentation et l’hydratation normale, le juge des référés, saisi par les parents a enjoint ce samedi 11 mai l’hôpital de rétablir celles-ci.
Le juge reproche à la direction de l’hôpital de ne pas avoir consulté les parents de Vincent sur cette décision. Vincent a été dans un coma profond, puis à partir de 2011 dans un coma dit « pauci-relationnel ». A savoir un état qualifié de végétatif chronique, avec, selon les médecins peu de chances de s’améliorer. Le patient bouge les yeux, ressent la douleur, mais il est dans l’impossibilité de communiquer.
Vincent avait fait savoir, avant son accident, qu’il refusait tout maintien en vie artificielle en cas de problème. C’est sur cette base que sa femme et l’un de ses frères ont donné leur feux vert aux personnels soignants de l’hôpital de Reims pour tout arrêter. Mais les parents, non consultés avec deux de leurs enfants ont saisi la justice pour contester cette mesure.
Le docteur Eric Kariger, directeur de l’unité de médecine palliative au centre hospitalier universitaire de Reims a déclaré : « A l'issue d'une procédure collégiale de réflexion, l'arrêt de son seul traitement, l'alimentation artificielle, a été décidé. Cette décision n'a pas été prise à la légère. L'intention n'était pas de faire mourir Vincent mais de considérer que ses soins étaient devenus déraisonnables." Avec seul contact permanent, celui de l’épouse, l’équipe s’en est remis à elle pour la prise de décision. Le docteur Kariger reconnait leur erreur : « "Très tôt, nous avons vu que la mère de Vincent ne pourrait accepter une décision d'arrêt de soins. Mais nous avons failli dans l'accompagnement d'une famille très compliquée. Nous aurions dû contacter les parents. ».
Situation embarrassante pour tous et douloureuse. La famille est déchirée, d’un côté les parents et de l’autre côté, l’épouse soutenue par trois demi frères, une sœur et un neveu. Pour Joseph, le frère de Vincent il : « a l'impression que la volonté de son frère a est piétinée au nom de valeurs qui ne sont pas les siennes", il parle "d'instrumentalisation" à propos de la démarche de sa mère, membre de la Fraternité Saint-Pie X, un mouvement catholique intégriste. A ceci, la mère de Vincent répond : « On n'a pas besoin d'avoir des convictions religieuses pour défendre ses enfants ».
C’est donc une famille déchirée autour du lit d’agonie d’un homme qui avait clairement manifesté sa position sur le sujet, les uns et les autres sont meurtris et la justice, est démunie pour y faire face.
Aujourd’hui, les choses ne font qu’empirer, la mère de Vincent considérant que l’équipe médicale a failli, demande le transfert de son fils dans un autre service de son choix. De son côté l’épouse, soutenue par une partie de la famille affirme s’y opposer avec force.
L’équipe du docteur Kariger subit aussi le traumatisme de cette bataille judiciaire autour d’un mourant. Il a déclaré :"Je ne suis pas propriétaire du malade, mais mon devoir moral, à part si une décision est imposée, est de continuer à accompagner Vincent. Un changement de structure serait une grave erreur, le patient étant habitué aux voix et à l'ambiance du service".
L’apaisement est encore loin…Marie, la sœur de Vincent a le dernier mot : « J’aimerai que justice et médecine s'entendent pour laisser Vincent partir, malgré la souffrance qu'on peut avoir à se séparer de lui.".
Oui vraiment il y a nécessité à trouver une solution législative adaptée.
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