Maladies rares et génies rares
L’un était Français, l’autre est Anglais. Ils ont en commun d’exceller dans leurs domaines et de posséder un charisme extraordinaire qui en a fait des stars internationales. Michel Petrucciani était atteint d’ostéogenèse imparfaite. Il en est mort. Stephen Hawking souffre de sclérose latérale amyotrophique (SLA) dite aussi « maladie de Charcot ». Il survit encore à l’aide d’un dispositif impressionnant.
Stephen Hawking est tellement célèbre qu’il est popularisé sous forme de personnage de fiction. Ainsi apparaît-il dans plusieurs épisodes des Simpson, dans un épisode de la deuxième saison de Futurama du même auteur, Matt Goening, dans un épisode de la série Dilbert, bande dessinée de Scott Adams. Hawking, ce génie de la science, incarne aussi son propre rôle dans un épisode de la série Star Trek où on le voit jouer une partie de poker avec Isaac Newton et Albert Einstein. Einstein auquel ses admirateurs le comparent non sans quelques raisons. Malgré le mal terrible qui lui a été diagnostiqué à l’âge de 21 ans, Hawking ne se départit pas d’un sens de l’autodérision et de l’humour. Il ne renie pas la réplique que donne son personnage dans le dessin animé Les Simpson : "Votre théorie d’une univers en forme de beignet est intéressante, Homer, je vais vous la piquer." A côté de son ordinateur trône un porte-clé des Simpsons et cette tirade "Oui, JE SUIS le Centre de l’Univers" .
L’oeuvre scientifique du physicien est gigantesque et ambitieuse. Elle vise à répondre à des questions fondamentales comme "quelle est la nature du temps ?" En vulgarisant son travail, il a permis à son livre Une brève histoire du temps de devenir un best-seller de la littérature scientifique. Il étudie aussi les fameux trous noirs de l’Univers et la Théorie du Tout. En 2001, paraît son deuxième ouvrage, L’Univers dans une coquille de noix, qui vulgarise ses autres recherches, entre autres sur la théorie quantique et où il s’interroge sur la possibilité de voyager dans le temps et sur l’existence d’univers multiples.
Découvrez l’univers de Stephen Hawking.
Michel Petrucciani a été le premier pianiste européen à avoir enregistré pour le prestigieux label "Blue Note" aux Etats-Unis. A sa mort, en janvier 1999, la quasi-totalité de la classe politique lui rendit hommage voyant en lui le "plus célèbre pianiste de jazz français". Avec les violonistes Ponty et Grappelli, Petrucciani dit "Pétruche" aura été le seul musicien de jazz français à s’imposer aux Etats-Unis, patrie de ce genre musical. Le jazzman n’avait pas la grosse tête ; il déclara à Bertrand Dicale du Figaro : "Je suis un vrai voleur, tout le monde m’a influencé". Trop simple pour ce virtuose de s’en tirer par ce trait de modestie. Certes influencé par Bill Evans, Herbie Hancock, Keith Jarret, Duke Ellington, Michel Petrucciani a su développer sa touche personnelle qui a conquis un large public. Aujourd’hui, il fait partie de nos légendes hexagonales du jazz, auprès de Stéphane Grappelli et de Django Reinhardt.
Une interview de Michel Petrucciani dans Jazz Magazine.
Rien n’était gagné au départ pour ces deux personnages hors du commun. S’ils ont bénéficié de contextes familiaux et sociaux favorables, leur maladie hypothéquait par avance leurs chances d’une vie et d’une carrière normales.
Côté chance, le père de Stephen Hawking était biologiste et le goût du jeune Stephen pour les sciences physiques lui permettra de suivre les cours à l’université d’Oxford, à l’aide d’une bourse d’études qu’il put décrocher par son travail et son intelligence. Le père de Michel Petrucciani, lui, était un guitariste renommé. Il fut le professeur de musique de son fils et a même collaboré à plusieurs de ses albums.
Côté malchance : Stephen Hawking commence à ressentir un certain handicap physique durant sa dernière année à Oxford, lorsqu’il rentra chez ses parents pour célébrer la Noël de 1962. Des analyses permettront d’annoncer la terrible nouvelle un mois plus tard d’une sclérose latérale amyotrophique ou SLA, aussi connue aux Etats-Unis sous le nom de maladie de Lou Gehrig, et portant l’autre nom en Europe de maladie de Charcot. Quant à Michel Petrucciani, il était atteint à la naissance d’ostéogenèse imparfaite qui se caractérise par une fragilité osseuse excessive, donc par des fractures à répétition entraînant de multiples hospitalisations et séances de rééducation, et des anomalies de la dentition. Et souvent aussi une perte de l’audition, ce qui est fort gênant pour un musicien. Autre handicap : la personne atteinte de ce mal est de très petite taille.
Le physicien Stephen Hawking survit grâce aux vitamines, à l’assistance de dix infirmières, et à un appareillage très sophistiqué qui lui permet de communiquer : une interface appelée le "Clicker" qui lui permet de sélectionner des lettres et des mots sur un clavier et de les afficher sur l’écran de son ordinateur. Hawking parvient même à enseigner et à faire des conférences ! Michel Petrucciani, lui, a disparu en 1999, emporté par la maladie et les efforts surhumains qu’il a dû déployer dans une série de concerts très éprouvants.
Ces deux exemples nous montrent bien sûr que la volonté individuelle de se dépasser et la capacité à s’adapter sont un ressort puissant de lutte contre l’adversité et parfois de réussite exceptionnelle. Mais ils témoignent surtout en faveur de la lutte quotidienne de toutes les personnes qui vivent avec ces maladies rares handicapantes et mortelles et qui apportent une richesse à l’humanité. Ils plaident aussi pour une recherche sans relâche des solutions et des remèdes.
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