« Médecin malgré moi », le livre de Patrick de Funès

Médecin malgré moi de Patrick de Funès (Éd. Le Cherche Midi) est une satire enlevée du monde médical et une galerie de portraits qui fait rire et qui fait peur. C’est une charge au grand galop sabre au clair. Le sang coule car le sabreur est courageux. Il ne se ménage pas lui-même et ose s’attaquer à forte partie : les confrères malchanceux de ne pas voir leur ridicule et leurs travers, le Conseil de l’Ordre qui a souvent du mal à gérer son désordre, la politique de santé et sa dérive tous cancéreux.
C’est une suite de scènes cocasses, de dialogues enlevés, de portraits au vitriol, de réflexions profondes. Le mélange est très réussi. Il peut faire réfléchir. Il donne du monde médical une image peu flatteuse qui rappelle Blouse de Sénanque, un livre tout aussi iconoclaste, mais qui ne fait pas rire comme celui-là.
Patrick de Funès est bien le fils de son père, mais n’est pas un fils à papa.
Il a une verve peu commune qui fait plaisir à lire. Son premier chapitre "Un syndrome redoutable" est un vrai bijou : « Subir la décrépitude de l’âge ne m’inquiète pas trop, mais l’idée de tourner au vieux con me terrorise »… quelques lignes plus tard, suit l’exécution capitale de Jean Bernard. Je cite, pour vous mettre en appétit : « Sa réputation frisait la sainteté, comme c’est souvent le cas chez les médecins qui ne diagnostiquent que des maladies incurables ». 37 chapitres du même acabit décrient avec humour noir et bonheur une profession qui mérite cet éreintage. Mais ne nous trompons pas : la vraie cible c’est la société qui a ce qu’elle mérite.
Son livre révulsera les biens-pensants, les anti-Desproges, ceux qui se prosternent devant les idoles médiatiques. Il faudrait qu’ils enlèvent leurs œillères pour voir qu’il n’attaque que les médicastres, les Morticoles et les serviteurs d’une médecine qu’ils déshonorent.
Patrick de Funès n’aurait pas pu écrire le livre s’il n’avait été qu’un pince-sans-rire, un railleur, un critique acerbe, désabusé, dégoûté. Ce livre n’a pu être écrit, et sur ce ton, que par un humaniste, un plus que sensible qui ne s’accommode pas du mépris ordinaire, de l’inhumanité d’un milieu trop souvent hypocrite, indifférent et qui la dissimule en affectant de grands sentiments. Son rire, ses griffes masquent un grand cœur.
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