Poison d’Avril
Augustin Trapenard, le chroniqueur bien connu de France Inter a changé son fusil d’épaule, et depuis quelques jours, il sélectionne des lettres d’auteurs qu’il lit à l’antenne.
Celle du 30 mars était d’Annie Ernaux, et elle est magistrale.
Pastichant « le déserteur » célèbre chanson de Boris Vian, elle s’est adressée au Président de la République, et sa lettre, cruelle à souhait, mérite le détour. lien
Rappelant la date de création de la célèbre chanson, 1954, entre la guerre d’Indochine et celle d’Algérie, elle écrit :
« Aujourd’hui, quoique vous le proclamiez, nous ne sommes pas en guerre, l’ennemi ici n’est pas humain, pas notre semblable, il n’a ni pensée, ni volonté de nuire, ignore les frontières et les différences sociales, se reproduit à l’aveugle en sautant d’un individu à l’autre.
Les armes, puisque vous tenez à ce lexique guerrier, ce sont les lits d’hôpital, les respirateurs, les masques et les tests, c’est le nombre de médecins, de scientifiques, de soignants.
Or depuis que vous dirigez la France, vous êtes resté sourd aux cris d’alarme du monde de la santé, et ce qu’on pouvait lire sur la banderole d’une manif en novembre dernier « l’état compte ses sous, on comptera les morts » résonne tragiquement aujourd’hui.
Mais vous avez préféré écouter ceux qui prônent le désengagement de l’état, préconisant l’optimisation des ressources, la régulation des flux, tout ce jargon technocratique dépourvu de chair, qui noie le poisson de la réalité.
Mais regardez, ce sont les services publics qui, en ce moment, assurent majoritairement le fonctionnement du pays : les hôpitaux, l’éducation nationale, et ces milliers de professeurs, d’instituteurs, si mal pays, EDF, la Poste, le métro et la SNCF. Et ceux don, naguère, vous aviez dit qu’ils n’étaient rien, sont maintenant tout, eux qui continuent de vider les poubelles, de taper les produits aux caisses, de livrer des pizzas, de garantir cette vie aussi indispensable que l’intellectuelle, la vie matérielle.
Choix étrange que le mot « résilience » signifiant reconstruction après un traumatisme. Mais nous n’en sommes pas là.
Prenez garde, Monsieur le Président, aux effets de ce temps de confinement, de bouleversement du cours des choses. C’est un temps propice aux remises en cause. Un Temps pour désirer un nouveau monde. Pas le vôtre !
Pas celui où les décideurs et financiers reprennent déjà sans pudeur l’antienne du « travailler plus », jusqu’à 60 heures par semaine.
Nous sommes nombreux à ne plus vouloir d’un monde dont l’épidémie révèle les inégalités criantes, nombreux à vouloir au contraire un monde où les besoins essentiels, se nourrir sainement, se soigner, se loger, s’éduquer, se cultiver, soient garantis à tous, un monde dont les solidarités actuelles montrent, justement, la possibilité.
Sachez, Monsieur le Président, que nous ne laisserons plus nous voler notre vie, nous n’avons plus qu’elle, et « rien ne vaut la vie », chanson, encore, d’Alain Souchon. Ni bâillonner durablement nos libertés démocratiques, aujourd’hui restreintes, liberté qui permet à ma lettre, contrairement à celle de Boris Vian, interdite de radio, d’être lue ce matin sur les ondes d’une radio nationale ».
Cette lettre pose de vraies questions...le gouvernement a-t-il déjà tiré des leçons de cette pandémie ?
Rien n’est moins sûr, puisque nous constatons qu’au lieu de rétablir l’ISF, afin de permettre à l’état de répondre aux exigences financières nécessaires pour répondre à la situation actuelle, et préparer la sortie de crise, Gérard Darmanin a préféré faire appel à la générosité des citoyens.
Il a en effet lancé une plateforme de dons en ligne pour que « les particuliers ou entreprises apportent leur contribution à l’effort de solidarité de la nation envers les plus touchés ». lien
Maxime Combes, un internaute, évoque avec lucidité, dans les colonnes de son blog chez médiapart, un « téléthon de la honte ». lien
Quant au chef de l’état, il continue de serrer des mains, et en bon communiquant, soucieux de montrer son « efficacité », il vient de visiter un fabricant de masques, à Saint Barthélémy d’Anjou, en Maine et Loire, espérant masquer la carence de son propre gouvernement, devant l’impatience justifiée de tous ceux qui, en première ligne, réclament, en vain pour l’instant, des équipements de protection pour tous.
Ce n’est pas inutile d’écouter le coup de gueule de la philosophe Cynthia Fleury, qui, chez Arte, brosse un tableau clair de la situation. lien
Au sujet des masques, c’est d’autant plus incompréhensible que cette usine visitée par Macron en produit des millions chaque semaine, s’il faut en croire Gérard Heuliez, directeur général de Kolmi-Hopen.
En effet, elle en fabrique 1 million par jour depuis 5 semaines, soit 30 millions depuis cette date, et on est en droit de se demander ce qu’ils deviennent ? lien
D’autant qu’il y a dans notre pays au moins 2 autres entreprises qui en fabriquent...alors qu’un pont aérien a été mis en place entre la France et la Chine, avec comme objectif la fourniture d’un milliard de masques.
Quant à l’entreprise Valmy, elle assure en produire 30 000 en 8h...avec des machines qui tournent 140h par semaine...lien
Une vraie confusion existe, puisqu’on se souvient que le 27 février le gouvernement avait affirmé en avoir commandé 200 millions.
C’était il y a plus d’un mois...et ce n’est pas un poisson d’avril.
D’autres vont un peu plus loin et ont lancé l’opération « chloroquine pour vivre »... ce qui ne va pas plaire au couple Buzyn/Lévy... et encore moins à Macron, son 1er ministre, et son ministre de la santé. lien
On pourrait en sourire si on ne découvrait pas qu’une entreprise française, « Famar Lyon », unique productrice de la chloroquine (nivaquine), devrait mettre bientôt la clef sous la porte. Lien
Finalement on se demande pourquoi notre pays n’a pas pris exemple sur ceux qui réussissent mieux face à la pandémie... la Corée du Sud, comme on le sait...mais aussi l’Allemagne.
En effet, suite à ces multiples hésitations, tergiversation, l’unité nationale voulue par le chef de l’état, est en train de s’effriter tout doucement, preuve en est que, selon l’institut YouGov, 59% des personnes interrogées les 26 et 27 mars jugent que le gouvernement gère mal l’épidémie. lien
Il lui est surtout reproché de n’avoir pas suivi la stratégie du dépistage massif prônée par l’OMS, à l’exemple de la Corée du Sud, et de l’Allemagne, laquelle réalise entre 300 000 et 500 000 tests par semaine...alors qu’en même temps le ministre français de la santé promet d’augmenter les capacités de test jusqu’à 100 000....en juin.
Et ces recommandations de l’OMS datent du 28 février, suivant l’avis de ses experts épidémiologistes, revenus tout juste de Chine, constatant que le principe des tests massifs était bien plus efficace que le confinement des populations. lien
Résultat, en Allemagne, le laboratoire CNN estime avoir déjà produit, fin février, 4 millions de tests, et en produit hebdomadairement 1,5 million. lien
Cette carence française est expliquée par Michel Bendahan, un biologiste qui dirige un laboratoire, qui a déclaré dans les colonnes de « l’opinion » : « on est totalement incapables de tester à très grande échelle parce qu’il n’y a pas d’industrie de biologie moléculaire en France ». lien
Et pire, ce n’est que le 7 mars que le gouvernement a pris un décret autorisant les laboratoires privés à réaliser des tests de dépistage...lien
De plus, alors que le laboratoire Roche possède un « cheptel » de 900 machines qui sont en service dans le monde, la France n’en aligne que 12...lien
A se demander si nos énarques ont appris dans les grandes institutions autre chose que le maniement de la langue de bois ?
Quant au Professeur Raoult, il est fier du sens civique des citoyens qui viennent consulter.
Il a présenté tous les membres de son équipe scientifique impressionnante, et fait un bilan globalement positif.
Encouragé par le soutien populaire qu’ils reçoivent, il explique qu’ils ont testé 50 000 personnes, détectant 2400 patients infectés, traités comme il se doit à la chloroquine, et n’ont eu à déplorer qu’un seul décès, un homme de 84 ans... vidéo.
Comme dit mon vieil ami africain : « si le poisson pleure, ses larmes sont emportées par l’eau »...
L’image illustrant l’article vient de officierunjour
Merci aux internautes de leur aide précieuse
Olivier Cabanel
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