Un pas vers un nouveau traitement de la dépression
Le cerveau, cet inconnu. Comment un agencement d’atomes, semblables à ceux qui constituent un arbre, un rein, un chaton ou l’ordinateur sur lequel j’écris ces lignes, peut être capable de réfléchir, de retenir des informations ou d’avoir des émotions ? Vaste question. Comme souvent en la matière, c’est en étudiant les dysfonctionnements de la machine que l’on appréhende ses rouages.
Cet agencement d’atomes induit, chez 121 millions de personnes dans le monde, une maladie qui se caractérise par “une perte d’intérêt et de plaisir, des sentiments de culpabilité, une perte de l’estime de soi, un sommeil perturbé, une baisse de la forme et de la concentration”. C’est ainsi que l’Organisation mondiale de la santé décrit la dépression.
Des chercheurs de l’Ecole polytechnique de Lausanne, en Suisse, se sont intéressés à une protéine sise dans l’hippocampe, la MIF pour macrophage migration inhibitory factor. Selon leurs recherches publiées dans la revue Molecular psychiatry, l’inhibition de cette protéine provoque “une augmentation des états anxieux et dépressifs”.
Contrairement à ce qui est souvent dit et écrit, les neurones se renouvellent en partie, notamment au sein de l’hippocampe. On parle de neurogénèse. De précédentes recherches avaient prouvé qu’il existait un lien entre la neurogénèse et les états dépressifs. Les scientifiques de le Lausanne ont montré “pour la première fois” que la MIF était présente en quantité dans les cellules souches de l’hippocampe et qu’il existait un lien entre cette protéine et la neurogénèse.
Pour le prouver, les chercheurs ont fait subir une série de tests à des rats génétiquement ou chimiquement modifiés pour ne pas produire la protéine MIF. Chez les rongeurs étudiés, l’absence de cette protéine a induit un ralentissement de la production de nouveaux neurones et donc une augmentation de l’anxiété et des comportements dépressifs. [Comment reconnaît-on un rat dépressif ? La question fera l’objet d’un prochain article sur ce blog… Pour faire simple, rapide et succinct, les rongeurs réagissent différemment aux situations de stress.]
Mieux, ces recherches ont montré que ces rats mutants réagissaient moins bien aux anti-dépresseurs, en l’occurrence de la fluoxétine, plus connue sous le nom de Prozac. En l’absence de la protéine MIF, les molécules de fluoxétine ont plus de mal à relancer le processus de création de nouveaux neurones.
Loin d’être uniquement théoriques, ces résultats pourraient apporter, à terme, des bénéfices sur les traitements de la dépression, comme le notent les chercheurs en conclusion de leur compte-rendu :
“Cette découverte indique que le MIF est potentiellement significative pour le traitement des déficits de la génèse de neurones, ainsi que pour les problèmes liés à l’anxiété, à la dépression ou à la cognition”.
Dessin : btting
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