Analyse libérale de la crise Baby Loup
Il n'est pas besoin de connaître l'issue du jugement pour analyser ce conflit qui est tout à fait caractéristique de l'inextricable complexité de la société ultra dirigiste dans laquelle nous vivons.
Les dirigistes, de droite ou de gauche, communautaristes ou anticommunautaristes ont bâti une société de contraintes et d'obligations qui rend insolubles des problèmes qui n'existeraient tout simplement pas dans une société plus libérale.
Pourquoi le licenciement de cette employée indésirable pose t-il problème ? Parce que le code du travail imaginé par les dirigistes interdit de licencier sans raison "valable", étant entendu qu'une raison n'est valable que si elle est prévue par la Loi. Un chef d'entreprise, en l’occurrence la directrice d'une crèche ne peut donc pas décider unilatéralement de se séparer d'une personne qui ne lui convient pas, par exemple une personne voilée, parce que le cas : la-personne-est-voilée n'est pas expressément décrit par le code du travail.
Il est évident que s'il était possible pour une entreprise de se séparer librement d'un salarié comme il est possible pour un salarié de quitter une entreprise, le problème n'existerait pas. Les crèches emploierait très majoritairement du personnel non voilé, tandis que quelques crèches "communautaires" emploieraient du personnel voilé et que quelques crèches "mixtes" tenteraient d'établir un équilibre entre du personnel affichant des signes religieux ostentatoires et du personnel "neutre".
Mais subsiste un autre problème posé par le dirigisme, problème qui est d'ailleurs à l'origine de la "crise baby Loup", c'est le mode de financement des crèches.
Les acteurs publics (caisse d'allocations familiales et collectivités locales) sont en effet prépondérants dans le financement de ces organismes alors que les versements des familles contribuent à moins du tiers de leurs besoins. La dépense étant majoritairement publique, l'Etat et les collectivités locales veulent naturellement "piloter" l'orientation de ces établissements. La question de l'interdiction des signes religieux au nom de la laïcité, ou de leur autorisation au nom de la liberté de culte, devient donc une affaire d’État, de Conseil généraux ou de Mairies.
Un autre dommage collatéral provoqué par cette "gratuité" aux deux tiers, est l'impossibilité pour des crèches strictement privées de s'établir. Leur cotisation, basée sur les coûts réels, serait en effet prohibitive par rapport à celle des crèches "aidées". Les crèches issues d'initiatives de la société civile sont donc obligées de quémander des aides aux pouvoirs publics, ce qui signifie qu'elles en sont dépendantes.
Si les crèches étaient strictement régies par la société civile, elle seraient soucieuses d'offrir le meilleur service aux parents et aux enfants. Les parents indisposés par la présence de puéricultrices voilées seraient libres de choisir d'autres crèches, voire de se regrouper en association pour monter des structures correspondant à leurs souhaits. Mais les crèches étant placées sous la responsabilité "morale" des pouvoirs publics ceux ci se déchirent, victimes de leur propre dirigisme. Il leur faut trancher en bafouant, soit la liberté religieuse, soit la laïcité.
La décision qui sera rendue le 13 décembre sera donc obligatoirement une atteinte à l'un de ces deux grands principes.
Notre propos n'est pas ici de disserter sur le bien fondé du droit du travail ou du monopole éducatif instaurés par l'Etat providence. Nous voulons seulement montrer à travers l'exemple de la crèche Baby Loup que l'Etat dirigiste et sa justice sont mécaniquement amenés à bafouer les lois et les principes qu'ils ont eux-mêmes fabriqués.
Le dirigisme ne connait pas de limite. Il doit toujours produire de nouvelles contraintes liberticides pour tenter de réparer les dégâts dont il est responsable. La proposition surréaliste de Manuel Valls d'interdire le port de signes religieux distinctifs là où il y a des enfants (sic) en est une triste illustration. Et comble de tout, l'Etat liberticide essaye toujours de se faire passer pour celui qui solutionne les problèmes et qui agit pour le bien commun.
En dépit d'une réglementation pléthorique, l'emploi et l'éducation ne se portent pas bien, les prisons débordent, la société va mal et l'Etat providence est en faillite. Le dirigisme absurde, tel que l'interdiction de se couvrir le visage dans la rue ou de se réunir dans des halls d'immeubles, en est la conséquence directe.
Pendant combien de temps le peuple de gauche se laissera t-il abuser par cette justification "sociale" du dirigisme ? Quand se rendra t-il compte que l'absolutisme social produit les mêmes dégâts que le tribal, le féodal, ou le royal ?
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