Au nom de Dieu ...
Au nom de Dieu ….
Le débat sur l’existence de Dieu (Dieu existe / Dieu n’existe pas) est l’exemple même du faux débat. C’est pour cela qu’il peut être éternel. En effet, …
On pourrait dire que ceux qui disent que Dieu n’existe pas se trompent : Dieu existe bel et bien dans les croyances. Des peintres et des sculpteurs ont matérialisé la croyance en imaginant (dans certaines religions) une représentation matérielle du ou des dieux.
Mais on pourrait dire à ceux qui croient que Dieu existe (ou que tel individu serait lui même un dieu) qu’ils se trompent tout autant : puisque que pour que Dieu existe, il faut qu’ils y croient. En dehors de leur croyance, il n’y a pas de dieu.
Qu’un croyant renonce à sa croyance, il n’y a plus de croyant et l’objet de la croyance (Dieu) disparaît. (Comme le Père Noêl disparaît quand les enfants n’y croient plus).
Conclusion(s) ?
Que les êtres humains croient ou pas, n’aurait été qu’un sujet d’investigation pour les psychologues ou les psychiatres et autres chercheurs de la même famille, si des illuminés n’avaient prétendu (au cours des âges) être les confidents de Dieu et si des malins (ayant réussi à faire accepter leur influence) n’avaient bâti un corps de règles à respecter, censées être la traduction de la volonté de Dieu. Ce qui fait que la croyance a pu paradoxalement prendre une consistance matérielle à travers des récits, des dissertations, des pratiques et des comportements imposés, allant selon les époques, les lieux, les eglises et les sectes, de la charité à l’assassinat … Toujours au titre de la croyance..
Et les malins, de contrôler à partir de l’irrationel des individus, la vie concrète de chacun (manière de s’habiller, de manger, de vivre en couple et aussi parfois… sens du vote dans les élections), et d’en vivre (salaires, dons, legs des fidèles). Individus par ailleurs « enrolés » d’office (par la simple filiation ou la décision des parents à la naissance) - et fidélisés tant par la promesse de récompense (bonheur dans l’au-delà) que par la menace (de l’enfer), parfois celle de mourir prématurément (peine de mort pour les blasphémateurs et les apostats).
Les détenteurs du pouvoir économique ont toujours été attentifs à ce phénomène de contrôle et de soumission des individus par la croyance et par les dérivés de cette dernière. Et ont fait en sorte que le pouvoir politique (qu’ils ont toujours inspiré et contrôlé, sauf quelques rares parenthèses) fasse alliance avec le pouvoir religieux dans leur intérêt. On se rappelle à cet égard que l’on promettait aux malheureux sur terre le bonheur dans l’au delà ; et que la charité religieuse soulageait les misères les plus noires dont les victimes se contentaient. Le tout incitait les victimes du système à supporter et à accepter (sans qu'il y ait besoin d'user de la force à leur encontre) le sort que la constitution des fortunes leur réservait. Ce qui n’a guère changé, si l’on en juge par les « restaurants du cœur » et autres banques alimentaires qui se sont développés parallèlement à la mise en œuvre des préceptes de Milton Friedman.
Ici et là, les détenteurs du pouvoir politique ont essayé (rarement) de s’en prendre à l’emprise des religieux sur les individus.
Les Républicains de la III° République qui -soit dit en un raccourci- ont confié l’Etat à la bourgeoisie d’affaires, s’en sont pris aux instruments que l’Eglise utilisait pour défendre la monarchie qui n’était plus fiable pour diriger l’Etat. Les Républicains ont voté des lois pour réduire le terrain de manoeuvre de l’Eglise. Entre autres, la loi de 1901 sur les associations, qui soumettait les congrégations à autorisation préalable (pour qu’elle soit refusée une fois demandée). Car le réseau d’écoles prestigieuses, qui formait l’élite française aux idées anti républicaines appartenait à l’Eglise (celles les Jésuites via les congrégations). Mais les Républicains ont eu la sagesse de ne pas essayer d’éradiquer la croyance, ni d’anéantir l’Eglise et la religion.
Les révolutionnaires Russes de 1917, s’en sont pris, eux, à la croyance (gérée par l’Eglise orthodoxe qui n’a pas choisi le « bon » camp) : ils ont fait fausse route et ils ont (nécessairement) perdu.
Essayer d’éradiquer cette « composante » de l’être humain (son besoin de croire) est aussi vain que de prétendre lui faire passer l’envie d’avoir des relations sexuelles, de s’enrichir, de n’avoir aucune tentation de dominer l’autre, de boire, de manger, de tourner la loi ou d’oublier les principes pour se procurer un avantage, … ( A cet égard, ceux qui se donnent comme objectif de « travailler à l’amélioration du genre humain » ne sont pas prêts d’aboutir. Et ceux qui ont imagioné des réformes, voire ont fait une une révolution, en croyant que ceux qui les mettront en œuvre seront des êtres théoriques et parfaits, en ont été « pour leurs frais », généralement assez vite).
Les problèmes que l’on rencontre aujourd’hui avec la revendication des religieux, (ceux qui font pression pour que les institutions de la République acceptent de reconnaître les règles qu’ils ont imaginées, ou qu’elles ne s’y opposent pas) qui plus est dans un contexte de développement du concept d’une société éclatée entre communautés (au sein d’un Etat abandonnant progressivement ses pouvoirs traditionnels), paraissent être de plus en plus nombreux.
Bien sûr, parce que les revendications des religieux ne trouvent pas de résistance de la part des institutions de la République.
Mais aussi parce que les religieux ont l’astuce de partir de leur corps de doctrine, en occultant le fait que leur doctrine exploite une croyance, et que sans cette croyance l’objet de leur doctrine (Dieu) et le fondement de leur rôle n’existent pas. Ils occultent aussi que ce qu’ils racontent est, en dernière analyse, une simple œuvre de l’esprit (souvent composée de strates qui se sont empilées au gré des aléas de l’histoire).
Ce qui fait que les interlocuteurs des religieux sont piégés, car englués dans le phénomène (observable) de la croyance (croyance créant Dieu). Et qui se résolvent à donner une forme de légitimité à ce que les religieux disent, régissent et revendiquent à partir de cette dernière. Pas en bloc, mais progressivement.
Les textes qui ont été pris a posteriori, ou qu’on veut prendre, comme autant de combats d’arrière garde, les décisions de justice, les déclarations d’hommes politiques, révèlent le déroulement du processus.
Et ça marche.
Ca marche d’autant mieux que les politques savent que leur carrière peut dépendre de leur empathie à l’égard des représentants des religions anciennes. Et, s’agissant des religieux qui sont les plus revendicatifs (en ce moment, certains Wahhabites), les hommes politiques contemporains, au lieu de leur faire couper les vivres (comme les Républicains d’après 1870 l’ont fait aux Catholiques) font des affaires avec ceux qui les financent.
Ce qui fait qu’au delà des discours (sélectifs) des hommes politiques en mal de ré élection, l’utilisation de Dieu a de beaux jours devant elle … Autre forme de vie éternelle ?
Marcel-M. MONIN
M. conf. hon. des universités
docteur d’Etat en droit
Consultant (rédaction de constitutions, codification du droit administratif, modernisation des universités)
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