Dès trois ans, dès
qu’il sait interpréter les situations, l’enfant possède un sens
moral facile à mettre en évidence dans des tests. Ce n’est pas
étonnant car certains animaux ont aussi ce sens moral qui doit être
essentiel à la survie du groupe.
Quand il fait
quelque chose qu’il sait être mal, il trouve normal au fond de
lui-même d’être sanctionné. C’est pourquoi il cherchera très vite
à cacher son méfait.
Quand il fait
quelque chose qu’il sait être bien, il attend une récompense, à
tout le moins une approbation. L’adulte doit systématiquement
répondre à cette attente de sanction ou d’approbation car il est
une balise morale sur laquelle l’enfant se repère.
Bien entendu,
l’adulte ne doit jamais faire quelque chose que l’enfant sait être
mal, devant lui !
Reste le cas
fréquent où le jeune enfant ne sait pas si, en telle ou telle
circonstance, telle action, telle parole, tel comportement est bien
ou mal.
S’il fait mal dans
ce cas, il ne doit pas être sanctionné, même si le résultat est
catastrophique. S’il est sincère en disant : « Je ne l’ai pas fait
exprès ! », il doit être pardonné et si une explication est
nécessaire pour lui dire que ce qu’il a fait est mal, elle doit être
donnée tout de suite.
Avec le sens moral,
se développe le sentiment de justice-injustice. L’enfant n’est pas
seulement acteur moral, il est aussi spectateur. Et le spectacle de
l’injustice sera très perturbateur surtout si cette injustice est
systématique.
Ce sentiment
d’injustice s’éveillera si un autre enfant n’est pas sanctionné
pour une faute qui lui vaudrait, à lui, une punition. C’est à
l’adulte de bien veiller à un traitement équitable entre les
enfants qu’il (elle) contrôle.
La sanction doit
être différente selon l’âge : plus l’enfant est jeune, plus elle
doit être immédiate. Il est absurde de le condamner à être privé
de dessert lors d’un repas qui aura lieu dans trois heures !
Car alors, son
sentiment de culpabilité qui, au fond de lui, justifie la punition,
se sera dissipé et la punition trop différée sera vécue comme un
sorte d’injustice, au moins comme un manque d’affection de la part de
l’adulte capable de rester si longtemps inflexible.
Dans ce cas d’enfant
très jeune et en l’absence d’une autre possibilité de punition
immédiate, quelques tapes sur les fesses (jamais de gifles) peuvent
être la seule solution.
Bien entendu avec un
enfant plus grand, qui peut comprendre qu’une sanction soit différée,
les coups sont à proscrire. Ils sont contre-productifs car si la
douleur est vite effacée, le ressentiment, la douleur morale
persisteront longtemps dans le souvenir, le plus souvent jusqu’à
l’âge adulte, ce qui est disproportionné.
La punition doit
consister à lui faire subir un désagrément. Dans certains cas se
moquer de lui, le faire huer par les témoins de sa faute, est
souvent la plus forte sanction qu’on puisse appliquer (parfois trop
forte, il faut être prudent). Autrement, il y a tout le domaine des
privations de ce qui lui fait plaisir.
Il faut se garder de
crier quand on fait des reproches car c’est vécu comme un sentiment
de l’impuissance de l’adulte.
Avec des adolescents
de plus de quinze ans, qui ont déjà développé une personnalité
marquée, et dont les valeurs morales, au sens kantien du mot, ne
sont pas les mêmes que celles des parents, ceux-ci avant de
sanctionner, doivent estimer si leur enfant a mal agi selon son
système moral à lui et non au leur.
Étant entendu que
faire à autrui ce qu’on ne voudrait pas subir d’autrui est forcément
mal, même si l’adolescent dit le contraire.