Bel Ami ?

On ne choisit pas sa famille, on choisit ses amis.
Encore convient il de les choisir judicieusement.

« Ami », que voilà un mot galvaudé tel qu’il est utilisé bien souvent sans aucun sens commun.
Je m’étonne même que les esprits mercantiles, qui ont su si bien commercialiser l’amour avec la Saint Valentin ou la fête des grands-mères, n’aient pas encore créé la fête des amis. Mais je suppose que ça ne saurait tarder.
Ami, ce mot dont on abuse sans complexe selon la définition indifférente d’un dictionnaire. Un mot dont on baptise inconsidérément son concubin tout aussi bien qu’un vague copain sans se soucier de la nature ou de la valeur de l’appellation.
Un mot vulgarisé dont on use sans commune mesure sur des sites comme Facebook.
Loin de moi l’idée de moraliser ; je suis amie d’amis sur Facebook. Sans illusion et parfaitement consciente que c’est le genre de réseau où l’on est l’ami de n’importe qui, où le nombre prédomine, souvent au détriment de la qualité.
Parce que si on réfléchit quelque peu, qu’attend on d’un ami ? On attend de lui qu’il reçoive nos confidences sans nous juger. On attend de lui qu’il nous soutienne dans l’adversité.
Peut on prétendre que son concubin vous aime sans jamais vous juger ? Peut on attendre d’un copain qu’il soit toujours prêt à vous soutenir dans l’adversité ? Et nous-mêmes sommes nous enclins à nous montrer indulgents vis-à-vis de tous les petits travers agaçants d’un concubin ? Sommes nous prêts à sacrifier nos intérêts personnels pour venir en aide à un copain ?

Et je ne parle là que de l’amitié du tout-venant.

Qu’en est il de l’amitié dans le milieu financier ?
Qu’il s’agisse des Grands Groupes, des Capitaines d’Industries, ou des banquiers, je l’imagine comme une espèce de no man’s land. Les financiers étant, je crois, plus occupés à gérer leurs intérêts, qu’ils soient communs ou conflictuels, qu’à se soucier de sentimentalité.

Qu’en est il de l’amitié en politique ?
Les Écolos sont tellement préoccupés de paraître soudés par l’amitié qu’ils finissent par ressembler à un régime de dattes confites accrochées à leur rameau.
Pour ce qui concerne le Parti Socialiste, nul ne saurait douter de l’amitié qui unit Ségolène Royal et Martine Aubry.
À la tête du Front National, Marine Le Pen n’est amie qu’avec elle-même mais avec tellement de pugnacité qu’elle en devient admirable.
Quant à Nicolas Sarkozy, il faudrait être un esprit chagrin pour croire ceux qui prétendent que ses divers gouvernements (9 en 3 ans !) ont occis bon nombre de ses amis.

« Mon Dieu, gardez-moi de mes amis.
Quant à mes ennemis, je m’en charge ! »
Que la citation soit de Voltaire ou d’Antigonos II, roi de Macédoine, elle s’adapte parfaitement, semble t-il, au monde de la politique.

Qu’en est il de l’amitié chez les peoples ?
Aussi surprenant que cela paraisse, c’est dans ce microcosme décrit hypocrite et cruel que se révèlent des êtres rares
- comme, par exemple, le défunt et très élégant acteur de cinéma Jean-Claude Brialy qui cultivait l’amitié avec un art consommé. Un homme qui offrit, chez lui, un havre de paix à Jacques Chazot, pour y mourir en paix, alors que tous l’avaient abandonné après l’avoir vilement courtisé.
- ou encore le réalisateur, producteur, scénariste Claude Lelouch, cet homme qui a porté assistance à Annie Girardot alors qu’elle était délaissée des réalisateurs et à Bernard Tapie que seuls ses créanciers reconnaissaient encore à sa sortie de prison.

• Extrait de : http://www.cinefil.com/depeche/17916

« Après une traversée du désert dans les années 1980 en raison de soucis financiers et personnels, Annie Girardot renoue avec les honneurs et le succès grâce à Claude Lelouch qui lui offre le rôle de la Thénardier dans son adaptation du roman Les misérables. Sa performance lui vaut le César de la meilleure actrice dans un second rôle en 1996. »

• Extrait de : http://www.rdl.com.lb/2000/3740/tapie.html

« Comment êtes-vous arrivé au cinéma ? »
« Lelouch a appelé à ma sortie de prison et m’a dit : “Tu te souviens, je t’avais proposé de t’activer au cinéma ; ne veux-tu toujours pas en faire ? ”. Comme je sortais d’une situation difficile, j’ai accepté, c’est aussi, le hasard. »

« Normal qu’il ait aidée Annie Girardot, diront les pisse-vinaigre, parlant de Claude Lelouch.
- Il a eu une histoire d’amour avec elle. »
Et alors ? Cette brève liaison datait de 1967 ; il n’en a eu que plus de mérite à lui conserver son amitié et lui redonner une raison de vivre 30 ans après leur aventure.
Et, que je sache, il n’a pas eu de liaison avec Bernard Tapie à qui il a, de même, tendu la main.

Vous attendiez une morale ?
Je serais tentée de dire qu’on a les amis que l’on mérite mais, de fait, il ne m’appartient pas d’en décider. La morale appartient à chacun, selon sa propre conception de l’amitié et de la valeur qu’il lui donne.