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(Dé) gommer Mai-68

Qu’elle est jolie la couverture noir et blanc de Télérama ! Cohn-Bendit regard clair veste à chevrons dévisageant ironiquement un CRS. Mais le plus amusant c’est la « légende »... : « Oubliez Mai-68 ! »

Lorsqu’on s’attarde à la page 15 de l’Hebdo-BoBo, Walpole jette le même regard ironique sur ce cher Daniel. Pour ce dernier, rien ne l’énerverait plus que « d’être enfermé dans un cadre ». Walpole, toujours en alerte maximale, reconnaît là tout l’art subtil de l’Intelligentsia française toujours prompte à classer les gens, à les réduire à ci et à ça, à les ignorer aussi mais toujours ô combien rétive à être elle-même classée, à être elle-même analysée. Walpole s’amuse encore plus lorsque le journaliste confirme que l’image de 68 colle toujours à la peau de notre invité du jour.

Ainsi donc cet ex-jeune de 68 vient nous dire la fin de 68, vient nous asséner qu’il faut oublier le choc qu’a constitué le mouvement de Mai et qu’aujourd’hui il faudrait repartir de l’avant en étant libre par rapport à cet « héritage ». Parle pour toi, Daniel !

Comment Walpole s’explique que des intellectuels puissent dire de telles inepties ? Chacun sait pourtant que vouloir oublier, c’est méconnaître la dimension terrible et sulfureuse de l’oubli. Car le plus terrible, souvenons-nous, c’est que l’oubli de l’oubli, le refus de l’assimilation critique de l’Histoire pèse(ro)nt d’un poids plus terrible encore. Finalement, M. Cohn-Bendit, en sommant les lecteurs de Télérama à oublier 68, dit trois choses : 1. « Je ne veux plus en entendre parler car dans ma vie de tous les jours, les gens ne voient que ce jeune homme que j’étais sur cette photo et cela m’est insupportable » ; 2. « En conséquence, ne m’en parlez plus, ça me fera du bien ! » ; et 3. plus violemment : « Je clos le débat ! Et c’est moi qui ai le dernier mot. Point final ».

Et somme toute, les deux phrases de l’itinéraire de Daniel Cohn-Bendit - narcissisme infantile oblige - resteront comme deux imbécillités : « Nous sommes tous des Juifs Allemands » (comme moi) et « Oubliez Mai-68 » (faites comme moi).

Car « discuter sans fin de Mai-68 serait une manière d’éviter de parler des problèmes d’aujourd’hui ». Certes. Mais Walpole se demande naïvement quel est le sujet du verbe « Discuter sans fin » ? Daniel veut-il parler de ses quatre pages d’interview à Télérama  ? De cette jolie photographie à afficher dans mes WC ? Veut-il parler de ces intellectuels sur le devant de la scène 2008 avec leurs grosses commissions, leurs colloques et leurs coliques ? Pense-t-il à ces intellectuels de cour, version Ségo, qui n’ont à la bouche que la version exclusive et consensuelle de Mai-68, qui présentent essentiellement 68 comme une expérience générationnelle, estudiantine et juvénile, comme une révolte plutôt « romantique et/ou rimbaldienne », qui taisent - consensus jamais interrogé - la plus grande mobilisation ouvrière de ces soixante dernières années et qui gomment non accessoirement leurs propres trajectoires sociales et leurs bien sales trajets politiques. (Coucou Glusksman ! Coucou Romain Goupil !)

Regardez sous les pavés : vous y trouverez aussi les Laurent Joffrin, Serge July, Serge Moati, les François de Closets et autres Alain Touraine, toute cette Gauche « moderne » qui exalte les figures de l’expert responsable, qui porte aux nues la santé de l’homme politique très dynamique et celle du héros technocrate gestionnaire. Rôles qui veulent faire oublier à Walpole et à ses amis combien est précieuse la fonction de l’intellectuel critique.

Me reviennent ces phrases de Jean Eustache, cinéaste 68 qui écrivait avant sa mort :

« Pour la première fois, il me semble que je vois un peu plus clair dans ma façon de faire des films. Je veux être révolutionnaire non pas en faisant des pas en avant, mais en les faisant en arrière pour revenir aux sources. Le but que j’ai essayé d’atteindre dès mon premier film, ce fut de revenir à Louis Lumière, à Jean Renoir. J’ai toujours été contre les techniques nouvelles. Je suis peut-être réactionnaire mais je crois être en cela révolutionnaire ».

Et puis celles-ci - inoubliables - de M. Jean de La Fontaine :

« Gardez-vous, leur dit-il, de vendre l’héritage
Que nous ont laissé nos parents.
Un trésor est caché dedans.
Je ne sais pas l’endroit, mais un peu d’ouvrage
Vous le fera trouver.
 »

Walpole (www.pensezbibi.com)


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11 réactions à cet article    


  • tvargentine.com lerma 28 mars 2008 11:00

    Arrêtez de parler du passé

    Cela fait déjà 40 ans que mai 68 est passé ! pourquoi vouloir encore et encore parler du passé qui ne reviendra pas et qui appartient à un environnement propre à cet époque ?

    Ce que Mai 68 nous enseigne,c’est qu’il ne faut jamais écouter un intellectuel faire de la politique,c’est dangereux pour la démocratie

     


    • RilaX RilaX 28 mars 2008 11:34

      Suivons les conseils de Lerma, le passé ca sert a rien. Supprimons tous les cours d’histoires et brulons tous les livres éditées les années passées !!

       

      Lerma vous etes un fasciste qui s’ignore !


    • ZEN ZEN 28 mars 2008 11:11

      Ce qui m’énerve c’est ce consensus de célébration formatée , où chacun y va de sa petite musique en tirant les énvénements à lui, du côté de sa chapelle...

       

      Commémoration ou instrumentalisation ?..

      Un passé revisité en fonction des intérêts et des passions du présent...

      Laissons donc les historiens établir les faits d’une époque encore trop proche de nous pour que nous puissions facilement l’analyser avec l’objectivité nécessaire , même si le recul temporel et l’effacement progressif des témoins directs facilitent la mise à distance des faits qui ont encore de profondes incidences dans notre présent.Mais échappons, aux incantations, justifications,diabolisations...Les événements avaient leur nécessité historique, malgré la contingence de leur déroulement.

      Elements pour une synthèse :
      -L’Encyclopédie de L’Agora : Mai 68

      Mai 68 - Wikipédia

      Libération - Mai 1968_
      -Quel Mai 68 ?
      ____________________________________________________
      ------------"Liquider Mai 68", une idée aussi vieille que Mai 68----------



      —>".... Le passé est devenu un entrepôt de ressources politiques ou identitaires, où chacun puise à son gré ce qui peut servir ses intérêts immédiats. Il est inquiétant de voir qu’une fois de plus, le - mauvais - exemple est donné au plus haut niveau, que la « mémoire » et la défense de bons sentiments ne servent qu’à faire passer les ombres de la politique réelle. "(Rousso)


      • 1984 28 mars 2008 13:34

        En fait ce crétin de Cohn-Bendit à inventé une mythologie ou il est l’alpha et l’omega de 68, rien d’étonnant à ce qu’il s’arroge le droit d’y mettre fin.


        • Yan Essal 28 mars 2008 15:22

          Il y a longtemps que les soixante huitard ont enterré 68 .

           

          Voilà plus de 35 ans qu’on parlait déjà des "anciens combattants de 68" c’est dire si ça date !

           

          Ce que dit Cohn Bendit , c’est qu’il ne faut plus se complaire dans le passé d’une révolution avortée qui ressemblait d’ailleurs plus à une vérolution . La seule chose positive qui reste de cette période c’est précisément qu’il ne faut pas se complaire dans le passé , ses célébrations ses poncifs et que la vie ne se complait pas dans le culte des morts .

          Célébrer 68 maintenant , c’est une façon de figer l’Histoire , et de dire que tout est maintenant pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles ... et nous saons ce que ça vaut !

           

          et puis , souvenez vous d’un slogan les plus repris de 68 :

           

           

          "ce n’est qu’un début , continuons le combat !"


          • ZEN ZEN 28 mars 2008 17:57

            r Imam Al-Tag-eule

            Tall, on t’a reconnu...


          • Annie 28 mars 2008 20:08

            Je comprends dans une certaine mesure que Cohn Bendit et les autres veuillent faire oublier mai 68, et ne pas être uniquement définis par cette époque. Ce qui ne me surprend pas est que tous ces gens aient évolué, se soient assagis et aient finalement épousé les valeurs qu’ils combattaient à l’époque. Après tout, n’avons-nous tous pas mis un peu d’eau dans notre vin. Ce que je comprends moins, est la sagesse aujourd’hui de notre jeunesse, les causes marginales qu’elles épousent qui me semblent de plus en plus éloignées et déconnectées de la réalité quotidienne de nos vies. Il semble tellement plus facile de se mobiliser contre les changements climatiques, la pauvreté dans le monde, les biocarburants etc. que de distribuer chaque matin des tracts dans une quasi-indifférence. Cette jeunesse est soi-disant devenue solidaire du monde et en fait elle n’est solidaire de personne, car son engagement ne lui coûte rien, et lui donne bonne conscience.

            Cette photo est fantastique. Elle cristalise tout ce que la jeunesse devrait avoir d’arrogance, de certitudes, de mépris pour les institutions ; que Cohn Bendit le veuille ou non, il en restera l’effigie.


            • maxim maxim 29 mars 2008 18:22

              moi je vois surtout la tête d’un branleur qui s’est fait foutre à la porte de la France et qui n’aurait jamais dû revenir !


            • jbal 28 mars 2008 22:02

              je préfere oublier Cohn Bendit .


              • xray 31 mars 2008 14:52

                Mai 68 

                Ce qui est sûr, Mai 68 a été une vraie révolution. En Mai 68 nous passons d’une société d’après guerre à la société actuelle. Plus rien à voir. Tous les repères d’après guerre n’existent plus. 

                 

                C’est la révolution de Mai 68 qui règle le système actuel. 

                Bien sûr, comme toujours, pour se faire la finance a utilisé les défavorisés. Les uns ont pris les gnons, les autres ont gardé le pouvoir et pris l’argent des pauvres en puisant dans les caisses sociales. 

                 

                D’ailleurs, l’argent social est bien destiné à ceux qui en ont besoin. Va sans dire pour les riches. Pour être pauvre, on n’a, pas besoin d’argent. 

                 

                ÉCHO FRANCE 

                La lucidité est comme la lumière qui agresse les aveugles 

                http://echofrance.oldiblog.com/ 

                 

                HYPOCRISIE du SYSTÈME, L’emploi, et le chômage face à la productivité. 

                http://mondehypocrite.midiblogs.com/files/L_emploi_et_le_chomage_face_a_la_ productivite..jpg 

                 


                • Lavigue 6 avril 2008 00:28

                  Que sont devenus les protagonistes de mai 1968 ?

                  Cohen Ben Dit , un libéral libertaire écolo. Geismar, leader de la GP, a séjourné quelques mois en prison puis a rejoint le PS et occupé un stapontin au ministère de l’éducation nationale au côté du sinistre Allègre comme prix de son reniement. Glusckmann, le furtif militant de ce mouvement, a rallié les néo-con français avec les Goupil et Bruckner, approuvé l’invasion de l’Irak (1000000 de civils massacrés directement ou indirectement par les Etats Unis) et appelé à voter le liquidateur de mai 68 Sarkozy.

                  Krivine est resté fidèle à ses idées et a décliné l’invitation du co-fondateur et transfuge de la LCR Henry Weber lors de son mariage fastueux (800 invités, le tout Paris qui compte) avec MME Servan Schreiber.

                  Finkielkraut, fils d’immigré, s’est reconverti dans la xénophobie, ironisant sur l’équipe de France "black, black,black" "risée de l’Europe" et sur les arabes qualifiés de voleurs. Des propos dignes d’un Rebatet et d’un Céline à l’égard des juifs.

                  Robert Linhard, dirigeant historique de la GP, un clerc honnête, s’est tu mais n’a rien renié de son engagement.

                  Quant à Benny Lévy alias Victor Serge, grand timonier de la GP, il est passé de Mao à l’étude de la thora et est mort à Jérusalem en 2005. 

                  Je ne peux ne pas évoquer Serge July qui mena une odieuse campagne de presse à Bruay en Artois accusant un notaire d’avoir assassiné une jeune fille et appela à la constitution de tribunaux populaires pour le juger. Inutile de dire que ce notaire était innocent et sa vie fut brisée. Comme il l’a dit tout m’a profité. Il eut le privilège d’appartenir au clan restreint et envié des journalistes "chiens de garde" du système contre lequel il avait combattu et qui comptait Christine Ockrent la femme du spécialiste en retournement de veste l’effarant French doctor autre renégat. Bilan : la chagrin et la pitié.

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