Doit-on s’inquiéter de la mode « Pokémon Go » ?
Ca y est ! Le jeu est enfin arrivé. Après avoir colonisé toute l'Amérique, l'Océanie, le Japon et l'Europe, "Pokémon Go" a débarqué en France. Un jeu vidéo sympathique, au premier abord. Devenu un effet de mode, ne marque-t-il pas, pourtant, une tendance inquiétante ?
Tout le monde a déjà entendu parler des Pokémon. Ce jeu vidéo traduit, ensuite, en dessins animés, mangas et jeux de cartes. Ces petits êtres fantaisistes et sympathiques aux noms tout aussi imaginaires. Dès la fin des années 90, vous les avez forcément entendus : Pikachu, Dracaufeu ou Bulbizarre. Désormais, avec la dernière création, "Pokémon Go", la frontière entre virtuel et réel s'estompe et se confond. D'ailleurs, vous pouvez croiser ses joueurs aux allures un peu étranges, simplement en ouvrant la fenêtre de votre salon (si celui-ci donne sur la rue ou les espaces publics évidemment) : des joueurs utilisant leur "smartphone" comme d'un détecteur à métaux, traquant les rues, quais, jardins (publics encore une fois) à la recherche de Pokémon à capturer. Ceux-ci, planqués dans le monde réel, apparaissent virtuellement sur les écrans de téléphone et tablette. Le but, vous l'aurez sans doute compris : récolter un maximum de Pokémon. Ce jeu est rapidement devenu un phénomène de société. Une mode qui ne touche pas simplement les jeunes, contrairement à certains clichés. Ainsi, qui ne connait pas Nick Johnson ? Ce chasseur de Pokémon, devenu le premier joueur, sur le territoire des Etats-Unis, à tous les récolter. Pour ce faire, ce patron new-yorkais de start-up (et oui, il a bel et bien un travail) a parcouru près de 160 km, tous les jours à la sortie de son travail. En deux semaines et plusieurs dizaines d'heures de jeu, le tour était joué. Son prochain défi : récolter les neuf races de Pokémon qui lui manquent, réparties dans le monde entier.
Le phénomène "Pokémon Go", symptôme d'un vide existentiel ?
Désormais, et depuis le 24 juillet, les Français peuvent venir concurrencer Nick Johnson. Loin de fustiger le monde du jeu vidéo - qui est, finalement, une nouvelle forme de culture particulièrement inspirante et créative (à ce sujet, le "youtubeur" Usul apporte un éclairage intéressant), Pokémon Go parvient à rendre visible un syndrome particulièrement préoccupant. Celui de favoriser les rapports virtuels entre les hommes, dans un unique but consumériste. Natacha Polony le pense, le dit et l'écrit certainement plus finement : la société est dans une phase où le vide existentiel domine l'esprit du citoyen. Un esprit qui sommeille en nous. Alors que l'intention du XXIe siècle devrait sublimer l'Être, notre "modernité" positionne le Français (comme tout autre citoyen) dans la recherche de la consommation. Celle-ci peut-être visible le week-end, par l'attente hebdomadaire de l'individu à rechercher ses biens dans les hypermarchés ou dans sa quête entêtante de profiter de ces mêmes biens (ici le jeu Pokémon Go), en étant totalement débranché du réel et de la richesse qui l'entoure. De fait, cette virtualité déconnecte le citoyen de la nature, des différentes cultures, des divers patrimoines qui l'entourent... et de ses congénères. Une illusion qui créé une impatience chez le citoyen, celle de profiter de son bien artificiel pour s'épanouir individuellement et virtuellement. Avec cette fausse idée, qu'en parcourant les rues et les places de nos cités (où peuvent s'affronter des joueurs de "Pokémon Go"), le joueur aura, au moins, l'apparence d'être mêlé à une communauté réelle.
L'effet "Pokemon Go" est un symptôme de ce vide existentiel, d'une structure sociale qui ne pousse plus le citoyen à éveiller ses sens, sa curiosité. Et à ne plus faire corps au sein de cette société. Le citoyen simplement vu comme un bon à consommer. D'ailleurs la superstar Nick Johnson (le traqueur de Pokémon) a livré l'un de ses secrets : pour attraper tous les Pokémon, en moins de temps possible, le joueur doit acquérir une autre application payante, intitulée Ingress. Un petit jeu basé, lui aussi sur un système de géolocalisation, développé par Google et Niantic. Cette dernière entreprise étant éditrice également de... "Pokémon Go".
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