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Accueil du site > Actualités > Société > Du gène égoïste au génie collaboratif

Du gène égoïste au génie collaboratif

Ce billet est tiré d’une publication de la Harvard Business Review écrite par le Professeur de droit entrepreneurial Yochal Benkler. Harvard est la business school la plus réputée au monde et un temple de ce que l’on appelle le corporate management : comment utiliser un ensemble d’actifs humains, matériels et financiers pour générer le plus de profit possible au travers d’un ensemble de méthodes. Cette approche est fondée sur le principe que l’être humain est par essence égoïste et rationnel (posant les choix les plus avantageux pour lui-même) et que la somme bien agencée de tous les égoïsmes génère la situation économique la plus rationnelle possible. C’est ce que l’on appelle la “main invisible” proposée par Adam Smith dans son ouvrage de 1776 La Richesse des Nations. Corollaire de cette vision de l’humain égoïste, la nécessité de créer des systèmes de contrôle, de mesure (tels les droits de propriété), de récompense et de punition sans lesquels les sociétés humaines se déliteraient rapidement. C’est la encore une ancienne théorie attribuée à Thomas Hobbes et son Leviathan, de … 1651. Et pour couronner le tout, la notion d’égocentrisme inhérent à l’être humain fut renforcée dans les années 70 par le biologiste néo-darwiniste Richard Dawkins et son livre Le Gène Egoïste. Là c’était définitif : même le bloc fondamental de toute vie, le gène, était bâti sur l’égoïsme pur et dur et rien d’étonnant alors que l’homme soit ainsi fait. Bien sur Keynes a combattu Smith, Rousseau a combattu Hobbes et de nombreux biologistes tel Gould ont combattu Dawkins et nous savons, aujourd’hui, que cette inclinaison à l’égoïsme rationnel est tout sauf une réalité générale mais dans le monde du corporate management et de la technocratie en général, on en est toujours à Hobbes, Smith et Dawkins. D’ou l’intérêt particulier de cet article de Benkler paraissant dans la propre publication du saint des saints du corporate management, la Harvard Business Review.

Suite au crash financier américain de 2008, le président de la Federal Reserve Alan Greespan déclarait lors d’une audition au Congrès : “Ceux parmi nous, dont moi-même, qui ont toujours compté sur l’égoïsme (self-interest) des institutions financières pour protéger le capital des actionnaires, se trouvent aujourd’hui en état de stupéfaction“. Autrement dit, tout le système reposait sur l’idée que les banques, dans leur propre intérêt, s’abstiendraient de s’auto-détruire. Cette notion est à la base de la théorie économique néo-capitaliste sur laquelle je me suis déjà étendu, dominante encore aujourd’hui dans le monde académique et politique. malgré son incapacité congénitale à produire le moindre résultat utile pour le monde réel. Un argument datant des années 60 en faveur de cette approche fut que les fameux Commons (terres partagées par les paysans) ne pouvaient survivre à long terme vu que par nature, les hommes les exploitaient au maximum de peur que d’autres les exploitent encore plus qu’eux, et qu’in fine ces Commons soient réduits à néant. La fausseté de cet argument fut révélé par l’économiste Elinor Ostrom (et lui valut le prix Nobel de 2009), qui démontrait que ces Commons, au contraire, étaient capables de fonctionner pendant des siècles. La capacité qu’ont les êtres humains à mettre de côté leur intérêt personnel au profit de collaborations gratuites est évidente aujourd’hui en matière logicielle : l’open source et le travail collaboratif sont à la base de Wikipédia, de Linux, et de maintes applications de part le monde. Pendant des décennies et encore aujourd’hui bien souvent, les économistes, politiques, législateurs patrons et ingénieurs ont créés des systèmes basés sur le contrôle, la mesure, la récompense et la punition pour faire en sorte que les gens atteignent les objectifs qu’on leur avait fixé. Si l’on voulait que les chefs d’entreprises fassent au mieux pour leurs actionnaires, il fallait les payer en stock-options. Si l’on voulait que les médecins s’occupent mieux de leurs patients, il fallait les menacer d’actions en justice.

Et pourtant. Nous savons qu’il y a énormément de gens qui collaborent naturellement, qui font du bénévolat, qui se conduisent comme des gens décents capables de réciproquer le bien avec le bien. Des systèmes coopératifs existent partout. Aujourd’hui des biologistes et des psychologues estiment qu’il y aurait même une prédisposition génétique humaine à la coopération. Nous savons aussi que la pensée humaine n’est pas souvent rationnelle, obéissant plutôt à des règles plus proches de la physique quantique que de la logique pure (sujet récemment couvert dans ce billet : http://rhubarbe.net/blog/2011/12/16/etre-humain-etre-quantique/). Des études sur le comportement, notamment celles de Lee Ross menées sur des étudiants américains et des pilotes de chasse israéliens, semble démontrer que sur une population donnée environ 30% des gens auront en effet un comportement basé sur l’intérêt personnel dans tous les cas (que le contexte soit un jeu concurrentiel ou un jeu collaboratif par exemple) , mais 50% auront un comportement coopératif ou conditionnellement coopératif (si l’on ne coopère pas avec eux ils ne coopèrent pas longtemps). Les 20% restant sont indécis. Bien sur il faut prendre ce genre de résultats avec des pincettes mais globalement on peut penser que le système que nous connaissons tous trop bien, basé sur la carotte et le bâton, n’est efficace que sur une portion minoritaire de la population – ceux qui effectivement ne fonctionnent que dans le sens de leur intérêt personnel et qu’il faut cadrer. Malheureusement, ce sont ces gens-là que l’on retrouve le plus souvent en haut de la pile et qui imposent leur loi…

La génétique a aussi fait du chemin depuis Dawkins. Voici quelques années les chercheurs Thomas Bouchard et Matt McGue publiaient une étude sur les jumeaux et notamment l’influence génétique sur leurs différences psychologiques et comportementales. Ils en conclurent que de l’ordre de 50% des traits de caractère tels l’extraversion, l’entre-gens et l’ouverture aux autres étaient hérités, alors que les facteurs environnementaux (contexte familial et social pendant l’enfance) ne montraient pas de corrélation avec le type de personnalité. En neurologie, Giacomo Rizzolatti démontrait que le fait de coopérer activait des circuits spécifiques ”de récompense” dans nos cerveaux, autrement dit nous nous faisons plaisir à nous-mêmes en collaborant. Le niveau de coopération étant très lié à la confiance, cette dernière semble aussi sous contrôle biochimique : la prise d’ocytocine augmente note facilité à faire confiance aux autres.

Bref, tout cela pour dire que nous sommes biologiquement affûtés pour collaborer, même s’il est difficile aujourd’hui de lier tous ces éléments entre eux. Quels sont alors les éléments requis pour construire un système coopératif ? Selon Benkler, il y en a sept :

La communication, élément primordial. le fait de communiquer provoque l’empathie et la confiance.

Le cadre et l’authenticité de la démarche : le cadre ou contexte joue sur la propension à la coopération, mais il faut que le cadre colle à la réalité. Définir un cadre comme “collaboratif” alors qu’en réalité c’est juste une façade ne fonctionne pas longtemps, les gens ne sont pas dupes.

L’empathie et la solidarité. Nous collaborons plus facilement avec des gens avec qui nous sommes solidaires et/ou avons de l’empathie, mais sans perdre de vue que la solidarité peut être discriminatoire.

L’équité et la moralité : il est important que les gens se sentent traités avec équité (ce qui n’est pas synonyme d’égalité). Ce qui constitue l’équité n’est pas une norme générale, mais une norme dépendante du contexte. De plus les gens qui collaborent “aiment bien faire”, il faut donc qu’il existe un ensemble de valeurs clairement posées et acceptées de tous. Les être qui collaborent sont plus sensibles à des normes sociales qu’à des règles administratives.

La motivation. Il faut arriver à des systèmes qui font appel aux motivations intrinsèques des participants, plutôt qu’aux systèmes actuels basés sur la récompense ou la réprimande. C’est compliqué car d’une part notre compréhension des mécanismes de motivation intrinsèques n’est pas très avancée, et d’autre part le facteur argent tend à empirer plutôt qu’améliorer ce niveau de motivation. En effet de nombreuses études (d’après Benkler toujours) montrent que l’introduction d’une valorisation monétaire au sein d’un système basé sur la coopération naturelle le transforme en un échange commercial et détruit le niveau de motivation intrinsèque des participants. Un peu comme se faire inviter à dîner et donner un billet de 20 euros plutôt qu’un bouquet de fleurs : ca “vaut” pareil mais c’est tout sauf pareil. Autre exemple, une étude suédoise démontre que les femmes qui donnent leur sang gratuitement le font beaucoup moins si on propose de les payer pour le faire. Par contre si cet argent est donné à une association caritative, leur niveau de participation augmente à nouveau. Pour Benkler, il ne faut plus tout baser sur la récompense matérielle mais travailler sur les motivations sociales et intellectuelle, l’autonomie et le plaisir.

La réputation et la réciprocité : la réciprocité à long terme, directe ou indirecte, est un facteur majeur de collaboration. Mais elle est également fragile du fait des profiteurs d’où l’importance de la réputation, permettant de compenser cette fragilité. Voir par exemple le système de réputation de Ebay.

La diversité : les systèmes ouvertes à des motivations diverses fonctionnent mieux (sont plus productifs) que ceux qui ne se soucient que de récompense matérielle. La diversité implique la flexibilité, mas aussi la prise en compte du coût de l’acte coopératif : il est possible de créer des systèmes basé sur le sacrifice personnel, mais seulement à court terme.

Au vu de tout ceci, pourquoi le modèle de l’humain égoïste est-il encore si dominant ? Quatre raisons sont proposés par Benkler : D’abord, ce modèle n’est pas entièrement faux. L’égoïsme et l’intérêt personnel existent et ils sont effectivement dominants chez certaines personnes, mais malheureusement notre société a adopté cette vérité partielle en tant que vérité universelle. Ensuite, l’histoire et notamment la période de guerre froide des années 60 aux années 80, associait le capitalisme et l’intérêt personnel contre le communisme et l’intérêt collectif / collectivisme. La chute du Mur permis de voir que l’appétit naturel humain pour la coopération n’était pas une menace pour le capitalisme mais avait une réelle base scientifique. La simplicité est un autre facteur : les humains aiment des explications simples à la complexité du monde, et la théorie utilitariste basée sur l’intérêt personnel est une théorie simple et cohérente. Et finalement la simple habitude : deux générations ont été éduquées selon un modèle embrassant l’égoïsme universel comme moteur du monde. Nous avons intégré ces “valeurs” et il est ensuite très difficile de s’en séparer, cela demande un effort conscient.

Dans le monde actuel, l’adaptabilité, la créativité, l’innovation semblent être les préconditions au développement satisfaisant et pérenne des organisations comme des personnes. Ces qualités ne sont pas vraiment compatibles avec le modèle industriel, s’adaptent mal aux notions de contrôle et de prix. Notre motivation à développer ces qualités doit devenir plus importante que notre capacité à calculer les coûts et bénéfices, risques et récompenses de méthodes technocratiques dans des contextes connus : le contexte c’est l’inconnu, la surprise, l’innovation. Et au-delà de ces qualités de créativité, d’élan, de flexibilité et de diversité nous devons inclure une conscience sociale et un humanisme authentique dans le développement de systèmes coopératifs.

 

NB : Ce billet n’est pas une traduction littérale de l’article de Benkler mais une synthèse. Le point de vue est évidemment très américain et n’est en aucun cas une critique du capitalisme.


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9 réactions à cet article    


  • Ronny Ronny 9 janvier 2012 10:32

    @auteur,

    Intéressant papier...

    Ceci dit, il y a un problème de fond que je voudrais bien voir abordé dans Avox ( à un moment je me proposais de le faire, mais faute de temps, je ne m’y suis pas encore collé mais je vais le faire !), c’est celui de la justification de certains comportements au sens large, que ceux-ci soient le fait d’individus isolés, de groupes, ou de personnes morales comme le sont les entreprises, en se fondant sur des principes biologiques.

    En particulier, je vois un lien fort entre la « théorie » (pour moi c’est bien plus qu’une théorie, mais je ne souhaite pas froisser les créationnistes, même s’ils se mettent le doigt dans l’oeil jusqu’à la cheville !) de la sélection naturelle fondée sur le « best fit », c’est à dire la survie de l’individu le mieux adapté à un environnement donné à un temps t, et les politiques menées par la droite sociale (ce bon Wauquiez), et au delà par les néo libéraux. Les « chômeurs ne travaillent pas parce qu’il ne le veulent pas » entendez par là il en sont incapables, il faut donc les « adapter » et les faire travailler pour justifier des aides qu’ils reçoivent. Au delà aussi, l’idée de la sélection naturelle se retrouve dans des thèmes comme « le mérite » ou la valorisation à outrance de la réussite individuelle (Cf. le copinage avec les grands patrons). On retrouve également des notions de biologie dans le fait de repérer les enfants « à risques dès trois ans » , comme s’il existait un gène de la délinquance ! Enfin, la notion d’adaptation se retrouve elle dans la nécessité du « changement » : réforme après réformes, il faut adapter la France au monde, adapter le marché du travail, adapter le système des retraites, etc. 

    Ce que les politiques néolibérales oublient, c’est la notion de civilisation. Toute la démarche civilisationnelle est d’aller à l’encontre de la sélection naturelle  : c’est défendre le faible contre le fort et lui donner au travers des institutions de la République les mêmes chances, c’est faire que le riche soit jugé comme le pauvre, c’est aider les handicapés physiques comme ceux que notre société a crées (je pense aux SDF, aux chomeurs, et même au clandestins), bref c’est le soutien aux « less fits ». L’horreur réside donc à mon sens dans le fait que les politiques néolibéraux et néolibérales sont en totale contradiction avec les valeurs de civilisation....


    • Vincent Verschoore Vincent Verschoore 9 janvier 2012 16:42

      Bonjour,

      Je comprend ce que vous voulez dire mais je ne suis pas tout à fait d’accord avec vote affirmation comme quoi « Toute la démarche civilisationnelle est d’aller à l’encontre de la sélection naturelle ». On ne peut pas aller « contre » la sélection naturelle dans le sens ou c’est cela qui participe à note capacité à survivre dans un environnement changeant. Pour moi la civilisation serait plutôt le contrôle de l’environnement de manière à ce que la sélection naturelle s’opère dans le sens de l’humanisme plutôt que dans le sens du rapport de force et de la prédation. Mais bon j’admets que ca fait très « brave new world » :)

    • Francis, agnotologue JL1 9 janvier 2012 15:30

      Bonjour,
      intéressant.

      Vous écrivez : « Malheureusement, ce sont ces gens-là (ceux qui effectivement ne fonctionnent que dans le sens de leur intérêt personnel et qu’il faut cadrer. ) que l’on retrouve le plus souvent en haut de la pile et qui imposent leur loi… » De mémoire, j’ai lu une étude qui faisait apparaitre une forte corrélation entre niveau de stress et domination : ce seraient les individus les plus stressés qui imposeraient leur loi dans le groupe. Les flegmatiques sont rarement des chefs de bande.

      Vous écrivez : « La génétique a aussi fait du chemin depuis Dawkins. ». Attention : Pour les psychologues évolutionnistes, tout est déterminé par les gènes lesquels gènes œuvrent à la réalisation d’un dessein intelligent. Ainsi, pour ces gens, tout est déterminé à l’avance.

      Je vous invite à lire l’excellent petit ouvrage  : la génétique néolibérale néo-libérale les mythes de la psychologie évolutionniste", publié aux Editions de l’éclat. par Susan McKinnonprofesseur au département d’anthropologie de l’Université de Virginie.


      • Vincent Verschoore Vincent Verschoore 9 janvier 2012 16:36

        Merci pour le lien. Si les psychologues évolutionnistes suivent un tant soit peu l’actualité en matière de génétique et notamment sur les aspects épigénétiques, ca doit devenir compliqué pour eux. 


      • bluebeer bluebeer 9 janvier 2012 20:13

        Bonjour l’auteur.

        Merci pour une autre de vos intéressantes contributions à agoravox, qui suscite quelques remarques et réflexions :

        Votre interprétation du « gène égoïste » de Dawkins me paraît erronée. Il ne s’agit nullement de la thèse selon laquelle l’égoïsme est programmé génétiquement, mais plutôt celle selon laquelle les gènes roulent pour leur propre compte. De ce point de vue, l’enjeu de la sélection naturelle n’est ni la préservation de l’espèce (ou groupe), ni la survie de l’individu, mais plutôt la prolifération de séquences génétiques qui se recopient à l’infini, fût-ce au travers d’organismes différents – lesquels ne sont que de simples vecteurs de transmission, ou stratégies évolutives. Paradoxalement, la théorie du gène égoïste expliquerait l’incongruité de l’altruisme animal (où des individus se mettent en danger pour le profit du groupe) car cette attitude tendrait à maximiser au bout du compte la prolifération du patrimoine génétique en favorisant la survie du plus grand nombre.

        Cette théorie constitue donc une espèce de révolution copernicienne dans le domaine du darwinisme, séduisante à bien des égards, volontairement provocatrice dans sa forme originelle, mais qui se heurte à toute une série de difficultés théoriques et épistémologiques dont la moindre n’est pas la définition du « gène de base » et les mécanismes de son « intelligence ».

        Pour élaborer sur le reste de votre texte, ce n’est pas l’égoïsme en tant que tel qui fonde l’argumentaire de la culture libérale, ni même son corolaire implicite selon lequel on n’œuvre bien que dans son propre intérêt. L’idée invoquée est plutôt celle d’une méritocratie fantasmée, où le meilleur l’emporte et impose ses solutions à la communauté. Les solutions sont individuelles, et émergent de par la ténacité de ceux qui les proposent.

        Davantage encore que darwinien, ce point de vue est intrinsèquement lié à une vision protestante, calviniste du monde. Chaque homme est responsable devant le créateur ; il lui appartient de travailler dur et de faire fructifier son talent, ce qui bien naturellement lui attire sa juste récompense sous forme d’une position enviable dans la société – dieu est juste, ne l’oublions pas. A contraster avec l’attitude catholique où l’individu peut se permettre d’être pêcheur et indolent la plupart du temps, puis d’effacer l’ardoise d’une petite confession assortie de trois aves et deux paters.

        Cet esprit protestant, contemporain de l’essor de la démocratie libérale anglo-saxone qui offrait la possibilité aux roturiers de faire fortune et de se hisser au rang de la gentry, a créé une culture de la compétition chère aux américains. Là où nous voyons de l’égoïsme, ils voient de la justice sociale : ceux qui bossent dur ou sont malins récoltent le fruit de leur travail et de leur astuce. La société s’organise en conséquence, avec les malins, les doués au sommet, et les autres, moins méritants à la base. En revanche, la coopération et la solidarité sont des non-sens qui affaiblissent le groupe et permettent aux maillons faibles de fragiliser l’ensemble de l’édifice. Mérite donc, pas égoïsme.

        Enfin pour terminer, une dernière réflexion est que de nombreux éthologistes darwiniens considèrent la coopération comme une étape critique dans l’évolution de certaines espèces, notamment en leur permettant de chasser des proies plus grandes et plus abondantes, et d’augmenter leurs chances de survie. Pour chasser en groupe, il faut se coordonner, il faut se structurer (hiérarchiser) et surtout, il faut se faire confiance. C’est ainsi qu’une petite branche des hominidés a fini par décoller et dominer le monde animal et végétal. On trouvera donc plus facilement des justifications génétiques à l’altruisme et à la coopération qu’à l’égoïsme, qui serait plutôt un reliquat de formes de vies plus frustres.


        • Vincent Verschoore Vincent Verschoore 9 janvier 2012 22:19

          Bonsoir et merci pour cet éclairage culturel ! Il est clair que dans la société américaine l’accès à la fortune est le signe que l’on est bien vu par Dieu, ce qui crée une schizophrénie incessante du fait que la Bible dit que les élus de Dieu sont plutôt les pauvres. Ce qui est intéressant est que l’absence de religion peut rendre encore plus virulente la méritocratie, comme pour le nazisme. Rien n’est simple...


        • easy easy 9 janvier 2012 22:08

          Il est très intéressant de creuser cette question 

          Il se trouve que de façon quasiment universelle, le premier corps pensant, le plus évident, celui qui saute aux yeux est l’individu à la Vitruve. Quand il y a à couper une tête, c’est le plus souvent celui d’une personne.
          Quoiqu’il existe des visions tendant à couper des millions de tête en même temps, l’ensemble étant alors traité comme un Sujet pensant unique, c’est le plus souvent un individu et un seul qui est crucifié ou envoyé en prison. Il en découle qu’il ressort plus logique de considérer que la principale voire unique personne pensante est l’individu de 70 kilos.

          En réalité, les lynchages le prouvent, il existe plusieurs personnes pensantes de périmètres différents, depuis la personne seule jusqu’à toute l’Humanité entière en passant par le couple, la classe, le collège, l’armée, la commune, la race.
          Et dans chaque enveloppe, il y a des débats d’idées


          L’individu étant alors à associer l’a-tome. C’est l’unité pensante en dessous de laquelle il n’y a plus de pensée.



          Concernant les commons.
          Ces espaces ouverts et accessibles à tous permettaient que s’expriment, sur le plan des terres, plusieurs périmètres de pensée non individualiste. 
          Là où la terre devient la propriété d’une personne de 70 kilos, les autres personnes de 70 kilos ainsi que celles de 700 et de 70 000 kilos ne peuvent s’y coaguler en messes. Aucun groupe de personnes ne pense quoi que ce soit sur les terres privatisées.

          La propriété privée serait même définie comme étant la chose au sujet de laquelle ou sur laquelle personne d’autre que son propriétaire ne peut faire de messe, de projets ou de rêves

          Il n’en ressortait donc que plus salutaire qu’il puisse exister des commons où des Personnes multiples et composites pesant bien plus de 70 kilos puissent y penser donc y vivre.



          Au regard des concepts de patrie, des bâtiments d’église et des mairies, il ressort qu’au quotidien, de façon ordinaire, les terres non privatisées représentaient certainement le plus bel espace d’initiative multipersonnel. 
          Car au fond, concernant la patrie, c’est si vaste, si lointain et abstrait que les Personnes, même de grand périmètre, ne peuvent guère spéculer dessus. Concernant les églises, mairies et lavoirs, les Personnes pouvaient également assez peu y modifier quoi que ce soit. Alors que sur les terres communes, les Personnes de tout périmètre pouvaient y bâtir ou soutenir des fantasmes et projets, des modes de survie.

          Les nomades en particulier, qui avaient très souvent des bêtes, les Gitans, les gens des cirques, les forains, pouvaient individuellement et collectivement spéculer leurs avernir sur ces espaces gérés par une collectivité.
          Il n’y avait pas de vide juridique sur les communs. Ils avaient un statut mais collectif. Ainsi, une communauté de voyageurs communiquait, commerçait, négociait avec une communauté gestionnaire de commons et c’est ce qui créait l’esprit communautaire.

          Oui, ça aurait pu perdurer.

          Les communs n’ont pas disparu en raison de la logique égoïste de chacun mais plutôt en raison d’une nouvelle idéologie productiviste très bien vendue. Cette logique imposant les regroupements de parcelles elle a conduit rapidement à la disparition des miettes de terres libres.


          Les nouveaux culivateurs n’étaient pas une génération soudainement plus égoïste mais bien une génération soudainement productiviste

          Ce n’est pas l’égoïsme qui a fait le productivisme alors cynique, systémique et procédurier, c’est le productivisme qui a rompu les traditions communautaires pour nous plonger dans un comportement aux allures égoïstes. Et une fois le productivisme généralisé par la compétition internationale, l’égoïsme est devenu son compagnon par dépit.

          Depuis 60 ans nouys nous accusons tous mutuellement d’égoïsme alors que nous ressentons tous confiusément que notre égoïsme n’est là que par dépit. Nous sommes des égoïstes honteux de l’être devenus


          Récemment, l’apparition des problèmes de limites écologiques auront mis un bémol au productivisme, donc à l’égoïsme qui l’accompagnait par dépit. Pour contrer les perversions et méfaits de ce productivisme, ses opposants n’évoquent plus l’intérêt du communitarisme présent mais plutôt celui de l’intérêt des générations futures. Concept inédit dans l’Histoire.

          Alors que nous nous accusions tous d’égoïsme, nous voilà à prouver notre altruisme extrême en réagissant des l’intérêt extraordinairement lointain des « générations futures »

          Si sous prétexte de productivité nos différentes Personnes pensantes ont capitulé pendant 50 ans, elles reviennent en force sous un prétexte futuriste.

          L’esprit communautaire a les propriétés du phénix.


          Les polypes, les fourmis, les termites, les abeilles et les éléphants pensent selon différentes enveloppes unitaires, les hommes aussi. Nous serions essentiellement des égoïstes, nous nous disperserions dans les déserts au lieu de nous entasser dans d’immenses cités.



          • herbe herbe 9 janvier 2012 22:41

            Merci pour cet article très intéressant !

            Je fais la connexion avec cet autre article :


            On peut réaliser un synthèse plus complète de l’individu et de sa relation à la communauté par le concept « identité relation ».
            L’être (égoïste) peut-il exister sans relation ? (je rejoins je crois le commentaire précédent d’easy)
            quelques pistes ici :

            • SlipenFer 10 janvier 2012 06:28

              C’est beau la science http://geobiotech.fr/
              Achat d’Ocytocine

              on devrait fabriquer des grenades au copulines  smiley
              La recherche dans la deuxième moitié des années 90 a démontré
              que les copulines peuvent affecter,
              voire amener au contrôle, du cerveau de l’homme......

              ou des épandages de pur androstenol (5-alpha-androst-16-et-3-alpha-ol)
              Androstenol est un des phéromones féminines les plus importants.
               Il aide à s’ouvrir pour être à son aise. Androstenol rend les gens gentils et bavards.
               Il aide même à les charmer ou faire tomber en extase. smiley
              et pan ... !!!! en plein sur la tronche aBachar el-Assad

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