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Ecole, changer de politique

Trois faits montrent que le gouvernement, par idéologie, mène une politique qui nuit gravement à l’école et qui fait que demain nous ne seront pas en mesure à faire face aux nouveaux enjeux de notre société. Il faut tirer la sonner d’alarme et se mobiliser afin que la politique change. L’école doit devenir une priorité, pas seulement dans les discours.

Trois faits :

 

1. La réduction des effectifs repose sur une la conviction que l’Education Nationale est un mammouth qui faudrait dégraisser. C’est un gage donné à un électorat de droite qui est convaincu que les enseignants sont une bande de gauchistes barbus qui n’ont comme motivation les vacances. Or la dernière étude « L’état de l’école  » réalisé par le ministère de l’Education Nationale montre que la France est au mieux dans le peloton et en retrait par rapport au pays qui ont fait de l’éducation une vraie priorité. Pour la première fois peut-être de l’histoire de la France, entre 1995 et 2007, la durée de scolarisation à diminué passant de 19 ans à 18,6 ans et la part d’une génération obtenant le BAC n’a pas évolué. Parallèlement la part du PIB allouée à l’école a baissé d’un point en 10 ans passant de 7,6% à 6,6%. Si comme veut le faire croire le gouvernement nous avions du gaspillage, cela aurait pu être une bonne chose. Mais non, la France dépense moins par élève que les autres pays comparables, et ce plus particulièrement dans le primaire (5 500€ contre 7 700€ en Suède) et pour les études supérieures (11 600€ versus 17 000€). Cela est d’autant plus grave que ce sont deux moments particulièrement importants, le premier afin de lutter contre les inégalités ; le second pour favoriser l’innovation. Et ce n’est pas les quelques moyens supplémentaires apportés par le grand emprunt qui résoudra la question car c’est tous les ans qu’il faudrait investir plus.

Avant d’aborder les deux autres faits, il est important, là aussi, de les replacer dans leur contexte. Henri Guaino, conseiller de Nicolas Sarkozy, a le 25 octobre dernier sur France 5 déclaré que l’élaboration des programmes scolaires était « un choix idéologique et politique » et avait ajouté qu’il ne fallait plus que l’élaboration des programmes soit « traités par des spécialistes, des inspecteurs de l’Education Nationale ». C’est propos doivent être lus dans les deux sens :

  • l’école est une arme idéologique pour le gouvernement et c’est sans doute la raison pour laquelle le sociologue François Dubet vient de démissionner de la commission d’experts en charge des programmes scolaires.
  • Les modifications mises en œuvre sont un moyen de comprendre l’idéologie du gouvernement actuel comme nous le verrons dans les deux faits suivants.

2. Le nouveau programme d’économie de seconde constitue une rupture avec l’enseignement traditionnel de la discipline, enseignement qui déplaisait au gouvernement libéral, aux économistes tenant de la pensée économique dominante et aux entreprises tenantes d’un libéralisme débridé. Le gouvernement a au final imposé ses choix qui correspondent pour l’essentiel aux vœux de l’Institut de l’entreprise présidé par Michel Pébereau. L’Association des professeurs de SES (APSES) lui reproche de faire faire l’impasse sur l’étude des enjeux sociaux comme le chômage, la précarité, les inégalités, le partage salaires / profits, les conditions de travail, etc. Bref, l’enseignement passe sous silence les sujets qui fâchent, aseptisée, débarrassée de ses conflits sociaux et de ses débats scientifiques. Cette évolution est particulièrement surprenante après la crise financière que nous venons de traverser qui remet en cause profondément les modèles économiques utilisés et a décrédibilisé les économistes tenants de la pensée unique pour qui les crises étaient… impossible ! La crise aurait dû nous permettre de remettre en cause cette pensée unique libérale et le gouvernement prend la direction opposée. Cela montre que le gouvernement n’a pas, contrairement à son discours, renoncé au libéralisme débridé. Tout espoir n’est pas perdu, mais les économistes réformateurs doutent. André Orléan ne voit « pas apparaître les changements conceptuels nécessaires pour penser l’instabilité des marchés. Il y a une difficulté de la science économique à se transformer de l’intérieur ». De même, la composition du jury d’agrégation pour 2010 est encore 100% pensée unique. De même cette réforme des programmes.

3. la civilisation musulmane. Peu de temps après, le gouvernement franchit un nouveau pas en voulant supprimer le cours intitulé « La Méditerranée au XIIe siècle : carrefour de trois civilisations ». Avec le projet proposé, si rien n’est modifié les futurs lycéens de seconde ne pourront plus étudier la civilisation musulmane en histoire-géo (5 heures de cours), disparue au profit de « l’Occident chrétien médiéval ». « Ce cours a une portée civique. Il permettait une ouverture auprès d’élèves qui sont dans un monde fait d’ouvertures. C’est un thème qui était très porteur. En termes de connaissance comme en termes de savoir vivre, de civisme, de repères  », explique Jean-Marc Fevret, de l’Association des professeurs d’histoire-géographie de l’académie d’Aix-Marseille, au micro de France Info. Même si le gouvernement dit que le projet n’est pas arrêté et que le monde musulman ne disparaît pas des projets de programmes car il prévoit 1h de cours sur l’étude obligatoire sur « Constantinople à Istanbul : un carrefour de civilisations » la direction prise est surprenante dans une société où l’intégration est un enjeu majeur, comme le chômage, la compréhension interculturelle est un sujet qu’il faudrait renforcer. Le gouvernement prendre la direction inverse et renforce les oppositions. Plutôt que de développer la compréhension, on renforce les peurs. Ce choix illustre une fois de plus l’idéologie du gouvernement et l’hypocrisie du débat sur l’identité nationale.

Alors que nous sommes à un tournant pour nos sociétés. Alors que nous allons devoir inventé un nouveau modèle. Alors que la compréhension des événements sera clé pour chacun accepte les changements venir, le gouvernement prend avec sa politique de l’école, une direction opposée et préfère servir ses intérêts que la nation. Dans ce contexte, il est important que la société civile prenne la parole. Tout n’est pas une question d’argent et notre système scolaire doit être repensé afin d’être moins normatif, afin d’apporter des réponses plus adaptés à chacun et de ne pas exclure ceux qui ne rentre pas dans le moule élitiste. En France, il n’est pas possible de faire une pose entre le lycée et les études supérieures. Le corporatisme et le conservatisme d’une partie des enseignants, le populisme du gouvernement et l’élitisme à la Française d’une partie des parents d’élèves rendent les réformes difficiles. Ensemble, faisons de l’éducation une priorité. Sortons de la confrontation et passons à la communication non violente. Sortons des positions dogmatique et écoutons-nous avec bienveillance, afin de définir un projet commun au service de nos enfants.


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13 réactions à cet article    


  • WatchTower WatchTower 24 février 2010 12:21

    Ajoutons à tout cela la suppression de l’histoire en S. Ils ont parlé de suppression de la philosophie aussi.
    Ajoutons aussi à cela la réforme du poste d’enseignants de SES. Ainsi, dans mon ancien lycée, l’effectif est passé de 10 profs à 3. Non pas à cause de réduction de budget, mais à cause de l’imposition d’une formation spécifique de l’enseignant de SES. Seuls les formés en éducation civique ( je ne suis pas sur ) sont désormais valables.

    Mais je crois que vous êtes trop idéalistes mon chère.
    Ces reformes ont des enjeux qui dépassent lla simple « déstructuration » de l’éducation nationale. Il s’agit ici de former les individus en fonction des besoins du marché et il s’agit de conditionnement par le systeme scolaire ( ajoute à ca le conditionnement télévisuel et ca te forme le connard de base). Bref ca rentre dans une logique de création d’un nouveau « citoyen » adapté au systeme politique, et ca avance sur la même voie dans tt les pays d’occident ( les usa sont les pires à ce niveau là).
    Spécialisation des individus, réajustement du niveau moyen ( brevet et bac plus facile ). Ainsi, sans histoire, les Scientifiques seront plus à mêmes de participer aux nouveaux projets d’innovations en matière d’OGM, de radio fréquences et de nanotechnologies.

    Huxley quand tu nous tiens...


    • Fred le Zèbre Fred le Zèbre 24 février 2010 20:58

      Oui Huxley avait déjà décrit le monde actuelle : il décrivait l’état totalitaire parfait comme un état où la classe dirigeante « auraient la haute main sur une population d’esclaves qu’il serait inutile de contraindre, parce qu’ils auraient l’amour de leur servitude. La leur faire aimer – telle est la tâche assignée dans les états totalitaires d’aujourd’hui aux ministères de la propagande, aux rédacteurs en chef de journaux, et aux maîtres d’école. » Nous y sommes.

      Les exemples ne manquent pas : http://zebres.eu/blog/l-horreur-du-meilleur-des-mon/2009/10/04/

      Idéaliste, oui car je pense que l’on peut changer la société. Idéaliste mais conscient ! ce n’est pas facile tous les jours.


    • FALCO FALCO 24 février 2010 13:47

      Cest sur faut changer l’école.
      L’orientation surtout
      Lorsque l’on voit en lycée des triplants ou en universités des glandus qui viennent prendre les bourses et vivre dans un campus au détriment d’étudiants méritants mais sans argent...
      L’éducation comme les prisons coutent chers aux contribuables.
      Faudrait voir de travailler sur le rapport qualité / prix avec un peu plus de sérieux.
      Les GVT successifs sont irresponsables.


      • @lbireo @lbireo 24 février 2010 14:48

        la réforme actuelle semble vraiment aller à contresens.

        au lieu de supprimer des postes, il faudrait en créer, des classes moins surpeuplées permettent un meilleur accompagnement par les enseignants. ceux qui rencontrent des difficultés doivent être encouragés et aidés, plutôt que d’être laissés pour compte comme c’est de plus en plus le cas.

        on devrait aussi chercher des solutions pour faire découvrir ou redécouvrir le plaisir d’apprendre aux élèves, il faut leur donner le désir d’avancer ! les niveaux scolaires remonteraient.

        baisser les niveaux d’exigence des examens pour que davantage d’élèves les réussissent. ça peut paraître gentil, mais cela risque de tirer les niveaux de l’éducation vers le bas.

        entre cela et la culture qui se fait de plus en plus rare à la télé (émissions de télé poubelle en hausse pour « augmenter le temps de cerveau disponible pour la pub »)

        ce qui est montré dans le film idiocracy risque d’arriver plus vite que prévu et notre avenir ressembler à ça : http://www.agoravox.tv/actualites/politique/article/voici-les-prochains-tests-de-qi-24555

        franchement déprimant...

        @ watchtower

        l’idéalisme n’est pas une mauvaise chose, il fait partie de la nature humaine.

        sans ce souci d’améliorer sans cesse les choses on en serait encore à la préhistoire ou au moyen âge (même si à la longue ça risque de pendre aux nez de nos descendants)


        • Fred le Zèbre Fred le Zèbre 24 février 2010 21:08

          Merci pour ce lien.

          L’idéalisme est à mon avis une bonne chose. Mais, comme le dit Guy Corneau, il est important de ne pas faire cet idéal un but à atteindre. Le principal est la mobilisation de l’énergie produite par l’idéal et non l’atteinte de cet idéal « cette mise en action produit une sensation de bonheur bien indépendamment de la réalisation ou non des idéaux projetés. ». (http://zebres.eu/blog/l%E2%80%99homme-et-la-societe-jeux-de-miroirs-23/2009/11/07/)

          Cette vision de l’idéalisme permet de rester vivant dans l’action, surtout quand les résultats tardent à venir.


        • FALCO FALCO 24 février 2010 15:53

          inutile de creer des postes pour des « étudiants » qui se foutent des études.


          • jesuisunhommelibre jesuisunhommelibre 24 février 2010 20:17

            Depuis 1974, la dépense éducation a progressé plus vite que l’inflation. Pourtant, les résultats ne sont pas à la hauteur (15è rang des pays de l’OCDE, largement derrière la Finlande, la Corée du Sud, Hong Kong, Canada, Japon et l’Irlande).

            Il ne s’agit donc pas d’un problème de moyen, mais bien d’un problème de structure.

            Tant que l’école sera ce grand machin monolithique, censé être adapté à tout le monde et donc adapté à personne, si ce n’est ceux qui sont bien dans le moule, elle ne pourra évoluer.

            « Small is beautuful » devrait être la devise. En plus d’une offre diverse et variée, offrant le maximum de choix et adaptée, par sa diversité, au plus grand nombre.


            • Fred le Zèbre Fred le Zèbre 24 février 2010 21:11

              Il ne s’agit pas que d’un problème de moyen, mais la France n’investit plus assez dans l’éducation comme le montre l’étude faite par le ministère. De plus, pour conduire une réforme, indispensable, il est nécessaire d’investir, ne serait-ce que pour créer l’adhésion des parties prenantes.

              Aujourd’hui la réforme consiste à réduire les heures de cours pour pouvoir réduire les effectifs smiley


            • Jean 28 février 2010 21:01

              Cela me paraît un peu gênant de prétendre donner des conseils sur ce que doit être l’école et de faire tellement de fautes d’orthographe ! 

              D’autre part, je répondrai à jesuisunhommelibre que je suis de son avis : l’école française ne souffre pas d’un quelconque « manque de moyens », mais du gaspillage de ces moyens. En effet, sous l’influence de certains « pédagogues » (qui d’ailleurs se gardaient bien d’être enseignants, car ils n’auraient pas tenu cinq minutes devant de vrais élèves), l’école française est devenue un terrain d’expériences pédagogiques tirées par les cheveux dont les élèves font les frais. Pour ceux qui ignorent la situation, je précise que les enseignants ne doivent plus « enseigner », mais « accompagner » l’élève, qui est censé construire son savoir par lui-même. Résultat : les élèves sortent de primaire en ignorant , entre autres, la langue française, ils sortent du collège en ignorant la langue et la littérature française et ils sortent du lycée guère mieux armés, ce qui fait qu’ils se cassent la figure en première année de fac et que les employeurs s’arrachent les cheveux devant leur niveau en français. Voilà le bilan !

              • Fred le Zèbre Fred le Zèbre 28 février 2010 23:00

                @Jean,

                Commentaire fort instructif et illustre une certaine vision de l’école. L’orthographe est un outil mis en place par les élites afin de préserver sa situation dominante. Parce que l’on ne maîtrise pas cette technique on n’aurait pas le droit de penser, d’avoir des idées et de les exprimer.

                Le rapport du ministre montre que, contrairement à ce que vous pensez ainsi que jesuisunhommelibre, la part du PIB consacré à l’éducation n’a pas constamment augmentée depuis 1974. Durant les 10 dernières années nous avons observé une baisse de 1 point, soit entre 15 et 20% et parallèlement le niveau d’éducation n’a plus progressé. Ceci est un renversement de la tendance précédente et montre le lien entre les moyens et les résultats.

                Cependant, je partage votre avis, ce n’est pas qu’une question de moyens. Il faut une réforme des modes d’éducation afin que l’école :

                • puisse accueillir tous les enfants.
                • soit plus ouverte sur de nouvelles approches comme le travail en groupe, la systémique et moins un bourrage de crânes.
                • donne envi aux enfants d’apprendre et leur ouvre l’esprit.
                je ne pense pas que les enfants soient plus ignorant qu’hier, ils connaissent des choses différentes que les nôtres et sont sans doute plus adaptés à la société actuelle que nous. Je pense que plutôt que ce sont les entreprises qui n’ont pas su s’adapter.

              • Jean 1er mars 2010 12:09

                Ce que j’écris, Fred, n’illustre pas « une certaine vision de l’école », mais simplement la conception de l’école « républicaine », celle qui, si on y instruit les enfants au lieu de les distraire avec les méthodes pédagogiques littéralement insensées de vos amis, leur permet de monter dans l’ascenseur social.

                Quand vous avez l’insondable toupet d’écrire que l’école ne donne pas aux enfants envie d’apprendre et ne leur ouvre pas l’esprit, vous rendez-vous bien compte de l’ânerie que vous proférez ? A moins que vous ne pensiez à l’école selon Meirieu, qui, au lieu de donner envie aux enfants d’apprendre quelque chose en leur montrant ce que sont des connaissances précises, les installe dans leur subjectivité capricieuse en les mettant « au centre », certes, mais au centre d’un désert.
                 D’ailleurs, je signale aux lecteurs de ce blog que c’est depuis 1981 que l’ascenseur social a cessé de fonctionner, très exactement depuis que Mitterand est arrivé au pouvoir et s’est empressé de sortir des instituts de sciences de l’éducation où on aurait mieux fait de les laisser continuer à délirer en cercles clos toute une piétaille de pédants et d’esprits faux qui se sont acharnés depuis 1981 à saboter tout ce qui marchait dans le système éducatif. C’est depuis cette date que le nombre d’enfants d’ouvriers a baissé régulièrement en classes préparatoires. Car si l’école devient une sorte de libre service du loisir vaguement culturel comme vous le voulez vous et vos amis, ce sont les enfants des classes populaires qui en pâtissent. Les vrais élitistes, c’est vous et vos copains.
                Quant à ce que vous dites, que l’école doit accueillir tous les enfants, où voyez-vous qu’elle ne le fasse pas ? Les « nouvelles approches » que vous appelez de vos voeux ne sont que des rêveries creuses : les parents s’en contrefichent, de vos « nouvelles approches », surtout du travail en groupe, qui consiste à ce que un ou deux élèves fassent le travail et que les autres se tournent les pouces. Les parents n’attendent qu’une chose de l’école, que leurs enfants soient moins ignorants en en sortant qu’ils n’y sont entrés. Actuellement, de ce point de vue, c’est le désastre !
                Vous croyez vraiment que les entreprises doivent s’adapter au fait que les bacheliers qu’elles recrutent sont incapables d’écrire une phrase sans faire trois fautes ? Vous plaisantez, je suppose ! Ou vous voulez justifier la stérilité de l’école des « pédagogistes », celle qui n’apprend plus rien aux élèves ?
                Enfin, l’orthographe, cher monsieur, n’est pas, contrairement à ce que vous prétendez, un privilège « bourgeois », mais une des conditions de la communication claire et facile. Je ne dis pas que vous n’ayez pas le droit de vous exprimer, mais attendez-vous, vous qui prétendez tout savoir sur la « bonne » école et passez votre temps à démolir l’école que vous haïssez, celle qui apprenait aux enfants quelque chose de solide, à ce qu’on vous en fasse l’observation !

                • Fred le Zèbre Fred le Zèbre 3 mars 2010 19:30

                  Jean :
                  L’école dont vous parlez est l’école que j’ai eu la chance, ou mal chance de connaître, c’est une école dont la conception remonte au début du XXème siècle. C’est l’école d’avant Mitterrand comme vous le dite, mais aussi d’avant Giscard. C’est une école dans laquelle apprentissage rime avec effort et où tout notion de plaisir est suspecte. C’est une école où on confond mérite et pénibilité. C’est une école castratrice qui nie la créativité, les différences. C’est sans doute l’école Républicaine au sens de Jules Ferry, mais nous sommes plus au XIXème et cela fait 10 ans que le XXIème a commencé. Ce n’est pas l’idée que je me fais de l’école républicaine d’aujourd’hui.

                  Contrairement à ce que vous semblez croire, je suis le fruit de l’école près Giscardienne qui, si je n’avais pas été d’un milieu favorisé, m’aurait mis au rencard car inadapté au système ! Comme nombre d’enfants précoces. Je n’ai dû mon salut qu’à ces esprit faux qui selon vous se sont acharné contre l’école et aux fameuses écoles nouvelles de monsieur Montessori. Sans elles, je ne serais pas aujourd’hui dirigeant d’une société du CAC40. Mes responsabilités actuelles me permettent d’affirmer que l’un des enjeux des grandes entreprises est de s’adapter aux enjeux du XXIème siècle et que de ce point de vue elles ont la nécessité de recruter ces jeunes incapables d’écrire. Votre remarque est typiquement française, pensez-vous que la valeur du créateur de Google, facebook soit la maîtrise de l’orthographe, MDR comme dit ma fille smiley Quand aux remarques sur mon orthographe, je vous remercie de votre sollicitude. Elles m’ont certainement blessé, mais la performance se mesure plus sur les résultats que sur la forme.

                  Mais cela n’éclaire que le passé et ne dit rien d’aujourd’hui. Je ne parlerais pas de théorie mais relaterais des faits. J’ai la chance d’avoir une fille qui va bientôt passer son Bac, une fille de plus qui n’a aucune difficulté scolaire, à la différence de son père, mais qui trouve l’école particulièrement ennuyeuse. Elle a eu la chance d’avoir des parents ouverts qui ont cherché une école avec un projet éducatif centré sur l’épanouissement des enfants et qui arrive bon an mal an à avoir un taux de succès au Bac de 100% ! Comme quoi épanouissement n’est pas contradictoire avec résultat scolaire. Elle a la chance d’avoir des parents qui lui ont permis de choisir une orientation qui correspondait à ce qu’elle aimait sans lui imposer la S qu’elle aurait pue suivre sans difficulté. Mais pour ce faire, nous avons été obligés de la sortir de l’école publique, idée qui allait contre nos principes ; mais que sont les principes par rapport au bonheur ! Mon souhait est que l’école de la République offre la même chance à tous les enfants. Vous voyez, ma vision de l’école républicaine est aux antipodes de la vôtres.

                  Mais n’est-ce pas notre diversité qui fait notre richesse.


                  • Jean 5 mars 2010 11:23

                    Que l’école publique, qui est censée élever le niveau de connaissances de toute la population scolaire, n’ait pas les moyens de se préoccuper spécialement des enfants « précoces », et que ceux-ci trouvent l’école ennuyeuse, au point parfois qu’ils passent pour des cancres, c’est évident. Mais comment voulez-vous concevoir autrement une école de masse ? La personnalisation réclamée à cors et à cris par de bons apôtres pour qui l’argent public doit couler à flots est une utopie budgétaire. L’enseignement est collectif, et on ne peut guère imaginer qu’il en soit autrement.
                    En fin de compte, vous n’êtes pas le produit de l’école publique puisque vous nous expliquez que précisément vous devez votre « salut » à l’argent de vos parents, qui leur a permis de vous tailler une éducation sur mesure à laquelle, dites-vous, vous devez votre réussite. Très bien ! Tant mieux pour vous ! Vous avez d’ailleurs mis à profit votre propre aisance pour donner à votre fille une éducation d’élite, personnalisée, sous le prétexte qu’elle « s’ennuyait au lycée ». Je ne vous en blâme pas, c’est de bonne guerre. Mais entre nous soit dit, est-ce un si grand drame, quand on est bonne élève, de « s’ennuyer au lycée » ? Ce sont des années qui passent, puisque leur visée, c’est la fac, et de plus, même au lycée, toutes les heures ne se ressemblent pas. Il y en a forcément où l’on ne « s’ennuie » pas.
                    Ce qui me gêne, donc, dans vos propos, c’est la caricature que vous brossez de l’école publique, qui aurait selon vous, toutes les tares : vous dites que toute notion de plaisir y est suspecte. Ce n’est pas vrai, car il y a, pour un enfant, du plaisir dans le fait même d’apprendre. Aristote disait que « tout homme désire par nature savoir ». Apportez des connaissances aux enfants et vous les rendez heureux ipso facto. D’ailleurs, vous avez observé comme moi que les enfants « se jettent » littéralement sur les connaissances. Il y a un bonheur en soi à s’instruire.
                    Par ailleurs, vous savez aussi que les enfants n’étant pas des adultes, ils n’ont pas forcément à tous moments le sens de ce qui leur véritable intérêt et que , comme le dit La Bruyère, « ils cherchent par nature le point faible de leurs éducateurs ». D’où la nécessité de certaines contraintes dans le cadre d’un enseignement de masse : les règles de discipline, les leçons, les devoirs. Parfois, ces contraintes sont ressenties comme pénibles, enquiquinantes, pour ne pas employer un terme plus trivial. Comment voulez-vous faire autrement ? Et puis, donner le sens de l’effort, cela fait partie aussi de l’éducation, non ? Pouquoi serait-ce le domaine réservé de l’éducation physique ?
                    Vous dites que l’école est castratrice, qu’elle nie les différences. Je ne crois pas. Elle essaie de donner à chacun, dans la limite des moyens budgétaires qui sont les siens, les bases qui lui permettront de s’épanouir dans sa vie personnelle et professionnelle.
                    Contrairement à ce que vous dites, l’école publique française est centrée sur l’élève , puisqu’elle lui donne les bases de son autonomie future. En cela, elle n’a rien de rétrograde, elle est profondément moderne et tournée vers l’avenir.
                    Que votre fille se soit sentie plus épanouie dans le privé ne m’étonne pas. Si vous rassemblez dans une même école des enfants issus de milieux aisés et en général cultivés, il est évident que vous pourrez y organiser l’enseignement d’une manière différente, puisque l’école sera le prolongement de la famille où les bases auront pratiquement déjà été acquises. Pas étonnant que votre fille se soit trouvée plus épanouie dans la compagnie de ses pairs (ou de ses paires).
                    Mais encore une fois, je vous le répète, ce n’est qu’une différence de style entre l’école publique et l’école privée, pas d’objectifs ni d’efficacité.
                    Quant à l’orthographe, excusez-moi si je vous ai blessé. C’est vrai que je vois rouge quand je crois détecter quelque part , en sous-main, l’inspiration de ceux qui , selon moi, ont fait le plus de tort à l’école de la République en s’efforçant de tout y démolir pour ne rien reconstruire , à commencer par un certain Meirieu (lequel, soit dit en passant, a bien pris soin de ne distiller ses conseils que loin des élèves réels, c’était plus prudent)...
                    Je ne déifie pas l’orthographe, je dis simplement que c’est , en France, une des conditions de la communication aisée et claire et que cela, vous n’y pouvez rien, ni moi non plus. Vous ne pouvez pas me reprocher d’être Français, quand même ! C’est comme ça, et il faut faire avec. Que des exceptions se fassent des postes en or sans savoir écrire, cela peut arriver (Guy Degrenne...), mais pour les enfants du peuple, la maîtrise de l’orthographe représente un atout nécessaire.
                    Vous voyez qu’en définitive nous avons certainement, vous et moi, la même vision ambitieuse de l’école. La seule différence, c’est que mon idéalisme à moi peut-être plus réaliste.
                    Vous vous êtes bien douté, je pense, que si je parle ainsi de l’enseignement public, c’est que j’y officie (comme agrégé, d’ailleurs).
                    Bien à vous.

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Fred le Zèbre

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