Génération Club Dorothée
Il y a des générations qui ont été marquées par des événement très forts, que ce soit (malheureusement) par les guerres ou encore des grands mouvements de contestation (Mai 68). D’autres sont plus difficilement caractérisables, entre deux eaux. Et certaines, enfin, sont marquées par des symboles dont l’évocation trouve un écho en général très fort chez les gens qui appartiennent à cette génération et que les autres ne comprennent pas (voire les trouvent ridicules).
La génération à laquelle j’appartiens a donc été marquée par ce formidable programme pour enfants qu’a été le "Club Dorothée". Encore aujourd’hui, l’un de nos jeux favoris est le blind-test sur les génériques de dessins animés et nous ressentons toujours une pointe de mélancolie à l’évocation des ces années d’insouciance. Je la situerais de 1979 à 1984 (mais probablement, des gens nés un petit peu avant et un petit peu après se retrouveront dans les lignes qui suivent).
Bien plus que cette simple émission, nous possédons quelques caractéristiques qui nous différencient de nos ainés et cadets et qui font que nous sommes souvent mal compris. J’espère que certains se reconnaîtront un peu dans ce texte et que d’autres, plus vieux, réussiront à mieux nous cerner.
Travail
Notre conception du travail est très différente de celle de nos aînés. En effet, nous sommes la première génération pour laquelle il est tout à fait normal (voir systématique) de commencer la vie active par une période de chômage. Totale inversion par rapport à nos parents pour lesquels il était exceptionnel d’être au chômage (ou alors il fallait vraiment "pas être aidé").
Ensuite, pour nous, le travail n’est pas une vocation (au contraire de nos aînés pour qui le travail est souvent en 1e place, ex æquo avec la famille), sauf si, pour les plus chanceux, nous avons fait de nos passions notre gagne-pain, mais cela est rare. Donc, pour la plupart, le travail n’est pas notre raison de vivre, mais juste un moyen. Un moyen pour accéder à des ressources et satisfaire les besoins que nous plaçons au centre de notre vie. En effet, nous ne plaçons pas le travail à cette place, mais seulement à la périphérie (moins je passe de temps au boulot, mieux je me porte). Nous sommes d’ailleurs à ce titre souvent traités de "branleurs". De notre côté, nous ne comprenons pas nos chefs (ou parents) qui passent plus de 12 h par jour à leur travail.
Famille
Nous sommes également de cette génération pour qui le divorce des parents est courant (les gens n’ont plus honte). Beaucoup sont donc issus de familles recomposées. Un des effets est que le mariage n’est pas aussi sacré pour nous qu’avant (la faute aussi à une baisse de foi notable). Nous ne sommes donc pas encore mariés pour la plupart (ça commence tout juste), nous le serons probablement tard, voire jamais. De la même manière, la plupart d’entre nous pensent qu’ils auront des enfants relativement tard (souvent pas avant 30 ans).
Patrie
Le sentiment patriotique est très peu développé chez nous et nous avons tendance à posséder un certain irrespect envers les autorités. En effet, nous sommes la première génération à ne pas avoir fait de service militaire. Nous avons également eu très peu de contacts avec des personnes ayant fait la guerre et connu les restrictions qui vont avec. Du coup, nous sommes une génération d’enfants gâtés et insoumis.
D’ailleurs, nous commençons tout juste à nous intéresser vraiment à la politique : nous ne sommes, par exemple pas syndiqués et, jusqu’à présent, notre vision se limitait bien souvent aux Guignols, eux aussi ayant marqué fortement notre génération. Bah oui, on commence tout juste à bosser et on se rend compte qu’on se fait piller par l’Etat et qu’en plus on ne va pas avoir de retraite, alors on se réveille (nous avons aussi été traumatisés par le FN au 2e tour en 2002, certains avaient même pensé à s’exiler à l’étranger).
Culture
Notre fait historique et culturel le plus marquant est la victoire de la Coupe du monde de football par la France en 1998.
Eh oui, au niveau culture, que l’on appelera "classique", nous sommes relativement limités : histoire, politique, grands courants de peinture, sculpture, litérature, philosophie... restent de très vagues souvenirs, des notions pour la plupart d’entre nous. La faute à nos professeurs nous répétant sans cesse que nous étions pires et plus nuls que les classes d’avant nous. A force, nous avons fini par y croire (bon ok, c’est un peu une vengeance personnelle, mais il y a du vrai).
A contrario, et bien que nous n’en soyons pas les créateurs, nous avons pris part (et prenons toujours part) à l’essor de pas mal de cultures dites alternatives, hip hop et musique électronique en premier plan. Nous avons donné leurs lettres de noblesse aux sports de glisse et au Freeride, aux Graph, aux rave party, au scratch battle, à la nouvelle scéne rock française, etc, etc, etc. Nous détestons d’ailleurs la majeur partie de la variété française et, bien que les premiers participants aient été de notre génération, la Star’ Ac fait peu rêver chez nous. D’ailleurs si vous cherchez des idoles issues d’autres générations chez nous, regardez du côté des Renaud, Brassens, Coluche ou Gainsbourg (Johnny y est pluôt rare).
Nous sommes relativement ouverts au niveau de la mixité culturelle, la cause notamment à un de nos dessins animés référence : "Les Mystérieuses Cités d’or" (Il est d’ailleurs dommage qu’un programme de cette qualité ne passe plus - 3 héros d’origines différentes, il n’y a plus d’équivalent aujourd’hui L ). En plein dans la mouvance Erasmus, le voyage nous fais fantasmer et nous avons une assez large tolérance et ouverture au monde.
On pourra également citer que, en vrac, McDo est considéré chez nous comme un repas normal (souvent les lendemains de cuite d’ailleurs), nous avons tous collectionné des vignettes Panini et des Pin’s, nous avons été traumatisés par les luttes des politiques contre les dessins animés qui nous ont définis. Quand on nous dit allo, nous répondons à l’huile, nous avons notre propre argot (relou, meuf, il assure grave ce keum, ...) , Clint Eastwood et Woody Allen ont pour nous toujours été vieux et nous avons toujours connu le Sida.
Technologie
Nous sommes, dans cette catégorie, la génération qui a grandi en même temps que les ordinateurs et les consoles de jeux vidéo. Nous avons fait nos armes sur les Amiga et les Amstrad 6128+, avons arbitré la guerre entre la Megadrive - Sega et la Super Nes - Nintendo pour finalement plébisciter Sony et sa Playstation.
Nous sommes aussi les premiers à avoir fait intégralement nos formations post-bac sur des ordinateurs que nous maîtrisons parfaitement (nos aînés ont d’ailleurs du mal à se faire aider quand ils ont des problèmes).
Conclusion
Voilà, c’était un panorama rapide de ce qui a constitué notre jeunesse, nous qui rentrons peu à peu dans l’âge adulte (que l’on refuse assez d’ailleurs). Mais, peu à peu nous faisons notre place, et ce, bien que nos perspectives d’avenir ne soient pas des plus lisibles actuellement.
Je salue encore une dernière fois Arianne, Jacky, Corbier, Patrick et bien sûr Dorothée, leur souhaite une bonne retraite, et les remercie pour ces rêves qu’ils nous ont transmis avant !
Ciao les vieux !
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