L’extrême droite et les écologistes : des connivences idéologiques
Historiquement, l’écologie politique a été préemptée par la gauche, qui a enfanté un courant hier appelé Les Verts, aujourd’hui EELV. Toutefois, ces dernières années, cette thématique et les valeurs qui lui sont liées tendent à être confisquées par des mouvances extrémistes, de droite… et de gauche.
Un retournement de valeur ou un retour à la normale ?
Dans les années 1970, les « paysans du Larzac », portaient des thématiques antimilitariste, de désobéissance civile et de retour à la terre (altermondialiste dirions-nous aujourd’hui) : la paysannerie, le combat contre l’ordre établi et le système… Et ces idées ont abreuvé une génération de militants écologistes, comme José Bové.
De cette tradition contestataire, les écologistes ont gardé une vision réductrice de l’agriculture, focalisée sur les pesticides, les OGM, le productivisme, etc. Bref, le modèle agricole actuel est, selon eux, représentatif des maux de notre société, sans parler du réchauffement climatique.
En parallèle, depuis quelques années, l’extrême droite, en tout cas certains courants, s’est nourrie des thèses développées par les mouvements écolo. On pourrait croire que cela est nouveau. En fait, il existe un balancier constant, à travers les décennies, pour savoir qui aura le monopole politique sur le monde paysan.
En effet, l’extrême droite a toujours présenté la France comme une nation agricole (« la terre ne ment pas » comme disait Pétain). Et encore aujourd’hui, une partie de l’extrême droite parle de terroir, fantasme sur le monde paysan et ses traditions, sur la France campagnarde et éternelle…
Il n’y a qu’à lire les discours de Marine Le Pen : « défense de l’agriculture de proximité », propositions pour une « écologie patriote »… En clair, le FN célèbre le monde paysan, « à échelle humaine » et s’oppose au « modèle productiviste ». Pour Marine Le Pen, « la disparition des paysans ne peut qu’accélérer la destruction de notre patrimoine écologique ».
De fait, il existe à la fois une proximité idéologique entre écologistes et l’extrême droite contre un progrès qui corromprait la Nature et l’Homme, mais également une forme de braconnage de la part de l’extrême droite car l’écologie est une valeur porteuse, électoralement et sociétalement parlant. Il faut donc se l’accaparer.
Le combat contre les OGM phagocyté
La récupération du combat anti OGM, jusqu’ici majoritairement mené par les écologistes, est un cas d’école. Plus précisément, la technologie CRISPR-Cas9 est ciblée – autant par les antis OGM que par les antis « bébé OGM » – pour mettre en garde contre les manipulations génétiques : des graines d’un côté, de l’embryon de l’autre.
Pourtant, le progrès scientifique est essentiel pour sauver des vies, des enfants à naître, porteurs de maladies génétiques graves. Sans modification de leur génome, ils seraient condamnés. Ce que tend à oublier l’extrême droite religieuse, qui a pris la tête de ce combat contre le « bébé OGM ».
Notamment, la Fondation Jérôme-Lejeune, anti avortement et proche de l’Opus Dei, ou encore le site Gènéthique, qui se présente comme un site d’informations neutre sur les biotechnologies. Avec l’aide de Tugdual Derville, un des principaux animateurs de la Manif pour Tous et porte-parole d’Alliance Vita (association ‘pro-vie’), ils initient et relaient une pétition contre « le bébé OGM ».
Tous ces acteurs se connaissent et se soutiennent. Par exemple, le directeur de la publication du site Gènéthique, Jean-Marie Le Méné, est le président de la Fondation Jérôme-Lejeune depuis 1996. Sans oublier qu’ils partagent les mêmes locaux.
En liant le combat anti « bébé OGM » à celui contre les OGM, les antis IVG mettent en lumière les connivences réelles et la conjonction d’intérêts avec les écologistes : politiquement séparés, certes, mais idéologiquement proches dans leur combat contre le progrès. En clair, les modifications génétiques, quelles qu’elles soient (sur les plantes, les êtres humains, les animaux), c’est mal !
Pour la Nature et l’Homme, contre le Progrès
Ainsi, écologistes et mouvances d’extrême droite se rejoignent dans un combat anti progrès, qui seraient, selon eux, l’anéantissement de la Nature et de l’Homme. Pour s’en convaincre, il suffit de regarder les actions de l’IPSN (Institut pour la Protection de la Santé Naturelle), lobby proche de l’extrême droite et promu par Civitas, parti d’intégristes catholiques.
Une alliance de fait, donc, qui tend à se renforcer ces dernières années. Et que ni Nicolas Hulot, ni Yannick Jadot, ni Corinne Lepage n’osent affronter. Et que dire du probable futur candidat socialiste Benoît Hamon ?
15 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON