Oui, mais cette montée de l’apparence, évidente, est-elle forcée ou naturelle ?
Il y a plus de soixante ans l’emploi était majoritairement agricole. Puis il devint majoritairement ouvrier. Aujourd’hui, je crois que le secteur des services occupe 70% du marché du travail - chiffre de mémoire. Résultat évident : un coiffeur, une caissière, n’importe quel chargé de clientèle se doit d’être plus présentable qu’un charpentier ou un accrocheur de poulet. L’apparence compte plus car le social donc la présentation compte plus.
Qu’une entreprise préfère l’apparence à la qualification, je n’y crois pas sans raison. A l’heure du rendement maximum, de la recherche du profit, où l’être humain est vu comme une ressource, on se moque de la beauté - thème de l’article, fort différent de l’apparence - sauf si celle-ci permet plus de profit. Ainsi dans la vente, dans l’accueil.
Si, dans le contexte social que vous connaissez, le smicard moyen préfère paraître qu’être, il est fort différent du mien. Dans le mien le smicard survit d’abord, enchaîne les petits boulots qu’on lui donne, où l’apparence ne joue pas - de l’agro-alimentaire aux travaux publics. Dans les rares emplois intéressants qu’il reçoit, il fait un réel effort de présentation : c’est normal, il veut s’en sortir.
La réalité n’est pas aussi bourgeoise que celle qu’en donne les médias. Si vous vous trouvez dans un milieu bourgeois, sachez simplement que la réalité est plus contrastée.
Dernier point : la fierté. Durant la seconde guerre les femmes, privées de maquillage, se piquait le bout d’un doigt pour utiliser le sang comme rouge à lèvres et fard à joue et utilisaient un crayon pour simuler la couture d’un bas sur leurs jambes. La fierté est une forme de résistance face à la réalité mais cette fierté n’est pas engendrée par les médias. Beaucoup de jeunes ayant obtenu leur premier emploi stable s’empressent de faire un prêt pour s’acheter une belle voiture. Achat inutile, déraisonnable ? Non : cela conforte leurs egos, donne une raison de vivre, augmentera leurs probabilités de rencontrer « l’amour » et de fonder une famille. Achat irréfléchi ? Sûrement. L’homme doit de temps en temps être irrationnel - sinon, est-il encore Homme ?
Les médias sont devenus ce qu’ils sont en grande partie naturellement. L’Homme agit en grande partie naturellement. Pas de complots, pas d’artifices. Peu de raison : c’est la nature humaine.