La jeunesse, un malaise dépassé ?
Petite rétrospective... En avril 2002, le taux d’abstention des jeunes de 18 à 25 ans est le plus fort jamais connu. Les jeunes ne sont pas allés voter, ou n’ont carrément pas pris la peine d’aller s’inscrire sur les listes électorales. Juste mais stupide désintéressement de la politique, après que la politique s’est désintéressée d’eux... Les traditionnels « on ne compte pas, alors on ne décide pas » et « tous les mêmes, tous pourris » flottaient dans les esprits de cette couche de la population. Mais là, surprise, Le Pen est au second tour. On assiste à une gifle efficace qui réveille les consciences, comme on se réveille d’un malaise. Le malaise a-t-il disparu ?
Le chômage et les 18-25 ans
Il n’y a rien à faire, c’est une histoire d’amour entre le chômage et les 18-25 ans. En effet, depuis pas mal de temps déjà, cette tranche d’âge est l’une des plus touchées par le chômage avec les seniors - on remarque au passage le tour de force que la France réussit en ayant un problème grave de chômage à la fois avec les jeunes et aussi avec les plus âgés. Un jeune ayant fini ces études ne trouve pas d’emploi avant au moins huit mois, tous diplômes confondus. Par la suite, il accumule même assez souvent un certain nombre de CDD, stages, formations, peu ou pas rémunérés, et surtout, pas stables. Alors pour parer à ce phénomène alarmant - une jeunesse qui se désespère et qui reste désoeuvrée, ça fait mauvais genre en Europe - le gouvernement retrousse ses manches et sort - de la manche justement - un contrat miraculeux, le contrat Ppremière embauche qui, contrairement à ce que laisserait supposer son nom, ne permet pas de trouver un premier emploi comme tremplin, mais un éternel "nouveau job", la date de péremption du jeune étant de deux ans, pas plus. Arrive ce qui devait arriver, trois millions de personnes dans la rue, un recul du gouvernement après des mois de conflits, des facultés bloquées, des lycées en grève et des discussions tardives et inutiles. Bref, toujours est-il qu’on en est au même point : les jeunes sont toujours frappés par le chômage, et la flexisécurité européenne que la France devrait mettre en place pour les garder chez elle et leur garantir un travail est au point mort.
Les jobs étudiants
Pour rester sur le rayon travail, il y a une période de sa vie où le jeune trouve aisément du travail, c’est quand il étudie. En effet, si ses parents ne peuvent totalement et complètement subvenir à ses besoins, et surtout s’il a quitté le domicile familial pour vivre dans une autre ville, le jeune va devoir travailler pour financer d’une part ses études, de l’autre sa vie (logement, nourriture, carburant...), parce que la bourse n’a jamais payé tout cela. A ce moment-là, il s’offre à lui un large panel de jobs plus ou moins déclarés, plus ou moins payés, plus ou moins arrangeants pour ses conditions d’études. Bref, le fast-food, le snack, les cours particuliers, la pizzeria, la manutention et pour les plus chanceux, la vente. En somme, avec ce genre de boulot, c’est une exploitation garantie, une paye faible, et des examens de fin d’année difficiles à cause de la fatigue et du manque de temps pour réviser. Pas idéal, quand on est à une période de sa vie où on joue en partie son avenir.
Le logement
On arrive au meilleur : le jeune et le logement. Alors quand il étudie, il a encore la possibilité de la cité U où il y a à boire et à manger, passant de la cité U dernier cri, proche du centre ville et des lieux d’études, à celles où les fils électriques sont dénudés dans certaines chambres (Vous ne me croyez pas pas ? C’est du vécu pourtant...). Je vous passe le fait qu’il n’y ait pas assez de places pour tout le monde, qu’il faut faire sa demande des mois par avance et qu’on n’est jamais sûr de rien. Sinon, il vous reste le choix du studio à louer (exorbitant ! Non, mais j’ai une paye d’étudiant !), de la colocation ou du logement chez l’habitant (là, on croise vraiment de tout, y compris la vieille dame cardiaque qu’il faut veiller la nuit). Une fois les études finies, pour le logement comme pour le travail, rien ne s’arrange, tout s’aggrave ! Les propriétaires ne louent pas aux jeunes au chômage (comme à tous les chômeurs), ni aux jeunes en CDD, ni aux jeunes fraîchement employés, ni aux jeunes qui n’ont pas deux voire trois cautionnaires. Bref, en conclusion, ils ne louent pas aux jeunes : tsss, c’est une question de confiance !
Pour finir, je sais que j’enfonce des portes ouvertes, que les gens le savent (ah bon ?!) ou s’en doutent (peut-être ?), mais le constat qu’il faut tirer de tout cela, c’est que rien n’est réglé. Les réclamations des jeunes en 2002 sont identiques en 2007, et elles semblent à peine plus écoutées. Dans un souci électoraliste, les présidentiables cherchent à tendre l’oreille, mais entendent sans écouter, sans entreprendre, sans proposer. Ils ne pensent pas à la désillution qu’ils ont créée, et qu’ils continuent à créer dans une couche de la population qui doit prendre leur relève plus tard. Alors, voici, en conclusion, deux souvenirs précis, qu’il faut garder à l’esprit pour avoir une raison de prêter un peu d’attention à leurs revendications : souvenez-vous qu’ils peuvent vous éviter l’effroi et la déconvenue d’avril 2002, et souvenez-vous qu’en les sortant de leur crise, vous sortirez assurément la France de la crise.
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