La commune de la Courneuve a décidé de saisir la HALDE. Pour la 1ère fois, la haute autorité de lutte contre la discrimination reçoit une plainte émanant d’une commune. Le Maire Gilles Poux interpelle les 150 villes de France, ayant des problèmes de même nature, de fédérer leurs forces et de proposer des solutions.
De nombreux concitoyens vivent ou travaillent dans ces villes défavorisées.
Certains d’entre eux connaissent cet arrière goût de discrimination territoriale aux outremers et ils n’ont pas pu échapper à cette règle dans l’hexagone. Fort longtemps, le gouvernement ne souhaitait pas traiter la racine des difficultés de nos régions respectives et de nos villes ou citées défavorisées.
Par exemple :
· On constate l’inégalité de traitement entre territoire par l’octroi d’une dotation financière de continuité territoriale entre les DOM et la Corse.
Total DOM : 22 874 424 euros
Corse : 172 988 000 euros
Nos amis Corse se voient être 7,6 fois mieux dotés que la totalité des DOM avec sa population de 200 000 habitants.
· Le revenu imposable mensuel moyen d’un habitant de la Courneuve était en 2005 de 875 euros, soit la moitié du revenu moyen en Ile de France, près de 15% des ménages sont allocataires du revenu minimum d’insertion et en 2008, le taux de chômage était de 12,8% contre 6,5% pour la région Ile de France.
Le résultat d’un désintéressement du politique, à améliorer la cohésion sociale dans ces milieux, se solde par une augmentation des violences et des marchés parallèles.
Peut-on quantifier l’ampleur et les conséquences de la discrimination territoriale sur les ultramarins ?
La politique française a organisé la ghettoïsation en utilisant le travail des offices HLM, afin de diriger les familles pauvres mais aussi de couleurs (Le Monde 30.09.08 : La ghettoïsation est organisée).
Une grande partie des ultramarins se trouve dans ces villes de mauvaise réputation. Il serait facile de quantifier la discrimination territoriale si on se dote d’outil d’analyse visant à démontrer ces handicaps et d’autant elle reste le parent pauvre des statistiques françaises.
Bien que le gouvernement n’accepte pas actuellement les quotas ethniques. Le testing de C.V représente un indicateur assez fiable. Si on exclut les discriminations liées à l’âge, au sexe, voire au nom, (car bien souvent les ultramarins ont eu comme héritage colonial un patronyme français) il nous reste le lieu d’habitation. Le rapport indique que la chance d’accès à l’emploi diminue fortement. Donc sur ce point, les ultramarins ressentent doublement la difficulté à l’accès à l’emploi et des services à cause de la couleur et de la réputation de leur commune.
TOTAL PAR PERSONNE PAR VARIABLE
- Total par personne et par variable
- montre les degrés de discrimination dans le marché de l’emploi
Quel est l’utilité du comptage ethnique ?
La politique française a été le droit de l’indifférence pour éviter qu’un citoyen ne soit pas regardé par sa différence et qu’il bénéficie de tous ses droits sans discrimination aucune. A l’inverse, les Etats-Unis appliquent le droit à la différence. Le droit à la différence prévaut pour traiter équitablement les citoyens. Grâce à la réussite de Barak Obama qui présente une Amérique post-raciale. Le président des Etats-Unis veut en finir avec l’assignation ethnique et en retrouver le chemin de l’universalisme (Le Monde 19.12.08 : Discrimination-la juste mesure).
Résultat du droit à l’indifférence :
Le sentiment d’un échec semble unanime chez nos intellectuels. Le débat se situe entre les partisans d’un volontarisme universaliste et les partisans d’un volontariste différentialiste. Il se pourrait que les statistiques ethniques soient le cursus pour départager ces 2 idéaux :
· Les statistiques ethniques présentent l’inconvénient de laisser penser qu’il faut combattre les discriminations en fonction du nombre de discriminés et non par principe :
8% des noirs à l’assemblée nationale. Or on ne compte que 3,2% de noirs de plus de 18 ans en France donc il faudrait donc limiter 3,2% le nombre de noirs élus à l’assemblée.
· Les statistiques ethniques présentent l’avantage de ne pas nier les faits discriminatoires sur les minorités visibles et de pouvoir les composer :
Comptabiliser le nombre de diplômes de personnes noirs et en déduire le ratio entre actifs/inactifs puis les comparer avec le ratio entre actifs/inactifs diplômés de personnes blancs.
Contrairement à une idée reçue, les clivages territoriaux ne sont guère plus élevés qu’il y a 20 ans, la société française n’a jamais atteint un idéal de mixité. Ce qui change aujourd’hui, ce sont certains clivages qui tendent de se creuser. Les ghettos pauvres sont en perte de vitesse et les enclaves chics accentuent leur isolement en mobilisant toutes les ressources (Le Monde 03.10.08 : HLM, la villa Montmorency entre en résistance).
La proportion de cadre (15% de la population active) a considérablement augmenté depuis ces 10 dernières années. Ils s’accaparent des pans entiers de l’espace urbain et repoussent la classe moyenne à la périphérie des villes.
Au delà de la qualité des logements, la classe aisée cherche la qualité du voisinage.
Pourquoi cherche-t-on la qualité de l’environnement ?
Un économiste de Barkeley a réalisé une étude à Boston et en déduit que les prix des logements définissent la qualité des écoles primaires :
· Une école où les résultats scolaires sont 10% plus élevés que la moyenne. L’achat d’un logement revient à 5% plus chers. Il en résulte que les prix du logement ont un impact considérable sur la qualité des écoles.
Par contre, le fait de classer en zone d’éducation propriétaire (ZEP) enclenche un mécanisme d’évitement de la classe aisée et moyenne. Les classes moyennes fuient donc aussi progressivement les quartiers stigmatisés.
Les inégalités et environnement social
Le drame de la ségrégation territoriale, c’est qu’en conditionnant l’environnement social de chacun, elle pèse aussi de tout son poids sur le destin de chacun. Le fait que les parents ont entrepris des études courtes, les enfants n’ont aucune chance d’interagir avec les enfants dont les parents ont poursuivi des études longues D’après le recensement :
· Un adolescent dont les parents diplômés en étude supérieur, vivent en moyenne dans des voisinages où le taux de retard à 15 ans est environ de 13%.
· Un adolescent dont les parents n’ayant pas de diplômes, vivent dans des voisinages où le taux de retard à 15 ans est de plus de 56%.
· En plus, la proportion d’enfants de classes modestes dont sont issue les ultramarins en général, varie de 1 à 3 entre les 10% des collèges les moins populaires et les collèges les plus populaires :
20% d’élèves de classe modeste (ouvriers ou chômeurs) dans les collèges moins populaires.
70% d’élèves de classe modeste dans les collèges les plus populaires.
De même :
1 élève sur 6 est très en retard (au moins 2 ans de retard).
1% élève est en retard dans les 10% des collèges les plus bourgeois.
Comment parvenir à une meilleure justice sociale ?
Malgré les efforts consentis aux villes, cela reste invisible dans le contexte actuel. La concurrence des territoires ne repose pas sur un malentendu car l’endroit où l’on habite représente bel et bien une ressource et un enjeu décisif à chaque étape de la vie. Face à ce constat, 2 voies s’imposent :
· Une plus grande mixité sociale et une meilleure redistribution des ressources
· La réduction de la ségrégation urbaine, en faisant plus à ceux qui partent de plus loin, comme l’a souligné Nicolas Sarkozy.
La loi sur la solidarité et la rénovation urbaine (SRU), vote 2000, demande aux municipalités de respecter le seuil de 20% de logement sociaux. Mais les inégalités sociales qui composent les quartiers d’une même commune en sont la 1ère forme de ségrégation sociale et spatiale. Evidemment, le principe semble légitime mais l’efficacité d’une telle politique se fait à l’intérieur des communes. De plus, il faut envisager l’atténuation des craintes des familles favorisées afin d’éviter le mécanisme d’évitement.
Réponses aux problématiques :
Dans l’hexagone, une famille qui a acquis une stabilité financière doit pouvoir s’échapper des ghettos. Le gouvernement doit imposer « la mobilisation pour le logement » au politique pour que les familles stables financièrement puissent choisir leurs lieux de résidence. (A noter : bien souvent, les ultramarins qui vivent en France, ont un pouvoir de garanties de solvabilité car un grand nombre sont fonctionnaires). L’accès à la propriété rendent aux familles cette liberté qui leur ait du.
Pour l’outremer, la réduction de la ségrégation se traduit par la compétitivité des territoires ultramarins. La croissance économique dépend de projet structurant de chaque territoire. Il serait souhaitable d’appliquer équitablement la continuité territoriale aux ultramarins comme celle de la Corse, dans le but de rendre attractif ces territoires.
Comme l’a souligné Nicolas Sarkozy, le modèle républicain n’a jamais interdit de « faire plus pour ceux qui partent de plus loin ».
En plus d’être des villes en grande difficulté, la taxe professionnelle se déverse aux villes où l’activité professionnelle s’y trouve. Donc ces villes dotées d’une population de revenu correct, accumulent des richesses.
Ce manque d’équité enlève la contribution des habitants des villes défavorisées, à une meilleure distribution de ces richesses. Il s’ajoute un autre handicap. Pour répondre aux besoins de manque d’infrastructures (création de crèches, rénovation d’écoles primaires,… sont sous la compétence de la commune), les impôts locaux sont élevés et asphyxient ses populations à faible revenu. Cela suppose une redistribution équitable de la taxe professionnelle.
La mixité sociale a un effet multiplicateur. Une fois que l’on a identifié les formes de pauvreté individuelle les plus pénalisantes, la société doit faire preuve de fraternité en s’attachant à les diminuer (ex : familles monoparentales).
Dans les zones de grande précarité, le système éducatif doit proposer à la famille, un programme d’éveil et de préparation intense aux enfants de 4 ans minimum. Les américains ont fait l’expérience, connue sous le nom de Perry School Project et la réussite est telle que le gouvernement a lancé un programme à grande échelle.
Inefficacité des Zones franches :
Les exonérations de charges sociales ont permis de déplacer les entreprises (environ 50000 en 5ans) mais au détriment d’autres régions. Car les emplois perdus des villes voisines déjà en difficulté, n’ont pas pu en créer de nouvelles activités. En plus, le coût d’emplois déplacés atteint à 2300 euros par emploi donc cela revient cher à l’état. Les 20% d’embauches locales n’ont pas été correctement respecté par les employeurs. Car les obligations d’emplois locales ont été contournées par des contrats précaires. Les habitants ne bénéficient pas réellement l’instauration de nouvelles entreprises
MES RESSOURCES
Livre : Le ghetto français d’Eric Maurin
Site : observatoire de la discrimination