La tyrannie de la maternité : l’allaitement
Moi et personne d’autre ! On aura beau dire que c’est la plus belle chose au monde, et j’avoue que ce fut effectivement le cas pour moi, je reste persuadée qu’il vaut mieux ne pas allaiter si on n’est pas convaincue dès le départ d’y trouver un intérêt, pour le bébé bien sûr, mais aussi pour soi, et pour la relation mère-enfant.
Sur le site internet « Mangerbouger.fr » du PNNS (Programme National Nutrition Santé), les recommandations concernant l’allaitement sont rédigées de façon relativement simple et « objective » :
VOUS AIMERIEZ ALLAITER MAIS VOUS VOUS DEMANDER SI VOUS EN SEREZ CAPABLE ET SI C’EST
Les bonnes raisons
Votre lait est l’aliment le plus adapté pour votre enfant. Il contient tout ce dont il a besoin dès la naissance, et évolue constamment pour s’adapter à sa croissance au fil des semaines et même durant la tétée.
Il réduit les risques d’infections, notamment gastro-intestinales.
Il contribue à réduire les risques d’allergie chez l’enfant.
Il pourrait contribuer à réduire les risques de diabète ou d’obésité.
La meilleure solution pour vous aussi
L’allaitement favorise la réduction du volume de l’utérus après l’accouchement
Il aurait un effet protecteur contre certains cancers, celui du sein notamment.
L’allaitement est de loin la solution la plus pratique : vous n’avez rien à préparer, vous avez toujours tout sous la main.
C’est aussi la solution la plus économique…
Combien de temps allaiter ?
Le lait maternel (ou infantile) est recommandé de façon exclusive jusqu’à 6 mois.
Il est recommandé d’allaiter, même pour une courte période : votre enfant bénéficiera déjà des bénéfices du lait maternel. L’effet protecteur de l’allaitement maternel dépend de sa durée et de son exclusivité, cependant, quelle que soit sa durée l’allaitement sera bénéfique. Les spécialistes recommandent un allaitement maternel exclusif pendant six mois révolus et une diversification alimentaire avec la poursuite de l’allaitement maternel jusqu’à deux ans ou plus selon le souhait de la mère et de l’enfant.
En accouchant en cette fin d’année 2008, j’ai pu palper dans l’air cette « tendance » qui pousse les femmes à allaiter, cette « mode » qui revient. J’ai été plutôt chanceuse d’accoucher dans un établissement où le personnel ne mettait pas vraiment la pression aux jeunes mamans pour qu’elles nourrissent leur enfant (tout du moins de ce que j’en ai ressenti pendant une semaine). Personne, ni en salle d’accouchement, ni à mon retour en chambre, n’est venu me « faire la leçon » ou essayer de me convaincre de faire quoi que ce soit. On m’a simplement demandé si j’allaitais pour me prescrire des antidouleurs qui convenaient avec ma situation.
Mais j’avoue avoir été surprise par la remarque insidieuse d’une sage femme, lors de ma toute première nuit à
Choquée aussi qu’on attende mon troisième jour d’hospitalisation et la dégradation de l’état de ma poitrine, pour m’apprendre qu’il existait des « embouts » de silicone à poser sur les mamelons pour éviter les crevasses dues à l’allaitement… Pourquoi diable m’a-t-on regardée souffrir durant trois jours, en prenant le risque que, comme beaucoup de jeunes mamans, la douleur ne me fasse cesser prématurément mon allaitement ? C’est en changeant de chambre, d’aile dans la maternité et donc d’équipe de soins, que j’ai appris l’existence de cet « ustensile » qui m’est rapidement devenu indispensable, même si pour aucune raison au monde j’aurais renoncé à allaiter mon fils. Seulement le sang provenant des crevasses sur mes seins n’était pas bon pour lui…
Je crois que la première étape importante dans la vie de mon bébé a été le fait de passer de l’allaitement maternel aux biberons de lait artificiel. Lui ne s’en souviendra pas, mais sa maman a assez mal vécu la fin de cette période intense et privilégiée.
Avec le recul, je me rends compte que cet allaitement me tenait particulièrement à cœur. Je ne pense pas avoir subi de « pression » en lisant articles ou essais divers et variés pendant ma grossesse. Très tôt je me suis même vue en rêve en train de donner le sein à mon bébé. Dès le 5e mois de grossesse, j’ai eu des pertes de colostrum. Nous étions en vacances à la mer, j’avais trouvé ça vraiment fascinant ! Pour moi il était évident, presque logique, que j’allaiterai mon enfant, mais je n’avais aucune certitude que tout se passerait bien. On entend ou lit tellement de bêtises parfois… « Grosses poitrines = plus de lait », « petits seins = difficultés à allaiter », « pas de lait à l’accouchement = pas de lait plus tard »… je crois qu’en matière d’allaitement, mieux vaut croire en ses convictions, faire ce dont on a envie, et surtout comme on peut.
J’ai très bien résisté aux difficultés des premiers jours (douleur, crevasses, énorme fatigue…) parce que la satisfaction et le bonheur de voir mon fils téter était plus puissante que tout le reste, et cela m’a permis d’allaiter mon fils presque quatre mois, dont trois exclusivement. Par contre je ne pouvais faire mieux à cause de la reprise du travail, et là oui, j’ai plutôt mal vécu le fait de ne pas avoir personnellement choisi de stopper mon allaitement.
Mais si moi je n’ai pas le sentiment d’avoir été « contrainte » d’allaiter quelque part, d’autres femmes se sentent « maltraitées », persévèrent tout de même et vivent assez mal ces instants. Plus incroyable encore, certaines mamans se sentent culpabilisées d’allaiter (trop longtemps souvent). Deux formes de détracteurs pour une pratique tellement… personnelle. De quoi se mêlent les gens qui ne sont pas concernés ?
L’ALLAITEMENT : UN CHOIX INTIME ET PERSONNEL.
L’idéal serait de respecter le choix d’autrui et essayer de ne pas juger ceux qui effectuent un choix différent du nôtre.
Les jeunes mamans sont souvent confrontées à la violence de certains mots sensés les encourager.
C’est très bien de vouloir donner des conseils ou accompagner les jeunes allaitantes, mais si vous êtes une jeune maman qui hésite, qui a mauvaise conscience de n’avoir pas le « courage » ni l’envie d’allaiter son enfant, et que vous tomber sur le site soi-disant « référence » de LA LECHE LEAGUE (1) ou LLL (www.lllfrance.org), avouez qu’il y a tout de même de quoi se sentir un peu mal à l’aise.
Prenons ces quelques phrases par exemple, extraites directement du site :
« Dans un rapport fait pour
Enfin Sloper a montré que les femmes bénéficiant du soutien d’un groupe allaitaient plus longtemps.
Un autre intérêt des groupes de mères, c’est en effet l’augmentation de la confiance en soi qu’ils induisent chez les nouvelles mères.
Une nouvelle mère est souvent très vulnérable aux avis d’autrui. Et tout le monde se sent autorisé à lui donner son avis justement ! Fais ceci, ne fais pas cela... Avis souvent contradictoires qui plus est. Le groupe de mères au contraire ne donne pas d’avis, ne fait pas de prescription ; il donne des pistes possibles, des façons de faire qui ont marché pour telle ou telle. A la mère d’observer son bébé et de voir ce qui marche bien pour elle et lui. Le groupe de mères et son animatrice redonnent à la mère sa place d’expert en ce qui concerne son propre bébé ; c’est elle qui sait le mieux ce qui leur convient.
De plus, une mère qui revient régulièrement aux réunions mois après mois parce qu’elle continue à y trouver un bénéfice, finit sans s’en rendre compte par se trouver dans la position de celle qui aide les autres mères. Elle aussi se retrouve à faire de l’aide de mère à mère. Et cela aussi est très valorisant pour elle. »
A priori le discours dégagé paraît plutôt positif. Mais quand on s’y penche d’un peu plus près, j’y vois un contenu implicite qui me dérange. Personnellement je trouve ce court extrait :
- Très imprécis : « Dans un rapport fait pour
- Assez réducteur vis-à-vis des jeunes mamans : « Une nouvelle mère est souvent très vulnérable aux avis d’autrui. » Certes elles sont avides de conseils mais loin d’être incapables de réfléchir toutes seules. Elles ne perdent pas tous leurs neurones en accouchant…
« De plus une mère :[…] finit sans s’en rendre compte par se trouver dans la position de celle qui aide les autres mères. » On peut tout aussi bien venir en aide à son entourage propre sans pour autant adhérer à un groupe… Il y a souvent bien assez à faire devant sa porte !
- De mauvaise foi, car il véhicule de bons vieux clichés : « Et tout le monde se sent autorisé à lui donner son avis justement ! Fais ceci, ne fais pas cela... Avis souvent contradictoires qui plus est. » Il faut différencier les conversations que les femmes ont entre elles, les questions que les femmes enceintes posent elles-mêmes à leurs amies déjà maman, et les femmes qui s’autorisent conseils et autres recommandations alors qu’elles n’y sont pas invitées (personnellement je n’ai jamais eu affaire à ce genre de femmes, et pourtant des conseils on m’en a donné ! Je pense qu’ils sont tous bons à prendre quand ils sont dits par des personnes ayant déjà vécu l’expérience de la maternité).
- Contradictoire : « Le groupe de mères et son animatrice redonnent à la mère sa place d’expert en ce qui concerne son propre bébé ; c’est elle qui sait le mieux ce qui leur convient. » Effectivement la maman observe, ressent, utilise son intuition, son instinct, et elle seule connaît son bébé. L’adhérence à un groupe n’est donc absolument pas obligatoire pour acquérir les bons réflexes…
« Pas de don en maternité ! » Qu’est-ce que ça veut dire ?? QUI dit ça, où, comment, pourquoi ? Aucune référence, pas d’article de loi cité… Je suis stupéfaite d’apprendre que de
Ca me rappelle un peu ces actions violentes au service de grandes causes : AIDS contre le SIDA, les faucheurs volontaires contre la MALBOUFFE, ou GREENPEACE en faveur de l’environnement. Je ne suis pas une personne qu’on peut convaincre par la violence que je condamne systématique !
En complétant mes recherches, je suis tombée sur un article de l’EXPRESS.FR au sujet du dernier ouvrage écrit par Elisabeth BADINTER « Le conflit, la femme et la mère », chez Flammarion. Je livre ici un extrait de cet article très intéressant. Par
« DANS SON LIVRE, ELISABETH BADINTER DEPEINT
L’auteure évoque aussi un extrait d’une conférence de l’association, dans laquelle il est très clairement recommandé de "protéger le bébé contre les dangers du lait artificiel". Sachant que, d’après
Un peu violents à LLL, disais-je… Heureuse de savoir que je ne suis pas la seule à ressentir leurs propos comme des accusations ou des affirmations péremptoires.
L’ALLAITEMENT DOIT RESTER AVANT TOUT UNE CONVICTION PERSONNELLE.
Il y a des mamans qui ont de réelles difficultés physiques pour démarrer leur allaitement (problème de tétons enfoncés, de montée de lait qui tarde…), mais quoi qu’il en soit la volonté de nourrir son enfant doit impérativement venir dès le départ du plus profond de nous, et non d’un groupe de soutien, ni de l’entourage. Qu’on ait besoin d’un groupe par la suite, c’est autre chose. Que ce groupe existe afin de valoriser l’allaitement, ça c’est formidable. Mais attention de ne pas être trop violent dans sa façon d’aborder les jeunes mères… Il y a des propos qui me choquent un peu sur ce site.
J’adhère davantage avec le discours de LLL concernant la législation et le droit du travail pour les mamans qui travaillent et allaitent. Je ne connais pas d’autre organisme qui donne des informations récentes et précises à ce sujet, citant même la jurisprudence en la matière.
« Et si, loin de l’opposition entre crypto et les néo-féministes si pratique pour évacuer le sujet, les femmes d’aujourd’hui voulaient tout simplement choisir ? Pouvoir donner ou pas ce fichu biberon sans se sentir coupables ? »
Ne pas se sentir coupable ; et si c’était ça, le vrai féminisme ?
* * *
ANNEXE
UN GRAND BRAVO A CES MESSIEURS !
DEVENIR PAPA, DEVENIR MAMAN : MEME COMBAT.
Quand je dis à mon ami : « Bon, on se lance, on fait la petite sœur ! », il me répond : « Bah non, t’es pas réparée encore ! » C’est tellement mignon, j’adore cette réponse ! Et il a presque raison. J’ai accouché il y a 12 mois et je crois que mon corps se rétablit à peine des conséquences de ma grossesse et surtout, de mon accouchement (un peu éprouvant).
Mais l’un dans l’autre, je me demande lequel d’entre nous est le plus « cassé » par cette première expérience de maternité. N’oublions pas qu’un papa morfle sacrément à la naissance d’un enfant, et j’ajouterais « surtout pour un premier ». Il faut être bien accroché pour patienter 9 mois aux côtés d’une dulcinée qui se transforme de mois en mois, qui ne se sent d’ailleurs pas toujours bien dans sa peau au fur et à mesure que son corps change, dont l’humeur devient fragile, dont le ventre devient encombrant. Une fois cette première étape passée, il faut ensuite être fort pour encaisser la charge émotionnelle qu’implique un accouchement, lequel peut grandement perturber la maman, moralement et physiquement, et de fait également perturber la stabilité des nouveaux parents. Comment le papa ne serait-il pas atteint par tout ceci, même s’il vit ces événements de façon moins « intérieure » que la maman ?
Un long apprentissage, une aventure superbe, magique et effrayante à la fois.
Souvent je regarde mon petit bout, quand il est dans son bain, quand il joue dans son parc, quand il tourne les pages de ses livres, quand il se déplace sur les fesses pour aller attraper son ballon, quand il dévore son quignon de pain assis sur sa chaise haute, et je me surprends à penser : « Comment j’ai pu fabriquer ça ? Comment est-il possible d’avoir conçu la vie aussi facilement ? Comment a-t-on pu m’effrayer à ce point il y a quelques années au sujet de ma santé, alors que devenir maman a été une des choses les plus faciles à réaliser dans ma vie ? Comment vais-je faire pour ne pas m’inquiéter pour ce petit toute ma vie ? Comment vais-je pouvoir un jour le laisser partir de notre foyer ? »
Mais à chaque jour suffit sa peine ; on va d’abord lui apprendre à marcher, à parler, à ne pas tomber de vélo, et pour le reste on a encore un peu de répit pour y songer !...
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