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Accueil du site > Actualités > Société > Le besoin et le désir

Le besoin et le désir

Nous avons tous et des désirs, et des besoins. Mais il ne faut pas les confondre. Si nous avons tous besoin de désirer, nous ne désirons pas avoir besoin.

Le besoin est une nécessité vitale, une sorte d’instinct qui détermine ce qui nous manque pour rester en vie. Alors que le désir, contrairement à ce qu’on entend parfois, n’est pas une nécessité vitale. Le désir est une envie créée par notre imaginaire qui n’a pour objectif que le plaisir. Mais la satisfaction de ce désir n’est pas dans sa réalisation, mais dans l’attente. Le fait que l’on confonde désir et besoin est la source de bien des malheurs humains : croyants que leur désir est « vital », ils imaginent qu’il est un besoin qu’il faut à tout prix satisfaire, sans se rendre compte qu’une fois réalisé, il ne reste plus rien d’autre que le besoin de désirer.

Lorsque l’homme aura compris qu’avoir envie n’est pas avoir besoin, alors seulement il pourra commencer à penser autrement. Car une fois bien établie cette différence, nous serons en mesure de définir clairement en quoi la satisfaction des besoins est primordiale, et ainsi de commencer à chercher comment y pourvoir.

Car c’est bien d’économie, et de politique dont il s’agit : en nous faisant prendre les désirs pour des besoins, c’est toute la société de consommation qui se trouve remise en question. Si nous cessons de les confondre, alors nous cesserons de croire que le superflu est essentiel. Nous apprendrons que l’attente que provoque le désir est plus plaisante que sa réalisation, et il deviendra difficile de nous faire rêver avec cette entourloupe. S’il est compris que la mode, l’esthétique ou le « bling bling » ne sont liés qu’à des caprices, alors il nous sera permis de penser autrement. C’est tout un système de valeurs qui s’effondrerait.

En se focalisant donc sur la satisfaction des besoins, il serait possible de déterminer clairement, (constitutionnellement en quelque sorte), qu’une société qui fonctionne est une société qui remplit les besoins de chaque individu. On ne saurait s’arrêter là bien sûr, car je le disais plus haut : le fait de désirer est un besoin. Pas celui de désirer la liberté (c’est justement un besoin, pas un désir). Mais une société qui ne désire pas n’avance pas. il lui faut des rêves et des objectifs.

il ne s’agit donc pas de nier le désir, mais de le relativiser. Le besoin d’une société meilleure et plus juste ne doit pas amoindrir le désir, mais le consacrer pour ce qu’il est : un bien à rechercher une fois les besoins satisfaits.

En économie, on parle de besoins primaires, et de besoins secondaires. mais cette distinction existe là aussi pour brouiller les pistes, et fait croire que des objets de consommation sont essentiels ; tout cela dans le but de nous faire consommer, et participer au système.

Mais imaginons par exemple que l’épargne soit considérée comme ce qui reste de superflu une fois les besoins remplis. On pourrait sans conteste établir ce résidu comme non essentiel et devant être attribué à ceux dont le besoin n’est pas comblé.

Si chaque individu était mû par ses besoins plus que par ses désirs, il cesserait à un moment de vouloir consommer, ou même d’épargner. Les bons élèves du système capitaliste se trouvent être paradoxalement les pauvres, car ils ne visent qu’à la satisfaction de leurs besoins. Et ceux qui les remplissent aisément sont ceux qui ne sont jamais satisfaits, car ils ont définitivement perdu la notion du besoin : à force de désirer sans s’occuper de leurs besoins, ils ont fini par croire qu’amasser de l’argent va les aider à les satisfaire… et courront toujours après l’un sans contenter l’autre.


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12 réactions à cet article    


  • Francis, agnotologue JL 25 janvier 2010 10:57

    Bonnes questions.

    « La planète compte suffisamment de ressources pour répondre aux besoins de tous, mais pas assez pour satisfaire le désir de possession de chacun. » Gandhi

    10% du budget affecté aux désirs des riches suffirait à satisfaire les besoins des pauvres.

    Le libéralisme est un système qui a posé comme principe qu’il n’y aurait aucune limite à la satisfaction des désirs de ceux qui sont solvables et se moque éperdument des besoins de des pauvres.
    ..


    • Lisa SION 2 Lisa SION 2 25 janvier 2010 12:16

      Salut JL,

      " Le libéralisme est un système qui a posé comme principe qu’il n’y aurait aucune limite à la satisfaction des désirs de ceux qui sont solvables " avec cette terrible limite que je décris dans un autre article : Comment une grande star, vénérée quelques secondes plus tôt par des cris de joie et de bonheur partagé ( et de satisfaction ), peut se voir hué quelques secondes plus tard dès le moindre écart...fragilité d’un succès éphémère ??? a+.


    • Lisa SION 2 Lisa SION 2 25 janvier 2010 12:05

      Bien vu caleb,

      « nous serons en mesure de définir clairement en quoi la satisfaction des besoins est primordiale », en effet, on peut se poser la question de savoir comment un certain nombre de produits qui ne remplissent nullement cette fonction, arrivent quand même à se substituer à d’autres bien plus satisfaisants. Une fable de la Fontaine décrit très bien cet effet, c’est http://www.la-fontaine-ch-thierry.net/heron.htm . Cette chanson de Balavoine également, http://www.musicme.com/Compilation/Super-80-(Vol.1)-0685738623020.html ?play=04 .

      C’est d’ailleurs le manque de satisfaction généré par ces produits qui génère chez les insatisfaits l’éternel besoin d’en remettre une couche jusqu’à obésité mentale et ainsi entrer en fanatisme béat. Tout ceci a été parfaitement résumé dans la chanson de Francis Cabrel,

       Allumés les postes de télévision,
      Verrouillées les portes des conversations,
      Oubliés les dames et les jeux de cartes,
      Endormies les fermes quand les jeunes partent.
      Brisées les lumières des ruelles en fête,
      Refroidi le vin brûlant, les assiettes,
      Déchirées les nappes des soirées de noce,
      Oubliées les fables du sommeil des gosses,

      Arrêtées les valses des derniers jupons,
      Et les fausses notes des accordéons.
      C’est un hameau perdu sous les étoiles,
      Avec de vieux rideaux pendus à des fenêtres sales,
      Et sur le vieux buffet sous la poussière grise,
      Il reste une carte postale.

      Goudronnées les pierres des chemins tranquilles,
      Relevées les herbes des endroits fragiles,
      Désertées les places des belles foraines,
      Asséchées les traces de l’eau des fontaines.

      Oubliées les phrases sacrées des grands-pères,
      Aux âtres des grandes cheminées de pierre,
      Envolés les rires des nuits de moissons,
      Et allumés les postes de télévision.

      C’est un hameau perdu sous les étoiles,
      Avec de vieux rideaux pendus à des fenêtres sales,
      Et sur le vieux buffet sous la poussière grise,
      Il reste une carte postale.

      Envolées les robes des belles promises,
      Les ailes des grillons, les paniers de cerises,
      Oubliés les rires des nuits de moissons,
      Et allumés les postes de télévision.
      Paroles de Chansons

      Tellement vrai !


      • Gabriel Gabriel 25 janvier 2010 14:02

        Cette vie est un hôpital où chaque malade est possédé du désir de changer de lit.

        Baudelaire


        • Christian Delarue Christian Delarue 25 janvier 2010 14:12

          Le système marchand sélectionne les besoins. Il ne considère que ce qui est rentable, vendable, profitable. Les vrais besoins, santé, éducation, logement, etc... dès lors que la demande n’est pas solvable sont inconnus du système. Quand les libéraux en parlent, il s’agit de cout. Il importe d’introduire une économie non marchande de valeur d’usage qui satisfase d’abord les besoins sociaux. Il ne s’agit pas là d’une position éthique qui sélectionne les besoins. Il s’agit d’introduire des services publics qui enlève le mode de sélection marchand qui fait produire n’importe quoi dès lors que des riches achètent. Il ne s’agit pas non plus d’éliminer le marché mais de le circonscrire.

          CD


          • Christian Delarue Christian Delarue 20 février 2010 10:43

            *Herbert Marcuse, les besoins et le socialisme
            *http://www.dazibaoueb.fr/article.php?art=11008


          • NEPNI NEPNI 25 janvier 2010 14:35

            « Les bons élèves du système capitaliste se trouvent être paradoxalement les pauvres, car ils ne visent qu’à la satisfaction de leurs besoins. »

            c’est tout le contraire, beaucouples pauvres se ruent sur vers leurs désirs et non leur besoins, c’est en partie ce qui explique leur pauvreté.

            Je me concentre sur mes besoins et je peux affirmer qu’avec un peu de jugeotte on ne vit pas comme un pauvre


            • Francis, agnotologue JL 25 janvier 2010 14:45

              NEPNI, On va dire ça aux 86400 bébés qui meurent chaque jour pour cause de dénutrition !


            • NEPNI NEPNI 25 janvier 2010 14:36

              « Les bons élèves du système capitaliste se trouvent être paradoxalement les pauvres, car ils ne visent qu’à la satisfaction de leurs besoins. »

              c’est tout le contraire, beaucoup de pauvres se ruent sur vers leurs désirs et non leur besoins, c’est en partie ce qui explique leur pauvreté.

              Je me concentre sur mes besoins et je peux affirmer qu’avec un peu de jugeotte on ne vit pas comme un pauvre


              • pat30 pat30 25 janvier 2010 14:39

                A chaque fois que je vois un gros con dans un 4X4 de la même taille en ville, je me pose cette question. Envie ou besoin ?

                Chapeau quand même aux marchands de bagnoles qui persuadent les urbains que leur vie sera plus chouette avec un engin campagnard.

                On vit une époque formidable !


                • Voris 25 janvier 2010 15:01

                  Il y en a un qui a tout et même plus et qui chante : « Qu »on me donne l’envie !" Mais si, vous savez bien, un exilé fiscal...

                  Au fait, votre article, vous l’avez écrit par besoin ou par envie ? smiley Et voilà notre auteur bien embarrassé...

                  Le désir est une anticipation (*), le besoin est immédiat.

                  (*) Le désir anticipe le plaisir (et inversement, la peur anticipe la douleur ou la perte). Le besoin n’anticipe rien du tout, il est extérieur à la conscience. Sa confrontation est brutale. Si les désirs des uns n’étaient pas infinis, les besoins de tous seraient comblés. Mais voilà !


                  • clostra 26 janvier 2010 09:54

                    Merci pour cet article bien mené et sans prétention.
                    Pour s’aider dans cette réflexion qui va de la survie à l’accomplissement, on pense à la Pyramide de Maslow qui décortique la motivation et aide à comprendre l’humain mais également quelques « ficelles » du marketing fondé justement sur le désir et « joyau » du capitalisme fondé sur la consommation.

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