Le cœur a ses raisons...
Que la raison ignore. Hélas lorsqu’un mariage devient une affaire politique, l’émotion et les approximations mènent à des contresens fâcheux. Tout feu tout flamme, le petit monde politique s’enflamme contre la décision d’un juge. A raison ? Non.
Seigneur, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font ! L’annulation d’un mariage par le tribunal de Lille a plongé l’ensemble de la classe politique dans l’émotion et la surenchère sentimentale, au point d’en oublier les règles les plus élémentaires du droit et de la philosophie politique.
D’un point de vue légal, en effet, le mariage est un contrat, dont l’élément fondamental est la volonté de contracter des deux fiancés. Toute tromperie dont l’influence est importante dans la volonté de l’une des parties entraîne logiquement l’annulation du contrat, le caractère essentiel de la tromperie s’appréciant in concreto, c’est-à-dire par rapport à son importance aux yeux des futurs époux et non par rapport à une norme morale quelle qu’elle soit.
C’est une des sagesses de la loi telle qu’elle est écrite de ne reconnaître aucune morale, fût-elle moderne et libérale ou traditionnelle et rigide, athée ou religieuse. Seul le mensonge et son influence sur la volonté ont une existence aux yeux du juge. Ce que, dans leur précipitation, l’ensemble de nos politiques propose avec une unanimité qui est toujours inquiétante, est de revenir sur ce sain aveuglement de la loi aux religions et aux morales, qui est le véritable sens de la laïcité, et de confier au magistrat le pouvoir de juger des motifs personnels du mariage au nom d’une morale d’Etat.
Si demain un couple dont l’un des membres, végétarien passionné, s’estime trompé par le goût dissimulé de son conjoint pour le tartare de bœuf, faudra-t-il donc convoquer un concile de cette nouvelle religion d’Etat pour déterminer la compatibilité de la carnophobie avec les hadiths de la morale républicaine ?
La République ne reconnaît ni ne subventionne aucun culte… fût-il celui de la Raison.
Les opposants politiques à cette décision judiciaire au nom de la laïcité se placent bien plus proches d’un Combes dont l’objectif était le remplacement du catholicisme par un athéisme d’Etat que du compromis de Briand qui finalement prévalut, celui d’une tolérante indifférence aux croyances de chacun, quand bien même celles-ci seraient médiévales.
La laïcité est l’acceptation des traditions, religions et morales que nous ne partageons pas ; la lutte démagogique contre les opinions minoritaires porte un autre nom.
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