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Accueil du site > Actualités > Société > Le DIF, il va falloir passer à la caisse !

Le DIF, il va falloir passer à la caisse !

En 2008 la Cour des comptes publiait un état des comptes de la formation professionnelle assez alarmiste pointant le financement du Droit Individuel à la Formation (DIF). Elle estimait que le coût du DIF en entreprise s’élèverait à 13 milliards d’euros par an. Ces estimations impressionnantes n’émurent pourtant personne alors.

Le 14 octobre lors du vote de la Loi sur la formation professionnelle le législateur a tenté une nouvelle fois d’attirer l’attention des pouvoirs publics et des entreprises sur le krach qui guette le monde de la formation l’an prochain « Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er janvier 2011, un rapport sur le financement du droit individuel à la formation et le traitement comptable et fiscal des droits acquis à ce titre par les salariés et non encore mobilisés ».)

Même si l’estimation de la Cour des comptes nous semble passablement élevée l’ « addition » DIF risque d’être très élevée pour nombre d’entreprises dans quelques mois.

C’est bien la totalité des salariés qui sont concernés par le DIF (analogue avec les congés payés) et dés qu’il sortira du confidentiel en 2010 il pourrait bien déstabiliser durablement tout l’univers professionnel et de la formation.

Le DIF entraîne quatre types de risques :

  1. Un risque financier. Les entreprises fidélisant peu leur salariés vont désormais payer très cher pour la formation des salariés les quittant (jusqu’à cette fin 2009 les heures DIF non prises étaient perdues)
    Dans une grande société ne consacrant que le minimum légal à la formation (1,6% de la masse salariale) la totalité du budget formation sera absorbée par le DIF (DIF des salariés quittant la société et DIF des salariés en poste).
  2. Un risque organisationnel : Déployer puis généraliser le DIF dans une grande organisation nécessite d’y consacrer du temps et de bâtir une nouvelle ingénierie, celle de la professionnalisation et des parcours de formation. Mais comment généraliser le DIF si les moyens humains sont insuffisants pour le développer ?
  3. Un risque social  : la crise économique interpelle de nombreux salariés sur leur développement et leur avenir professionnel. En 2007 on comptabilisait 5 % de formations entreprises pour un changement d’emploi mais en avril 2009 un sondage (AFPA) indiquait que 32 % des salariés souhaitaient s’engager dans une reconversion professionnelle. Un système qui permettait à 5 % des personnes de se reconvertir annuellement pourra-t-il accompagner 1/3 d’entre eux dans les années qui viennent ?
  4. Un risque compétitif  : La compétitivité des organisations passent par leur capacité à changer, à évoluer, à s’adapter aux besoins des clients et des marchés. « Apprendre mieux et plus vite que ses concurrents sont les ingrédients essentiels dans le monde économique changeant d’aujourd’hui » (Daniel Belet, l’entreprise apprenante).
 
Comment changer, évoluer, se reconstruire si on ne peut s’appuyer sur le capital humain de l’entreprise ? En parallèle pourquoi et comment évoluer si ma société ne peut m’accompagner et sécuriser mes apprentissages ? 
Le DIF implique une coresponsabilité employeur/salarié pour prévenir les déclassements professionnels, la perte de sens au travail mais aussi développer la compétitivité des organisations.
Ces quelques données financières et sociales attachées au Droit à la formation sont désormais connues de tous. Après six ans d’existence (septembre 2003) les salariés, eux aussi (re)connaissent le DIF à plus de 80 %. Il s’agit donc de ne plus cacher la vérité : notre pays a pris un retard considérable dans ses développements humains et apprenant. Il s’est contenté durant des lustres d’ajuster une main d’œuvre interchangeable et peu mobilisée aux besoins du travail, de tout miser sur l’éducation initiale en déployant de modestes rustines en formation continue.
Le Droit à la formation devient pourtant fondamental dans la société de la connaissance et de l’information et après avoir investi massivement dans la modernisation des matériels ou des systèmes d’information les entreprises vont redécouvrir les humanités, des formations et accompagnements pour faire grandir les hommes et évoluer les organisations. La responsabilité sociale ne consiste pas seulement à produire propre ou vert mais aussi à respecter et à « aimer » ses salariés (« Love’em or lose’em  »).
Pour ce Grand emprunt promis aux français et censé redonner espoir à notre vieux pays, ce n’est plus de grandes ou spectaculaires infrastructures dont nous avons besoin (plus d’autoroutes ou de lignes de TGV ne créeront guère de richesses supplémentaires) notre pays a besoin de développements humains et d’apprentissages des adultes. La culture et les connaissances ne se voient pas, ne s’achètent pas, ces richesses immatérielles sont devenues le premier capital des hommes, des organisations et des pays.
La seule activité humaine écologique, non polluante et créatrice de richesses est celle qui consiste à apprendre, à lire, à comprendre et à développer ses compétences. Dans la société des savoirs et des réseaux les biens matériels n’ont plus guère d’importance : la voiture, le téléphone ou l’ordinateur ne sont plus que de banals outils, c’est de leur utilisation intelligente que nous tirerons travail et avenir professionnel et social.

 

Didier Cozin ;

Auteur d’ « Histoire de DIF » et de « Reflex DIF »


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3 réactions à cet article    


  • M.Junior Junior M 13 novembre 2009 16:30

    Hé oui Didier Crak Dif hou

    2010 : 120 heures de formation à faire sur le temps de travail ou en dehors du temps de travail (Allocation formation correspondant à 50% du salaire).

    A chacun ses choix d’évolution ou de régression.

    120 heures de formation + 5 semaines de congés payés + les RTT = Peu de personnes dans les entreprises en 2010. Faudrait pas que ce soit l’année de la reprise économique.


    • Yohan Yohan 13 novembre 2009 19:14

      Heures de DIF, heures de RTT, congés payés, ponts, jours fériés, jours de grève, jours de maladie, jours de congé syndical, eh ! dites quand est-ce qu’on travaille ????


      • longroisien 15 novembre 2009 12:05

        le dif, quelle bonne idée.

        quelle surprise n’ai-je pas eu lorsque suite a mon entretien individuel annuel, on me dit : vous etes une peu trop rentre dedans, il faut faire une formation pour etre un peu plus politque.
        ok d’accord, je veux bien rentrer dans les clous.
        date de formation calé, 2 jours avant son début je reçois par mail de ma direction une dde de prise en charge de la formation sous le DIF.
        pour vous dire que les entreprises savent bien se servir de ces moyens qui sont normalement individuel et libre.

        Les entreprises se servent de ce droit pour former a leur image leurs salariés.
        encore une belle arnaque

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