• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Actualités > Société > Le naufrage de l’université française

Le naufrage de l’université française

fac_en_greveDepuis un certain temps déjà, les facs sont bloquées un peu partout en France. Je voulais en parler, mais il me semble qu’une bonne partie des infos sur la réalité de la situation ne circule pas beaucoup dans la presse nationale, ou régionale. Je compile donc ici trois articles que j’ai lu sur le sujet, et qui rappellent, chacun à leur manière, la façon dont les choses n’avancent pas. Blocages, politisation, intimidation, complicité de l’administration, menaces, violences.

Guy Millière

Depuis deux mois, la plupart des universités françaises sont bloquées. Les cours n’ont pas lieu et sont remplacés par des activités “alternatives”, ou par rien du tout.

Le motif est, toujours, la pusillanime réforme du secteur proposée par le gouvernement. Mais faut-il un motif ? Dans l’université française, les grèves longues sont des rituels qui reviennent de manière récurrente. Ce n’est pas très grave : les étudiants ne produisent rien, la plupart des enseignants non plus. Cela gaspille l’argent des contribuables, mais cet argent est déjà tellement gaspillé, et de tant de façons […]

[Le gouvernement] pourrait, direz-vous, proposer de baisser nettement les impôts, et les charges de façon à faciliter la création de richesse, envisager aussi de déréglementer et de diminuer drastiquement les dépenses publiques. Il lui serait difficile d’aller très loin dans ces directions, puisque l’essentiel se décide désormais à l’échelle de l’Europe, mais il pourrait au moins en parler. Au lieu de cela, les propos tenus, comme les mesures prises, ont une teneur social-démocrate très nette, et il faut avoir la cécité idéologique d’un socialiste français pour ne pas le voir.

Guy Millière, “La France s’enlise dans la crise et la grève”, pour les 4 Vérités hebdo le 31 mars 2009, cité sur Rebelles.info

Michel De Poncins

Il est connu que la seule façon d’avoir des universités performantes serait de les privatiser afin qu’elles soient dotées d’une direction forte capable d’attirer les capitaux et les talents nécessaires pour les conduire à l’excellence dans le cadre d’une forte concurrence. L’université de Stanford et bien d’autres aux USA agissent dans une totale indépendance vis-à-vis du pouvoir politique. C’est à l’ombre de Stanford que la Silicon Valley s’est développée. Faute d’avoir la mission de privatiser ou, même, l’idée de le faire, Madame Valérie Pécresse, en charge du dossier, a bricolé un système donnant un semblant d’autonomie aux universités. […]

Pour terminer, nous lisons, ces jours-ci, dans les journaux que Madame Valérie Pécresse multiplie les gestes à l’égard des enseignants chercheurs. Cela veut dire qu’elle a reçu la consigne d’appliquer la stratégie du pouvoir depuis plus de 18 mois qui pourrait être décrite comme celle du “matamore couché” : matamore parce qu’il prend des postures fortes, couché parce qu’il capitule sans conditions devant l’ennemi ; c’est cette stratégie que le même pouvoir applique depuis plus de 40 jours vis-à-vis des îles lointaines et qui est la meilleure façon d’avoir comme en d’autres temps à la fois la guerre et le déshonneur.

Michel de Poncins, “Enseignants chercheurs”, pour Tocqueville Magazine le 16 mars 2009, cité sur Rebelles.info

Jean-Louis Caccomo

Sous prétexte de donner le maximum de chances au plus grand nombre de jeunes, notre système a complètement neutralisé le principe de responsabilité dans le monde éducatif. Le résultat est un gaspillage massif des ressources humaines. En effet, les jeunes ont tendance à s’orienter dans les filières qui ne débouchent sur aucune carrière – souvent avec la bénédiction de parents passifs ou dépassés – tandis que les entreprises peinent à trouver les compétences dont elles ont besoin pour se développer. Les filières qui débouchent sur l’emploi n’attirent plus nos étudiants car ils trouvent ces formations trop sélectives. En clair, notre système fait du subprime à grande échelle : il distribue des titres sans contrepartie.

Jean-Louis Caccomo, “L’université française entre l’impasse et l’espérance”, le 10 mars 2009 sur son blog Chroniques en liberté, repris sur le Québécois Libre

Les échanges que j’ai pu avoir par mail avec J.-L. Caccomo, ainsi que les échanges en commentaires sous son billet, montrent l’ampleur de la non-information (dissimulation) dont font l’objet ces évènements :

  • Administration qui force les enseignants venus faire cours à faire grève
  • Blocages et insultes par des “jeunes des quartiers” venus prêter main forte aux bloqueurs
  • Bloqueurs qui ne sont ni enseignants, ni élèves
  • Aucune intervention des forces de l’ordre, ni des services de sécurité privés mis en place sur certains campus
  • Non application des décrets ayant décidé de l’évacuation des bloqueurs
  • Faux vote à main levée dans les amphis, trucage des résultats
  • Lettres de menace dans les boîtes mails de certains enseignants non grévistes

Je continue ? Non, bien sûr. Le sentiment qui ressort de tout ça est une honte mêlée de rage à l’égard de l’université française.


Moyenne des avis sur cet article :  2.86/5   (43 votes)




Réagissez à l'article

27 réactions à cet article    


  • Le péripate Le péripate 3 avril 2009 11:03

     D’une manière générale, les étudiants se retrouvent à l’Université par défaut, faute d’avoir pu faire une prépa aux grandes écoles, voire même un simple BTS.
    Il y a aussi dans ce non-choix une incapacité à se projeter dans l’avenir, une immaturité que l’on retrouve dans la demande généralisée d’aides de la part des institutions. Philippe Muray parlait d’Homo Festivus, d’un conformisme rebellocrate.

    La Lime, dans son papier sur P Dessertine, évoque le chemin qui sera probablement pris par les gouvernants, chemin de la pente la plus facile : laisser à l’abandon un système éducatif irréformable, coûteux, inefficace, en laissant le privé prendre le relais aux marges, ce qui se traduit par une augmentation déguisée de l’impôt. Et ne va pas dans le sens de l’amélioration de l’égalité des chances, hélas.

    Note par rapport à votre papier sur "chaque jour au parc" et la remarque de René Foulon : le terme "éducation nationale" est bien mal choisi, le rôle de l’école n’est pas d’éduquer, mais de dispenser le savoir. Confusion regrettable.


    • Grégory 3 avril 2009 11:52

      Guy Millière ? 
      Ce Guy Millière ?

      http://fr.wikipedia.org/wiki/Guy_Milli&egrave ;re

      Ah, quel idiot, jamais je n’aurais du jeter ce exemplaire d’Israël Magazine que j’avais acheté à titre éducatif et dans laquel il tartine à loisir une prose qui je n’en doute pas, nous aurais tous bien fait rire ici. C’est que Guy Millière est LE néo con opportuniste Français, à un point que c’en est caricatural. 

      "Il est connu que la seule façon d’avoir des universités performantes serait de les privatiser afin qu’elles soient dotées d’une direction forte capable d’attirer les capitaux et les talents nécessaires pour les conduire à l’excellence dans le cadre d’une forte concurrence"

      Ce n’est pas connu, c’est une opinion répendue et les gens qui tendent à présenter l’un pour l’autre commencent avec un déficit de crédibilité en ce qui me concerne. Et puisReparlons du modèle des universités privatisés dans une petite année le temps que continue de tomber ce qui tombera ineluctablement. On verra ce qui "sera connu" alors...

       


      • logan 3 avril 2009 20:08

        Je suis d’accord avec vous ;)

        Les gens qui tendent à vouloir donner à leurs opinions valeur de vérité absolue comme l’auteur tente de le faire n’ont aussi aucune crédibilité à mes yeux ^^


      • Jojo 3 avril 2009 12:04

        ’Jour,

        Vous parlez de compiler trois articles fort bien, je suppose que pour vous c’est les trois meilleurs écrits jamais parus sur le sujet (à votre connaissance du moins, nous sommes bien d’accord).

        Alors j’ai lu, la phrase qui me semble le mieux résumer les trois est de Michel De Poncif :  

        « Il est connu que la seule façon d’avoir des universités performantes serait de les privatiser ». Circulez il n’y a rien à voir … !

         

        La généralisation sur un sujet aussi sérieux est non seulement stupide, mais elle est dangereuse. Je ne veux pas revenir sur le fond, je voudrais juste savoir si vous avez bénéficié pour votre "ingéniorat" d’un enseignement public et si c’est le cas, jusqu’à quel point ?

        Il parait en effet que les partisans de l’esclavage étaient libres, que les pyromanes ne risquent pas grand chose et que les partisans de l’eugénisme sont nés…

         

        Mais ce qui frappe le plus, c’est que vos conclusions n’ont strictement rien à voir avec les trois articles compilés.

        De plus, j’ai des raisons de ne simplement pas vous croire, alors quelles sont vos sources pour ça :  


        • Jojo 3 avril 2009 16:27

          Philippe Renève smiley
          Amen !


        • bob 3 avril 2009 12:58

          Monsieur,

          Il est vrai que les universites ont bien souvent ete bloque et ce pas seulement de nos jours. Tous les ans se revele un motif pour les apprentis politiciens ( julliard sans le nommer) de bloquer les etudiants dans les etudes et de mettre l’universite en stase. Vous oubliez de noter que les etudiants bloqueurs arrivent tres souvent a avoir leur diplome en depit d’un proselytisme marque et d’un manque de travail evident ( magie ?, miracle ?). Tous les etudiants ne sont pas loges a la meme enseigne.

          En ce qui concerne les reformes, personne n’y croit : que veut-on reformer ? qui veut-on reformer ? qui sont les personnes directement impactees ? autant de questions que le quidam se pose et auquelles personne ne peut repondre avec certitude.
          Pour ce qui est de l’orientation, nous assistons a un probleme deja ancien qui confere a certains un pouvoir enorme de decision sur qui devra ou ne devra pas continuer ses etudes. Si l’on ajoute une corruption au potentiel eleve, vous comprendrez que toute la societe economique est touchee.

          Mes propos necessitent davantage d’explication : en medecine, le numerus clausus est une veritable atteinte aux competences medicales. Sur la base d’un concours, les futurs medecins vont etre selectionnes et conditionnes. La medecine n’est-elle pas une affaire de competences plus de gonflement d’ego ? Si le systeme francais est si adapte, pourquoi doit-on appeler des docteurs etrangers ( toutes specialites confondues) dont les honoraires sont inversement proportionnels au travail qu’ils fournissent.
          Dans d’autres universites, le diplome est conditionne au prix que vous voudrez bien y mettre ( service, argent). Ainsi voit-on des energumenes possedant les memes diplomes que vous mais ne connaissant pas leur sujet et etant propulses vers des responsabilites qu’ils n’ont jamais merite. Le "parisien" et "capital" avaient d’ailleurs oublie un bareme des prix necessaire a l’obtention de tout ou partie du diplome.
          Enfin, il est d’usage dans certaines grandes ecoles, outre un petit viatique occasionnel, de presenter l’etablissement a l’exterieur et se voir ainsi augmenter sa moyenne de 1 a 3 points ( !!!!!).

          Il faut ajouter qu’en depit du statut d’universite privee, les universites americaines ne sont pas plus performantes que bien d’autres. Bien entendu, si vous comparez Stanford avec une universite obscure situee dans le trefond de la France, la difference sera evidente. A niveau egal, toutes se valent.


          • Le péripate Le péripate 3 avril 2009 13:04

             A niveau égal, toutes se valent. On ne saurait mieux dire. smiley


          • bob 3 avril 2009 13:14

            @ peripathe,

            Cela est loin d’etre evident pour tout le monde. Chacun, muni de sa vision du monde, va pretendre qu’ailleurs l’herbe est plus verte. Je reitere mon propos : Les grandes universites ou se concentrent "l’elite de la nation", dont nous ne faisont pas partie, se valent.


          • Tristan Valmour 3 avril 2009 13:05

            « Dans l’université française, les grèves longues sont des rituels qui reviennent de manière récurrente. ».
            Où sont les preuves ? Une impression n’est pas une preuve. Une impression est subjective. Que signifie long ? Que signifie récurrent ? Comment et en fonction de quoi déterminer la longueur et la récurrence ?

            « Il est connu que la seule façon d’avoir des universités performantes serait de les privatiser afin qu’elles soient dotées d’une direction forte capable d’attirer les capitaux et les talents nécessaires pour les conduire à l’excellence dans le cadre d’une forte concurrence. »
              Les faits contredisent la généralité et l’impression énoncées par de Poncins. Voir l’audit réalisé par le cabinet Mckinsey (cabinet de réputation mondiale) sur les différents systèmes éducatifs. L’analyse montre que la performance d’une université n’est pas liée à son statut de public ou privé. D’ailleurs, les prestigieuses universités américaines sont en perte de vitesse face aux universités de Singapour (National University of Singapore ; Nanyang University ; Nanyang Technological University et le Singapore Management University par exemple). Singapour devient le hub mondial du savoir et de l’enseignement. Le système y est très centralisé, essentiellement public et performant.

            Quant à Jean-Louis Caccomo, il se place dans une vision utilitariste de l’Education qui n’est pas traditionnellement la conception française en matière de formation initiale. L’utilitarisme est le lot de la formation professionnelle. D’autre part, les entreprises s’aperçoivent que leurs employés, s’ils sont de bons techniciens, sont souvent dépourvus de culture générale, nécessaire pour savoir lire et interpréter une consigne (entre autres), comme pour être créatif. De plus en plus, le profil « sciences humaines » est recherché ; profil que l’on complète par une formation plus technique en interne.

            Subordonner les universités aux entreprises mobilisera les ressources au service de la R&D technologique au détriment du savoir fondamental. A un moment donné, on se retrouvera bloqué dans notre évolution car personne n’aura affecté les crédits nécessaires à rechercher et parfois découvrir des propriétés de la nature, des sociétés ou des individus qui nous étaient inconnues et dont on ne pouvait pas tirer immédiatement un bénéfice. Il faut toujours conserver à l’esprit que l’utilité d’un savoir (on appelle cela le transfert) ne se manifeste qu’au moment où l’on en a besoin. On ne peut donc préjuger de l’utilité d’un savoir.

            Sur les procédures peu démocratiques des blocages, et le reste, je suis entièrement d’accord. Mais comme en toute chose, c’est toujours la minorité bruyante qui entraîne la majorité silencieuse. Cette majorité n’a qu’à se révéler dans un sens ou dans l’autre plutôt que se taire.



            • Le péripate Le péripate 3 avril 2009 13:42

               Vous ergotez un peu, cher Tristan. A vous lire, on a envie de vous demander quels sont les preuves que l’Université française est au travail. 
              Vous n’avez cependant probablement pas tort en disant que l’aspect privé/public n’est pas un critère absolu d’excellence. Je crois que c’est pourtant un triste constat à faire quand le public se révèle, hélas, irréformable en France.
              Je note par ailleurs une trace de conformisme idéologique dans votre propos : pourquoi traduire de manière irréfléchie privatisation par soumission des Universités aux entreprises ? Ce n’est pas dit dans le papier, il faut donc ou que vous lisiez dans les pensées de l’auteur, ou que vous répétiez un slogan de nombreuses fois martelés par les opposants à toutes réformes.

              Ceci dit, à moins que l’entreprise ne soit une figure personnifiée du diable, je vois mal en quoi il serait mauvais que le savoir dispensé serve l’emploi. D’ailleurs, ce type d’enseignement existe, ce sont les écoles de commerce, et, sauf erreur, elles bénéficient d’une bonne reconnaissance internationale.

              Mais, la mission de l’école et de l’université est bien de délivrer un savoir, mission bien mal réalisée quand les établissements sont ou fermés ou bloqués une bonne partie de l’année scolaire,et, ce de manière répétitive et abusive, quoi que vous en pensez.


            • Le péripate Le péripate 3 avril 2009 17:22

               Sophisme d’autorité.


            • Le péripate Le péripate 3 avril 2009 17:23

               Assorti d’un sophisme ad hominem. Généralement, ça fait la paire.


            • jakback jakback 3 avril 2009 13:44

              L’esprit de Vincennes, qui était a l’université, ce qu’est le tagueur banlieusard aux maîtres flamands, souffle toujours, laissons les s’épuiser, la majorité d’entre eux est vouée a l’échec, je sais cela se pense mais ne se dit pas, tant pis c’est dit.


              • Cyber entrepreneur Cyber entrepreneur 3 avril 2009 14:06

                Bonjour,

                Mais bien sur qu’il faut réformer les Universités, tout au moins, y mettre un numérus closus !
                Et fermer toutes les matières à la con qui ne servent à rien et ne donnent aucun boulot, genre psycho socio ou alors les rendre tellement inaccessibles que seules les plus motivés s’y rendront. 
                Et tous les autres, ceux qui n’auront pas assez bossé pour pouvoir entrer dans une fac ? Et bien au boulot, et plus vite que ça ! Fin de la glande...payée par les contribuables !

                Non mais !


                • Tristan Valmour 3 avril 2009 15:37

                  Bonjour Le Péripate

                  Je n’ai pas plus de preuves à apporter que Guy Millière. Mais je n’ai pas non plus écrit que l’université française était au travail, ni que nous avions le meilleur système, ni que tout était pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. Donc, j’ergotais effectivement, à l’instar de Guy Millière.

                  D’où viendraient les capitaux si ce n’étaient des entreprises ? Harvard, université américaine privée est certes en majorité financée par les dons de ses anciens étudiants, comme par ses placements, mais la mentalité française est différente de la mentalité américaine. Je vois mal d’anciens étudiants français consacrer une partie de leur fortune à leur université. Donc, en France, privatisation rimerait avec soumission aux entreprises. Or une entreprise vise la valeur ajoutée, si possible à court et moyen terme. Rien de plus normal, ce n’est pas critiquable. Je vois mal des entreprises financer la physique quantique si elles ne peuvent disposer d’applications technologiques à valoriser à court terme.

                  Je répète qu’historiquement et fondamentalement, l’enseignement français est humaniste (savoir pour savoir), par opposition à l’enseignement anglo-saxon qui est utilitariste (savoir pour faire). Aucun système n’est meilleur que l’autre, ils ont tous des avantages et des inconvénients. Les évaluations internationales dont je ne cesse de critiquer la méthodologie mettent pourtant en avant le fait que les élèves et étudiants français réussissent mieux les tâches complexes que leurs homologues. Ils ont une capacité d’abstraction généralement plus importante. Cela s’est vu notamment à Singapour où des groupes d’étudiants français en école d’ingénieur ont d’abord été stupéfaits de constater que les singapouriens avaient fait en 6 mois ce qu’eux avaient fait en 2 ans. Mais les Français se sont ensuite rassurés lorsqu’ils se sont aperçus que si eux pouvaient expliquer l’origine de leur savoir et produire un savoir nouveau, les étudiants singapouriens en école d’ingé n’étaient capables que d’appliquer à ce stade. L’extrapolation vient après.

                  Je dirige des entreprises et je travaille pour des entreprises, et j’aime les entreprises. Elles n’incarnent pas le mal. Sauf les multinationales, car ces dernières biaisent l’économie de marché en raison de leur position dominante ; comme le font les Etats d’ailleurs.

                  Les écoles de commerce ne sont pas seules à produire un savoir exploitable par les entreprises : il y a aussi les IUT, BTS et filières pro en université. Et puis, il faut avouer qu’il y a beaucoup d’écoles de commerce bidons.

                  Dans le cadre d’une partie de mes activités (l’entreprise apprenante), je suis amené à conduire des entretiens d’explicitation (voir le site expliciter.fr pour de plus amples renseignements) afin de repérer le savoir procédural en œuvre dans la réalisation de tâches, peu importe la nature (ça va du travail à la chaîne a la conduite de négociations, toutes les activités sont abordées). Cela afin de modéliser les bonnes pratiques et augmenter l’efficacité des ressources humaines. Or, il y a une grande différence entre le savoir déclaratif (ensemble des règles, théories, théorèmes…bref, le savoir conceptuel) et le savoir procédural (celui qui permet la réussite d’une action). Pour schématiser, on peut réussir une action sans la comprendre (Cf Anderson, Piaget, Spinoza, etc.). L’action est un savoir autonome.

                  Ce faisant, que le savoir déclaratif soit d’essence humaniste ou utilitariste importe peu pour la réussite d’une action. Le savoir procédural se nourrit certes d’une partie du savoir déclaratif mais d’une part, il vit de manière singulière dans la conscience de l’individu, d’autre part, il est tributaire d’autres données (contexte, réfléchissement, modalité évocative, stratégie holistique ou sérialiste, intelligence multiple, etc.). Cela explique que l’on puisse diriger avec succès une entreprise sans avoir fait d’école de commerce. D’ailleurs, le savoir déclaratif est souvent une théorisation du savoir procédural, la complexité du vocabulaire en plus. Et comme dirait Alain, « beaucoup savoir n’est pas penser ».

                  Donc, le savoir dispensé peut servir l’emploi même s’il n’a pas pour objectif de servir directement l’emploi (différence entre connaissance et compétence). Par exemple, si je suis des cours de dessin (alors que je n’ai pas pour ambition d’être dessinateur), je développerai des aptitudes à exercer des professions qui nécessitent de la synthèse, la gestion de l’espace. Si je suis des cours de musique (alors que je n’ai pas pour ambition d’être musicien), je développerai des aptitudes à exercer des professions qui nécessitent de l’analyse, la gestion du temps. Si je touche les choses et les gens, je vais développer mes compétences interpersonnelles : connaissance d’autrui, communication, diplomatie. Si je lis Hugo (alors que je n’ai pas l’ambition de devenir prof de lettres), je vais m’enrichir de modèles de situations, de modèles psychologiques dont je vais inconsciemment (et parfois consciemment) étudier les similitudes et les différences avec la situation que je vis, avec les décisions que je dois prendre. Tout ça pour dire que ce que l’on croit ne pas être utile s’avère en réalité très utile. Croire est un jugement, pas un fait.

                  Je ne suis pas contre le modèle utilitariste, il y a encore une fois de très bonnes choses. Je suis contre la disparition du modèle humaniste où l’on trouve également de très bonnes choses. Ne voyez-vous pas que toutes les réformes, quelles que soient leur nature ou les pays où elles s’appliquent, conduisent à la disparition de la diversité, à l’uniformisation ? Or, qui dit uniformisation dit dictature.

                  Pour conclure, je suis opposé à ce que les grévistes empêchent les non-grévistes de suivre les cours. 



                  • Le péripate Le péripate 3 avril 2009 17:39

                     Cher Tristan, je souscris à toutes les valeurs que vous venez de si brillamment exposer. Une remarque d’importance tout de même : je ne me laisse pas facilement enfermer dans les faux dilemmes. Entre le financement direct par l’Etat et le "sponsoring" d’entreprise. Je pense par exemple à un chèque éducation qui permettrait de choisir son établissement quelque soit son statut, public ou privé. Et je suis certain que d’autres moyens encore seraient possibles. Ceci pour faire justice de cette question public/privé.

                    Mais l’essentiel est que nous sommes d’accord sur le fait que les bloquages et les "grèves" étudiantes sont des non-sens.

                    Léon, comment dire..... oh, et pis non, vous vous disqualifiez bien assez par vous même sans que j’éprouve le besoin de vous "achever". smiley


                  • Le péripate Le péripate 3 avril 2009 19:27

                     Vos lunettes, Léon ! Vos lunettes, bon sang ! Si en plus, vous êtes sourd, vous ne devez pas être un cadeau.


                  • plancherDesVaches 3 avril 2009 16:41

                    Le pouvoir en place dans notre pays étant pressé de privatiser, tout débat est inutile.
                    Seules les bonnes têtes seront utilisées et les banques seront charmées de leur fournir un prêt qui les engagera sur 25 ans à rester client.
                    Les droits d’entrée dans les filières au-delà du bac seront payantes, mais l’habitude aura été prise dés la maternelle.
                    Les filières seront élaguées hors tous secteurs rentables. Ainsi, seront surtout éliminées toutes les filières de l’Histoire qui porte préjudice aux pouvoirs en place par des exemples montrant que ce pouvoir semble innover alors qu’il ne reproduit que des shémas humains séculaires.
                    Les quelques survivants de l’élaguage recevront un enseignement d’état qui les formatera afin d’éviter tout esprit critique.
                    Tout esprit d’initiative ou de subvertion ne pourra être toléré dans cet ensemble harmonieux destiné à procurer une impression de progrés à un peuple qui devra ignorer toute réelle réalité le concernant.

                    Nous en sommes là. Hé oui... smiley


                    • Cyber entrepreneur Cyber entrepreneur 3 avril 2009 16:51

                      Rien à voir avec le pouvoir en place !
                      Il faut arrêter de délirer...Payer des études pour que les gens ne trouvent pas de boulot et glandent est un poids que la société ne peut plus s’offrir. Il faut vivre en fonction de ses moyens...et évoluer. Plus de place pour la psycho socio et l’histoire pour le plus grand nombre et qui attirent la masse des glandeurs de la France. Mais une vraie place pour la psycho socio et l’histoire pour les bosseurs qui ont envie de travailler. Donc un numerus closus. 
                      On a a marre des gens qui ne foutent rien ! Le numérus closus permet de tester les motivations !!! C’est à la portée de tous de travailler pour avoir de bons résultats scolaires. 


                    • Christophe Christophe 3 avril 2009 17:01
                      @Lomig,
                       
                      Oui enfin prendre Guy Millière pour référence, surtout sur des propos comme il faut avoir la cécité idéologique … est quelque peu cocasse. Il daigne dénoncer la paille dans l’œil des autres mais oublie, avec une facilité déconcertante, la poutre qu’il a dans le sien. Son rôle de président de l’institut Turgot ; dépositaire des idées physiocratiques devant l’éternel ; n’a rien de surprenant. Le dogmatisme dont il fait preuve ne grandit pas ses capacités intellectuelles.
                       
                      Quant à Michel de Poncins, Docteur D’Etat en économie, ayant bien profité à titre personnel de la formation universitaire, il nous fait état de l’inefficacité de l’université dont il est un des anciens élèves. Dans ce cas là, ne vaut-il pas mieux s’appliquer les critiques à son endroit et reconnaître sa propre incompétence ; sauf à poser l’hypothèse que l’université ne produit que des déchets mais qu’il est le seul à être parvenu à s’en sortir. Par ailleurs, pour un membre du cercle de Frédéric Bastiat, il est assez compréhensible qu’il véhicule l’idéologie d’origine physiocratique, lui aussi.
                       
                      Pour Jean-Louis Caccomo, il est sans doute le moins dogmatique de tous ; même si ses critiques envers les étudiants et les parents lui permettent sans doute de s’exonérer des responsabilités qui lui incombent à l’université de Perpignan. Mais il est fréquent de constater que nous voyons plus facilement l’irresponsabilité des autres que la sienne propre. Il est évident dans son propos que la culture générale ne devrait être dispensée qu’à une élite ; les masses devraient pouvoir fournir toutes les unités de production nécessaires à l’économie financière qui est son domaine. Ce n’est, malheureusement pour lui, pas l’approche française de l’éducation ; qu’il s’occupe de son domaine, peut-être aurait-il pu prévoir le marasme de l’économie financière, puisque c’est une soit disant science exacte.
                       
                      Prendre pour référence deux économistes se référant directement de l’héritage de la physiocratie, courant totalitariste d’un point de vue politique, et un économiste financier pour aborder les problèmes de l’enseignement en général et de l’université en particulier n’est pas très pertinent, à mon sens. Ce procédé ne donne pas beaucoup de crédibilité à vos conclusions qui se rapprochent plus du réductionnisme dogmatique que de faits réels et prouvables.
                       
                      @Tristan Valmour,
                       
                      Intervention fortement enrichissante.
                       
                      Pour avoir suivi des filières diverses et variées, tout d’abord dans les études professionnalisantes (à forte vocation technique) et être venu ensuite aux études universitaires, la différence est frappante. Tant mes premières formations furent orientées vers une restitution de schémas prédéfinis, parfois même simplifiées, (c’est ce que nous apprenons, même dans les écoles d’ingénieur) l’université propose plutôt de permettre l’analyse des schémas à mettre en œuvre pour atteindre un but. D’un côté nous apprenons à faire, de l’autre nous apprenons à apprendre à faire si je devais résumer. Bien entendu le but des deux consiste à l’aboutissement du faire, mais le mode de raisonnement est totalement différent. J’ai d’ailleurs eu l’occasion d’avoir de longues discussions avec d’autres personnes ayant suivi les deux types de formation ; et nos conclusions étaient très proches. Par ailleurs, cela se rapproche des deux modes de raisonnement que nous utilisons en Intelligence artificielle : le chaînage avant (fonctionnement par processus) et le chaînage arrière (fonctionnement par but).

                      • snoopy86 3 avril 2009 19:20

                        http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=0&ref_id=NATnon07136

                        213618 étudiants en sciences sociales et humaines dont 14759 en cursus doctorat  smiley

                        32152 étudiants en sciences et techniques des activités physiques et sportives  smiley

                        Est-ce bien raisonnable ?


                        • Michael Jordan Manson (MJM) Michael Jordan Manson (MJM) 3 avril 2009 19:24

                           J’ai fait tout mon secondaire à l’université. Mon grand père était contre. Mon père s’en foutait... Et la mère monte.


                          • logan 3 avril 2009 20:32

                            Certes il y a plein de problèmes qui touchent l’université, l’enseignement en général.
                            Mais pour ma part, je reste attaché dogmatiquement à la volonté de faire réussir tous les élèves, et donc à une certaine égalité. Je ne vois pas le lien entre cette ligne générale de l’enseignement et ces problèmes désolé.

                            Et donc je rejette toute idée de mise en concurrence et de privatisation qui ne feront qu’agraver les innégalités.
                            Surtout alors que cette "concurrence privatisation" montre ses méfaits dans tous les domaines, nottament dans le domaine économique, j’avoue avoir bien du mal à comprendre comment on peut encore aujourd’hui tenter de vendre ce genre de projet comme une solution miracle.



                            • delamothe delamothe 3 avril 2009 23:30

                              Au lieu de sortir votre état d’ame de libérale qui en marre de son pays rempli de "gauchistes" comme on peut en entendre tous les jours à la télé ou dans les journaux , essayer de connaitre le dossier. Les facs en France s’est surtout une honte d’un point de vue de l’investissement de l’Etat , le supérieur est un système fortement discriminatoire entre des classes prépas et des écoles d’élites largement aidées et la misère financière des facs. Et avec les nouvelles dispositions du gouvernement ça ne va pas s’arranger au contraire. Pourquoi un étudiant de fac coute 4000 euros par an et un étudiant de classe prépa 12000 euros ?
                              C’est sur il y a que des sociologues incultes et gauchistes alors pourquoi donner de l’argent à des fac poubelles , privatisons pour le bien d’une minorité et d’interet économique privé .... c’est pas ce système qui se casse la gueule tous les 30ans ? aller voir du coté de harvard ou oxford ils ont perdu des milliards en investissement financiers .


                              • Christoff_M Christoff_M 4 avril 2009 03:18

                                 pourquoi ces manifs qui ne servent plus a grand chose, pourquoi ne pas débarquer a l’assemblée au sénat
                                réveillez les pionceurs et prendre le micro, cela aurait dix fois plus d’impact !! ou débarquer sur un plateau télé ça nous changerait du stylo de Poujadas ou des régions de Pernault !!

                                dans un état qui ne relaie pas les manifs il faut faire autre chose, sans casser si vous voulez etre vraiment entendu !! je me rappelle du message de Balavoine à Mitterrand quel impact !! Mitterrand etait un animal politique et s’en tira tant bien que mal, mais le passage en question passe toujours sur internet et comme ça venait du coeur chez Balavoine cela a beaucoup plus d’impact que des manifs organisées et récupérées qui passent relativement inaperçues pour les resp politiques concernés la preuve Pécresse se marre quand elle répond aux questions à l’assemblée !!

                                je crois que ce genre de manifs gentillettes et prévues n’a plus tellement de sens et est obsolète face à l’attitude combattante et réformiste au pas de charge de ce gouvernement !! je crois que je serais étudiant ou chercheur, j’envisagerais d’autres moyens et d’autres réponses adaptées aux interlocuteurs actuels... les manifs qui durent si elles ne mobilisent pas un max finissent par retourner l’opinion contre soi et elles deviennent contre productives !!


                                • bobbygre bobbygre 4 avril 2009 11:37

                                  Il est connu que la seule façon d’avoir des universités performantes serait de les privatiser afin qu’elles soient dotées d’une direction forte capable d’attirer les capitaux et les talents nécessaires pour les conduire à l’excellence dans le cadre d’une forte concurrence

                                  Ben non. Affirmation gratuite et démentie par la tournure actuelle des évenements. Ce propos illustre le reste de l’article. Des affirmations liberales sans aucun argument autre que celui d’autorité, bref, c’etait enervant avant la crise mais maintenant c’est juste risible...


                                  • Yannick Comenge Yannick Comenge 4 avril 2009 13:00

                                    Oui, il y a naufrage et dérive éthique. Pas mal d’abus, de mandarinat, de népotisme et cela s’amplifie étant donné que l’argent manque. Vous savez c’est l’ensauvagement... les gens deviennent des pourceaux meme à bac+8 lorsqu’ils n’ont plus de quoi "briller"...

                                    http://www.rue89.com/2009/02/17/harcelement-precarite-et-solitude-les-affres-dun-chercheur

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON






Les thématiques de l'article


Palmarès