Le piège infernal DIF
Les grandes entreprises françaises ont laissé s’accumuler des centaines de milliers au compte de leurs salariés. Elles n’ont pas mis en œuvre une Loi de la République votée en 2004, initiée par tous les partenaires sociaux et désormais ces même sociétés se trouvent prises au piège d’un dispositif devenu infernal. Le manque d’anticipation et l’attentisme généralisés risquent de coûter très cher au pays.
Le DIF, droit individuel à la formation n’est pas cette invention de technocrates que d’aucuns se plaisent à décrire mais la constatation évidente que dans l’économie de la connaissance et de l’information les salariés comme leur entreprise ont le devoir de rester dans la course, d’évoluer, d’accompagner le changement partout présent et condition indispensable de la survie économique.
Mais il y a loin de la coupe aux lèvres et les bonnes intentions affichées en 2003 par les partenaires sociaux n’ont jamais été véritablement promues.
- Le patronat cherche à baisser le coût du travail en France et la formation des moins qualifiés est toujours considérée comme un vœu pieux qu’on ne pourrait effectivement mettre en oeuvre
- Quant aux syndicats, ils négocient certes à Paris mais sont incapables ensuite de promouvoir sur le terrain les accords qu’ils ont signé (il faut dire qu’avec 5 % de syndiqués dans le privé la tâche est ardue).
Les entreprises ont donc laissé s’accumuler un fabuleux stocks d’heures de formation (1 milliard d’heures au moins) qu’il va bien falloir un jour ou l’autre "consommer".
L’année 2010 sera donc très douloureuse pour les services formation de la plupart des grandes entreprises car désormais tout est en place pour que le "piège" formation tout au long de la vie se referme sur les organisations imprévoyantes :
- 120 heures de DIF par salarié entré avant 2004 dans l’entreprise
- Aucun financement mutualisé à espérer à terme (un grand OPCA vient de passer d’un financement du DIF à hauteur de 50 euros de l’heure en janvier 2009, puis 9 euros en mai à désormais 0 euro de l’heure le 15 juin dernier)
- Des demandes de formation qui vont affluer dès 2010 (les compteurs bloquant à cette date)
- Une crise économique qui entraîne tous les salariés (80 % au moins) à s’interroger sur le maintien de leur employabilité et le développement de leurs compétences
- des besoins énormes en reconversion professionnelle (32 % des salariés ont un projet de reconversion à court terme alors que le CIF ne concerne que 1 salarié sur 500 tous les ans) Aucun budget donc n’est là pour accueillir ces besoins massifs par temps de crise
- Une Loi pour la formation tout au long de la vie qui va être réformée une nouvelle fois par le Parlement en juillet avec un DIF qui s’imposera de plus en plus du fait de ses 5 ans d’existence
- Des services formation calés sur le déploiement du trentenaire plan de formation mais n’ayant pas les moyens humains et techniques de déployer un Droit individuel et généralisé
.....n’en jetons plus la cour est pleine de missiles pour l’année 2010 (le DIF mais aussi la contribution handicapée multipliée par 4, les pénalités pour favoriser l’emploi des seniors, le plan stress...) le tout conjugué avec une crise économique très violente qui pourrait très vite rendre la situation sociale intenable.
Notre pays et ses grandes entreprises abordent décidément la crise avec de nombreux handicaps. Espérons qu’elles n’auront pas la triste fin de GM aux Etats Unis, victime de sa taille, de son aveuglement et d’un management dépassé.
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