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Accueil du site > Actualités > Société > Le tact façon UMP : légiférer contre l’incompréhensible

Le tact façon UMP : légiférer contre l’incompréhensible

Est-ce une impression où est-ce devenu une tradition à l’UMP de jouer au médiateur neutre entre le citoyen et la société ?

En 2005, un ministre de la Justice légiférait « puisque dans l’esprit du public » une chose semblait incohérente (lien). En 2006, un ministre de la Santé légifère parce qu’une chose « est incompréhensible pour des patients » (lien).

On ne justifie pas ces changements législatifs pour leurs vertus intrinsèques, on les justifie car ils seraient oeuvre de pédagogie vis-à-vis d’un citoyen un peu abruti.

Ainsi, on ne justifie pas l’allongement de 15 à 18 ans de la peine incompressible pour un condamné à perpétuité (durée pendant laquelle une libération conditionnelle est impossible) par une nécessité judiciaire, par un besoin de mieux protéger la société, pas plus qu’on ne justifie le fait de ne plus parler de médicaments « inefficaces ou inutiles » pour ceux qu’on s’apprête à ne plus rembourser mais de parler de médicaments « prioritaires » pour ceux que l’on continue à rembourser. Non, on présente comme ces changements comme des ajustements cosmétiques pour la clarté auprès du consommateur, sans s’astreindre à justifier en quoi de tels ajustements pourraient changer la donne.

Le champ est libre pour l’imagination.

Le ministre de la Justice, en rendant de deux ans plus tardive la libération conditionnelle des condamnés à perpétuité, agit-il juste pour satisfaire les foules, sans opinion personnelle ? Estime-t-il que cet allongement de deux ans est susceptible, sans rien changer au contrôle des libérations conditionnelles (Pierre Bodein n’était-il pas en libération conditionnelle, lorsqu’il trucida en récidive ?) ? L’idée d’allonger de deux ans la durée pendant laquelle aucune libération conditionnelle n’est possible va-t-elle logiquement de pair avec l’automatisation des remises de peine mise en place par la même tendance politique (trois mois de remise pour la première année d’écrou, deux mois par année suivante ; sept jours par mois pour les peines inférieures à un an), un choix politique il est vrai faisant plus figure d’entérinement de la pratique que de changement de principe théorique ?

Le ministre de la Santé, en refusant les termes « inutiles et inefficaces », veut-il faire acte de compassion pour ces gens que l’on fait consommer des médicaments dont on ne parvient pas à trouver un effet positif ? S’agit-il de sponsoriser aux frais de la Sécurité sociale une industrie pharmaceutique, pourtant apparemment florissante ? Ou bien s’agit-il de substituer aux principes d’utilité et d’efficacité celui de priorité concernant non pas la validation du remboursement des médicaments, mais leur invalidation (ce qui signifierait, sous couvert d’ouvrir la porte au remboursement de médicaments inutiles et inefficaces mais considérés comme prioritaires, d’ouvrir la porte au déremboursement de médicaments utiles et efficaces, mais considérés comme secondaires) ?

Je crois que cette manière de ne pas justifier les législations est aussi opérée par d’autres ministères. Je vous laisse le soin d’en rechercher les traces.

Nous naviguons en eaux troubles. Décidément, entre une gauche empêtrée dans l’idéologie l’empêchant de s’attaquer au réel et une droite si manifestement trouble dans ses intentions, il faut espérer trouver un Bayrou de secours (sans jeu de mot)...


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3 réactions à cet article    


  • Sam (---.---.116.120) 26 octobre 2006 20:25

    Gauche empêtrée et droite troublée...Gauche et droite de gouvernement.

    Qui ne se donnent même plus la peine de justifier, c’est bien de l’avoir mis en évidence.

    Machiavélisme, il faut en sortir de ce machiavélisme qui nous trouble et nous empêtre dans une société de moins en moins sociétale et de plus en plus sécuritaire, c’est-à-dire dictatoriale.


    • (---.---.150.188) 27 octobre 2006 00:11

      Certain des médicaments déremboursés sont de vrais médicaments, efficaces et utilisés dans les hopitaux...


      • Frédéric Mahé Frédéric Mahé 27 octobre 2006 09:50

        Cette histoire de déremboursement pour « manque d’efficacité » est une vaste blague. Si un médicament est réputé du jour au lendemain par le Ministre « inefficace » et coûte de ce fait plus cher, le bon docteur des familles va en prescrire un qui soit à la fois remboursé et « efficace », c’est-à-dire (comme par hasard), un tout nouveau tout beau, juste lancé, et lui, bien cher (frais de recherche, vous savez), mais beaucoup plus cher (et donc qui pèse à plein sur la Sécu).

        Le système marche à fond pour renouveler les gammes de l’industrie pharmaceutique aux frais de la Sécu.

        Et le plus beau, c’est que les médicaments une fois arivés au stade de non-remboursement total, libérés de la « tutelle infâme » de l’Etat, augmentent leur prix !

        Quant aux médicaments jamais remboursés (destinés à « mieux vivre », paraît-il, mais quand même pas à soigner, faut pas éxagerer), il valent leur plus que leur poids d’or. Par exemple, le C..., la nouvelle génération de pilules qui fait mieux que le V... (vous savez la pilule bleue qui soutient les défaillants, enfin vous voyez bien...), coûte 55 Euros (je dis bien : cinquante-cinq) pour une boîte de... 4 comprimés ! (renseignement obtenu hier chez mon brave pharmacien). Si vous me passez l’expression, ça fait cher le coup.

        En bref, on se fait avoir des deux côtés, la Sécu aussi, et les labos, eux, engrangent...

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