Les grandes vacances de Monsieur Hulot
Des congés payés à la vacance du pouvoir... Jacques Tati pourrait bien se retourner dans sa tombe.
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Il était grand, maladroit, poétique, et irrésistible. C'était le Hulot de 1950.
Celui d'aujourd’hui est petit, trivial et écoeurant. C'est le Hulot de 2020.
Je me souviens, comme le soulignait Georges Pérec, de ce Nicolas, dans les années 80/90. C'était un journaliste brillant, ou tout au moins un animateur vivifiant.
J'écoutais son émission, alors que je n'avait de 15 ans, le samedi matin sur France Inter, allongé sur le tapis de ma chambre de gamin. J'avais l'impression de voyager et de découvrir le monde. Le monde venait à moi. Antipodes.
C'était l'âge d'or de la radio.
Puis il y eut la mutation Ushuaïa. A grands renfort d'hélicoptères, de caméras embarquées et de séquences brillamment mise en scène. La poésie et l'esprit de découverte à disparu petit à petit, au profit des campagnes publicitaires pour du gel douche.
Les protagonistes ont d'ailleurs toujours jeté un voile opaque sur cette accouplement contre-nature entre l'écologie et les industriels lessiviers.
J'attends le #metoo du shampoing. Avec impatience.
Et puis voilà que notre Hulot, 2e du nom se fait habilement enrôler par les plus grands communicants du monde moderne : Les Hommes politiques. Je sais, il en faut, et on n'a que ceux qu'on mérite. Pas faux. Mais c'est pas joli.
Entré au Gouvernement Macron en fanfare, sous les bravos, avec tambours et trompettes. Une sacrée belle prise !
Une prise du même type que le Mitterrand de la Culture, capturé par Nicolas Sarkozy quelques années auparavant.
Mais un beau jour de 2017, un grain de sable vient faire grincer la petite musique de l'Elysée.
Monsieur Hulot n'a pas fait que de sillonner le globe en quête de belles images, il s'est aussi frotté de la plus détestable manière aux femmes l'entourant.
Inutile de revenir sur les conditions, les opportunités, les témoignages. Le dossier semble bien fourni.
Certes, il n'est pas le seul, ni le premier, mais cela rend-il ses agressions acceptables ?
C'était quasiment toléré à l'époque. L'impunité leur assurait tous une relative tranquillité, qui leur permettait de tenter d'abuser de tout ce qui leur faisait envie.
Accusé ouvertement, Hulot trouve alors une alliée de choix : Marlène Schiappa, envoyée au front par Macron pour sauver le petit Nicolas. Elle qui, je vous rappelle, était censée défendre les intérêts et protéger les Femmes des prédateurs blancs.
Des bisous face caméras, des bras dessus, bras dessous à l'Assemblée, tout y passe.
Nicolas Hulot ne ferait pas de mal à une baleine, alors vous pensez bien, il est absolument incapable de toucher à une Femme. La République hypocrite était en marche.
Mais visiblement, la vague océanique se formait, le tsunami invisible commençait à monter, et nous avons assisté, un beau matin d'août 2018, à la première fissure.
Monsieur Hulot en pleurs, annonçant sa démission du Gouvernement, sur la radio qui l'avait vu naître. Étrange quand même. Un sacré goût à mer.
À l'époque, le réchauffement climatique avait bon dos. Il a préféré expliquer qu’il partait plutôt que d'assister à lente mise à mort de la planète bleue.
C'était en fait la sienne que l'on apercevait, au loin.
Vous voyez. On peut être à la fois, un brillant professionnel et un homme pitoyable. Un sale type et un modèle pour une génération de gamins, en même temps.
Maintenant, que va-t-il se passer ?
Les Femmes abusées se sont libérées mais ne seront jamais guéries.
Le prédateur est démasqué mais il ne sera jamais condamné.
C'est finalement sa fille, et son entourage qui vont payer le prix fort de la honte et du dégoût, sans jamais avoir eu un seul gramme de responsabilité dans cette sale affaire.
Je me pose réellement la question. Où est la vraie Justice ?
Il va partir en vacances Monsieur Hulot. Loin et longtemps. Habilement représenté par ses avocats à chaque convocation du Tribunal qui va tenter de démêler l'écheveau.
De toute façon, et comme toujours, ce sera une parole contre une autre. Pas de témoin. Pas de preuve. Et un classique non-lieu, façon DSK ou PPDA.
Monsieur Hulot de 1950 nous fait encore rêver et pleurer d'émotion, 70 ans après s'être imposé comme le gentil qu'on aimerait avoir dans notre famille.
Je ne sais pas ce qu'il restera du Monsieur Hulot de 2020 en 2090... Probablement plus rien.
Le baleines centenaires continueront de sillonner les océans, s’en battant les nageoires, dans une eau possiblement bouillante.
Et aux victimes de cet affreux personnage, qu'elles se rassurent, leur sort et leur destin est bien plus enviable que celui de leur bourreau.
Elles peuvent lever la tête, se redresser, et avancer, car elles ont l'intégrité et la noblesse pour elles. Nous les saluons et les admirons.
Aujourd’hui n’est pas un Jour de Fête.
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