Les utilitaires taillent la route
Nous vivons une époque moderne et pressée

« Je travaille, moi … ! »
Chaque fois qu'il m'est donné de circuler, surtout sur le réseau secondaire, je suis frappé, ou pour le moins désagréablement surpris, par le comportement routier des véhicules utilitaires. Monstres de puissance, les camionnettes modernes n'ont plus rien des gentilles alouettes et estafettes d'antan. Sous le capot il y en a des chevaux, et, au volant, des pilotes qui s'imaginent au-dessus des règles communes.
N'allez pas vous aventurer à faire la plus petite remarque sur l'excès de zèle du chauffard de service, il vous rétorquera d'un ton sans appel : « Je travaille, moi … ! », argument sans appel qui doit faire, bon an mal an, une longue liste d'accidentés du travail et de morts sur le bitume. Nous pouvons admettre cette excuse au nom de l'impayable aphorisme : « Le temps c'est de l'argent ». Seule cette explication pourrait justifier une posture parfaitement ridicule.
À bien y regarder, il y a une part de vérité dans ce propos. Le plus souvent, le pauvre homme qui met ainsi en danger sa propre vie et celle des autres usagers de la route, n'a guère le choix. Il doit tenir un carnet de route, respecter des quotas de livraison (surtout pour les coursiers, les véritables forçats de nos routes) qui sont établis en dehors de toute considération sécuritaire.
L'hypocrisie du « toujours plus vite » cher à Chronopost et autres organismes négriers analogues, se moque totalement du sort de celui qui tient le volant et la cadence. Le programme implique clairement des débordements, des prises de risque, des infractions et, quand celles-ci sont constatées par les forces de l'ordre, l'hypocrisie redouble.
Parfois l'amende est pour celui qui n'avait d'autre solution que de transgresser. Souvent, la structure s'arrange pour retrouver, en interne, le malheureux incriminé afin de le faire cracher au bassinet et obérer d'autant un salaire de misère, tout en gardant officiellement le silence, quant à son identité, pour que l'exploité continue de l'être en conservant ses points. J'espère que vous m'avez suivi.
Ainsi, sur nos routes, il existe des gens qui ne tombent pas systématiquement sous la règle commune. Ils échappent aux retraits de points afin que le spectacle continue, que les colis persistent à battre des records de vitesse. Tout cela, naturellement, jusqu'à la faute de trop qui libérera définitivement un nouveau poste à pourvoir … Paix à l'âme du défunt !
Ces méthodes sont totalement inacceptables ; elles attestent d'une complicité de tous, elles favorisent les accidents et encouragent des sociétés qui traitent leurs employés dans un mépris sans égal. Il serait temps de repenser un peu le contrôle de ces véhicules au-dessus des lois et des mesures élémentaires de prudence.
Il serait temps d'imposer le mouchard dans ces véhicules qui, pour d'obscures raisons pas toujours avouables, échappent à l'obligation faite aux poids lourds. Nous imaginons facilement que nos chers législateurs ont dû subir des pressions pour permettre à cette flotte d'échapper à un nécessaire contrôle. La sécurité routière ne préoccupe nos élus que lorsqu'il s'agit de faire payer les usagers lambda.
Ne pas décourager les travailleurs de chez nous pour ne pas ouvrir plus grande encore la brèche laissée aux professionnels étrangers qui s'exonèrent largement des règles nationales. On connaît la musique et on constate chaque jour sur nos routes que le « deux poids, deux mesures », est devenu un principe de gouvernance dans notre cher pays.
N'ayant rien à vendre ni rien d'autre à transporter que ma modeste personne, je suis taillable à merci quand, pour d'autres, on ferme les yeux au nom de la terrible loi du marché. Foutaises que tout cela : il serait des plus raisonnables de mettre un frein aux utilitaires, filant tel l'éclair, dépassant au mépris des limitations de vitesse et des interdictions multiples, se comportant enfin de manière si peu courtoise !
Prudemment leur.
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