Loi anticasseurs, répression et brutalités policières : où va mon pays
D’ordinaire un article de blog est une construction textuelle argumentée à propos d’un sujet de réflexion. Aujourd’hui, dans le climat de révolte ou d’insurrection que vit la France où l’Etat semble ne rien entendre de ce que disent les citoyens et n’a plus qu’une politique : la force, la coercition et la brutalité policière, aujourd’hui où mon beau pays risque de connaître à nouveau des heures sombres où les libertés s’éteindront sous le joug d’un Pouvoir autoritaire, narcissique et sans respect, aujourd’hui j’ai décidé de publier la lettre que j’ai envoyée à une quinzaine de député-es. Faute de pouvoir aller manifester en raison de mes difficultés à me déplacer je signe ici ma maigre contribution au mouvement des Gilets Jaunes que je connais bien. Je ne pouvais pas me taire, ni faire moins, alors que durant 50 ans (j’ai créé ma première association : un club UNESCO, j’avais 13 ans) j’ai consacré la majeure partie du temps de ma vie à aider les autres.
Madame la députée, Monsieur le député,
J’avais l’intention de vous écrire une longue lettre dans laquelle j’aurais développé un argumentaire fondé sur l’histoire, la philosophie et le droit pour vous parler du « peuple » et de ses libertés comme de ses désirs de bien-être. A quoi bon, vous allez voter la loi anticasseurs proposée par le Gouvernement ; à peine maquillée vous pensez qu’elle sera admissible alors que le fond demeurera et qu’au moindre incident le fard dégoulinera ouvrant la voie à toutes les exactions d’Etat. Alors, je me limite à mettre un article[1] en pièce jointe, vous l’apprécierez peu puisqu’il émane d’un journal guère apprécié par votre mouvement. Mais, au-delà de votre mandat de député, mère, père, grand-mère, grand-père, plus simplement Femme ou Homme que suscite en vous la photo de cette très jeune fille ?
Comme le Ministre de l’Intérieur vous m’expliquerez que cela n’est que la conséquence de l’inconséquence et de l'irresponsabilité des Gilets Jaunes. Les finiront par disparaître soit qu’ils auront été envoyés à l’hôpital victimes des armes de la police voire mort comme cette dame de 80 ans tuée chez elle par une grenade envoyée (par erreur) à travers sa fenêtre, soit ils se tairont parce que vos juges les auront envoyés en prison. C’est comme ça depuis toujours, l’usage de la force finit toujours par éteindre les révoltes. Le plus et mieux pourvu en armes gagne mais pour autant a-t-il réglé le problème ? En somme pensez-vous que la fin justifie n’importe quel moyen ?
Là, j’avais envie de vous rappeler quelques morts sous les coups de la police : Vital Michalon, 31 ans, le 31 juillet 1977, Malik Oussekine, 22 ans, mort en octobre 1988, Rémi Fraisse, 21 ans, tué à Sivens en 2014… A quoi bon, vous approuvez une stratégie et vous votez une loi qui nous ramènent aux pires époques de notre histoire, pourtant on peut maintenir l’ordre différemment comme le montre cette belle lettre du Préfet Maurice Grimaud, Préfet de Police de Paris en 1968, adressée à chacun des policiers chargés du « maintien de l’ordre » dans la capitale : « Je m’adresse aujourd’hui à toute la Maison : aux gardiens comme aux gradés, aux officiers comme aux patrons, et je veux leur parler d’un sujet que nous n’avons pas le droit de passer sous silence : c’est celui des excès dans l’emploi de la force.
Si nous ne nous expliquons pas très clairement et très franchement sur ce point, nous gagnerons peut-être la bataille sur ce point, nous gagnerons peut-être la bataille dans la rue, mais nous perdrons quelque chose de beaucoup plus précieux et à quoi vous tenez comme moi : c’est notre réputation.
Je sais, pour en avoir parlé avec beaucoup d’entre vous, que, dans votre immense majorité, vous condamnez certaines méthodes. Je sais aussi, et vous le savez avec moi, que des faits se sont produits que personne ne peut accepter. Bien entendu, il est déplorable que, trop souvent, la presse fasse le procès de la police en citant ces faits séparés de leur contexte et ne dise pas, dans le même temps, tout ce que la même police a subi d’outrages et de coups en gardant son calme et en faisant simplement son devoir… »
Pour Maurice Grimaud : “ Frapper un manifestant à terre, c’est se frapper soi-même.”
Je vous remercie de l’attention que vous aurez porté à ce trop long message et, bien qu’il semble que ce soit trop tard, à votre disposition pour toute discussion : je ne suis pas en Gilet Jaune, je marche à l’aide d’une canne et avec des chaussures orthopédiques, mais je suis allé sur certaines manifestations : alors j’ai vu et entendu.
Je vous assure de mes salutations les meilleures.
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