Lutte contre l’illettrisme, un bilan mitigé
Alors que le journal Les Echos annonce dans ses colonnes du 14 août que les conseils régionaux et les entreprises ont intensifié leur action de lutte contre l’illettrisme, par les plans de formation, la détection de l’illettrisme reste difficile. Surtout, un rapport d’évaluation de l’IGAS constate que les actions menées en application des objectifs fixés par la loi de 1998 sont disparates et que les résultats restent modestes.
Rappelons, en avant-propos, la différence entre illettrisme et analphabétisme. Etre illettré, c’est ne pas disposer, après avoir été scolarisé, des compétences de base pour faire face de manière autonome à des situations courantes de la vie (lire un panneau, des consignes de sécurité, le bulletin scolaire de son enfant, faire un chèque...). Pour les personnes n’ayant jamais été scolarisées, on ne parle pas d’illettrisme, mais d’analphabétisme.
L’illettrisme a, pour la première fois, été chiffré en France par une enquête qui a été réalisée en métropole. Cette enquête fait tomber quelques préjugés couramment admis et donne des indications utiles qui permettront de lutter de manière plus efficace contre ce fléau. L’enquête a été menée en 2004 et 2005 auprès d’un échantillon de plus de 10 000 personnes âgées de 18 à 65 ans et résidant en France métropolitaine. Elle révèle un chiffre global impressionnant de 3,1 millions de personnes en situation d’illettrisme, soit 9 % de la population âgées de 18 à 65 ans. Mais, surtout, les résultats de l’étude bousculent plusieurs idées reçues, révélant notamment le fait que seuls 11 % des illettrés sont au chômage alors que 57 % ont un emploi.
Cette enquête a donc montré que plus de la moitié des illettrés travaillent. Par conséquent, la solution peut passer par des actions de formation pour ces salariés. Le journal Les Echos rapporte justement que des améliorations sont apparues dans la lutte contre l’illettrisme dans l’entreprise. Avec l’aide des Conseils régionaux, les entreprises ont intensifié leur action, désormais intégrée dans les plans de formation. Sont cités en exemple : Peugeot, Danone, mais aussi le Conseil régional de Picardie, le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT), les organismes de travail temporaire (FAF TT). "Il y a eu un changement d’attitude quand les entreprises ont réalisé qu’1,8 million d’illettrés étaient des salariés", déclare Marie-Thérèse Geffroy, à la tête de l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme (ANLCI).
L’Etat, lui, paraît beaucoup plus lent à agir. La lutte contre l’illettrisme est-elle vraiment une grande cause nationale ? On peut se poser la question au regard des piètres résultats constatés par l’IGAS. La lutte contre l’illettrisme n’est toujours pas "devenue une priorité nationale", déplore le rapport. L’Etat agit "avec une organisation très perfectible et une conviction encore insuffisante", considère l’IGAS.
Il existe même, depuis 2000, une agence nationale de lutte contre ce fléau, l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme (ANLCI). Celle-ci a réussi à sensibiliser l’opinion sur l’importance de ce problème. Elle a dressé des constats chiffrés dans les régions en 2002. Mais "l’effort engagé par l’Etat n’apparaît cependant pas à la hauteur des enjeux, d’autant qu’il n’a pas eu d’effet d’entraînement" localement, dit la mission, qui fait aussi une liste de recommandations qui sera - ou ne sera pas - suivie par le mammouth étatique. La lutte contre l’illettrisme pourrait cependant être déclarée grande cause nationale en 2008 ou 2009. Il est urgent que les pouvoirs publics s’associent aux entreprises pour mettre en œuvre "un plan volontariste de formations" à l’écrit, conclut l’IGAS.
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