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Accueil du site > Actualités > Société > Pas Tati, pas Tautou !

Pas Tati, pas Tautou !

Patati patata, entend-on, c’est la RATP qui ratatine la libre expression en imposant sa censure aux photos des artistes fumeurs. Et bien non, c’est la loi Evin qui le veut, la RATP ne fait que l’appliquer et il est rassurant qu’en France les services publics respectent encore la légalité. Le reproche que l’on peut faire à la RATP, c’est d’avoir flanqué un jouet grotesque jaune fluo dans la bouche de Jacques Tati ! Là est le vrai scandale, là est le mauvais goût le plus accompli ! Pas Tati, pas Tautou et demain pas Gainsbourg si Madame Bachelot ne fait pas modifier la loi pour prévoir ces cas spécifiques.

Dura lex sed lex. Notre Audrey auburn qui incarne Coco Chanel ne passera pas avec sa clope sur les murs du métro.

T’as pas le look Coco !

"La cigarette de Coco Chanel a été refusée par Métrobus, la régie publicitaire de la RATP alors que pour tous les autres afficheurs, elle ne posait aucun problème", a déclaré Olivier Snanoudj, directeur général adjoint de Warner France, qui a produit le film d’Anne Fontaine sorti mercredi. Certes, mais la RATP applique la loi, toute la loi, rien que la loi. La régie publicitaire de la RATP s’en tient à l’application de la loi Evin, qui interdit toute publicité directe mais aussi indirecte pour le tabac. En fait, c’est le distributeur de Coco qui a méconnu la loi en proposant des affiches non conformes à la règlementation.

Et si c’était pour se faire une bonne pub gratuite après la même mésaventure dont fut victime, ces derniers jours, la Cinémathèque française qui vit la photo de son affiche littéralement massacrée par la substitution d’un moulin à vent à la légendaire pipe de Jacques Tati ? De la publicité gratuite dira le promoteur du film ? Mais non, mais non, c’est pour alerter sur la censure, sur l’inadéquation de la loi ? Oui, ou dans un but philantropique aussi peut-être ? Ce serait une question à creuser : quand la décision de placarder cette affiche Coco Chanel a-t-elle été prise ? Comment le publicitaire ne pouvait-il pas être informé de la loi ("Nul n’est censé ignorer la loi") et du bruit autour de l’affaire Tati ? Faut-il s’attendre à ce que le distributeur du film sur Gainsbourg ("Serge Gainsbourg, vie héroïque" de Joann Sfar) nous refasse le même coup médiatique ? Ah non ! Le coup de la clope censurée une fois, ça va, trois fois : bonjour les dégâts !

"Ceci n’est plus une pipe"

Dès connaissance de la suppression de la pipe de Jacques Tati, les esprits se sont échauffés. La Cinémathèque a qualifié d’"incident burlesque" dans "l’esprit de Jacques Tati" la décision prise par Metrobus, s’indigant du zèle, selon elle, dont feraient preuve les fonctionnaires dans l’application des textes. Il est vrai que nous vivons des temps où la loi s’accommode au gré des fortunes des uns ou de autres mais quand même, peut-on reprocher au service public de respecter la loi ?

Le véritable scandale, c’est le mauvais goût le plus total avec lequel on a osé fiche un moulin à vent jaune sur une photo célèbre du cinéaste et acteur Jacques Tati. La pâleur des couleurs de ladite photo n’en fait que ressortir le jaune de l’objet importun. Mais où sont passés les cinéphiles de la RATP ? Pourquoi ont-ils laissé saboter cette belle photo ?

Loi de mauvais aloi

L’affaire va loin : l’Observatoire de la liberté de création de la Ligue des droits de l’Homme (LDH) a lancé une pétition en ligne pour le retrait de "la ridicule hélice jaune qui masque" la pipe de Monsieur Hulot, héros des films de Tati. Une attteinte grave aux droits de l’Homme donc ? On se demande si le ridicule des réactions ne va dépasser le ridicule de la décision !

Pour le distributeur de Coco Chanel, pourtant informé de la loi et de l’affaire Tati, la RATP a agi scrupuleusement : "Nous sommes dans des lieux qui sont des services publics, où nous devons respecter la loi. Nous avons donc demandé au distributeur de Coco avant Chanel de nous fournir d’autres visuels, ce qu’il a fait". Ouf ! Pas de jouet jaune cette fois-ci.

La loi Evin est mise en cause à juste titre puisqu’elle n’a pas prévu les cas des poses photographques de personnalités pour lesquelles la cigarette, le cigare ou la pipe, est un accessoire parfois incontournable. C’est la position défendue pour le cas Chanel où la pose naturelle cigarette à la main traduirait la forte personnalité et la modernité de Coco Chanel et l’idée de la femme affranchie.

Dans un éclair d’intelligence, la ministre de la Santé Roselyne Bachelot a lancé la semaine dernière : "Ah non, moi, je ne suis pas pour enlever la pipe à Jacques Tati !" Quant à Claude Evin, il jure par tous les saints que sa loi ne dit pas ce qu’il y est écrit. Il a jugé la suppression de la pipe "ridicule". "On n’est pas dans cette situation de publicité indirecte, il s’agit d’un patrimoine culturel qui s’inscrit dans notre culture cinématographique". Pourtant, la loi Evin de 1991 est bien une loi d’une extrême rigueur. Les tribunaux l’appliquent d’ailleurs avec sévérité : sanctions lourdes pouvant aller jusqu’à l’emprisonnement. La jurisprudence est claire : On ne peut représenter une personne avec un produit du tabac, pipe, cigarette ou cigare. On comprend dès lors la position prudente de la RATP qui ménage les deniers du contribuable. 

En outre, ce serait encourir le risque d’être attaqué par des associations de lutte contre le tabagisme. 

Modifier la loi ? C’est la voie raisonnable puisque les tribunaux n’ont jamais été saisis de cas d’exception de ce genre. Jean-Pierre Teyssier, qui préside l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité, plaide pour un assouplissement de la loi. "Quand une personne a joué un rôle culturel important, de Gainsbourg à Simenon, que la cigarette ou la pipe est un attribut inséparable de sa personnalité et que l’annonceur est sans rapport avec l’industrie du tabac, il pourrait y avoir une exception", a-t-il dit à l’AFP.

La RATP ne peut pas, de sa propre initiative, décider de s’exonérer d’une obligation légale stricte, surtout qu’elle se veut exemplaire en posant des exigences fortes à sa régie publicitaire Métrobus. Au législateur donc de trancher.

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11 réactions à cet article    


  • Trashon Trashon 23 avril 2009 10:42

    Qui de ceux outré par le masquage de la pipe de Tati et de la clope de Tautou se sont élevé contre la suppression du mégot de Lucky Luke et quelle différence finalement entre ces 3 interdictions ?


    • Sandro Ferretti SANDRO 23 avril 2009 10:43

      Il n’empéche que la connerie des bien-pensants et des biens -pensances actuelles ( sur tabac, alcool , ecologie) est assez insondable.
      Pourtant, peu savent la détecter. Ils se contentent encore (y compris sur ce site) de pourfendre encore , 50 ans après, les bien -pensances politiques ou économiques des années 70, sans voir l’énormité du politiquement correct actuel de nos vies quotidiennes.

      Dans 30 ans (pour ceux qui le verront) , on en ricanera sans doute.
      En attendant, on continue à « faire nos américains » ,en se croyant très malins, bien propres et sauveurs de l’humanité... Pathétique.


      • Sandro Ferretti SANDRO 23 avril 2009 15:09

        Ave, Furtif

        J’ai bien reçu ta dernière carte postale, mais j’hésite entre le pain de sucre et « Capri, c’est fini », tout en penchant, comme Pise, pour la 2 eme hypothèse.
        A moins que ce ne soit Ischia, mais Sempre n’est plus là pour nous renseigner.

        PS : @ Taverne : pardon pour la digression, mais votre pseudo ne peut qu’encourager les dérives de ce genre, alcoolisées ou non...


      • LE CHAT LE CHAT 23 avril 2009 11:52

        c’est aussi con que ceux qui on la prétention de faire réecrire les vieux albums de Tintin !
        la bienpensance est une vaste connerie !


        • La Taverne des Poètes 23 avril 2009 12:20

          « Pas Tintin, pas Titi ! »

          Pas Titi parce que Le Chat va le croquer.


        • souklaye 23 avril 2009 13:58

          Ce que la religion se permet, la nicotine l’a perdu. Les lobbys ne sont plus ce qu’ils étaient.
Nous possédons un léger recul pour apprécier l’intérêt efficient ou relatif de l’interdiction de fumer en dehors du cadre intime. Fumer tue. Obéir nuit.

          Pour d’obscurantistes raisons de santé publique et de lifting de la bienséance, l’époque est au déni de sa nature, sous le joug du commerce équitable, du tourisme solidaire et de l’écologie obligatoire.
Une impression de liquidation judicaire à l’échelle mondiale me pousse à penser qu’il faut effacer toutes les traces de dérive addictive et de cannibalisme économique pour les futurs historiens.

          La suite ici : http://souklaye.wordpress.com/2009/04/09/note-de-service-controle-social-et-degats-collateraux/


          • Fergus fergus 23 avril 2009 17:27

            Bonjour, La Taverne.

            Il est évident que l’on nage en plein délire avec cette histoire de pipe.

            Cela dit, la RATP n’a effectivement fait qu’appliquer la loi, après consultation de son service juridique, le texte n’ayant pas prévu d’exclure de son champ d’interdiction les représentations d’objets appartenant au patrimoine. Aussi absurde que cela soit, c’est du carré sur le plan juridique !

            Quant au moulin, il n’est en aucun cas de la responsabilité de la RATP (ou de la régie Métrobus), mais de... Macha Makeïef, commissaire de l’exposition elle-même !

            Confrontée à un risque de refus de la RATP, elle est d’abord entrée dans une colère noire avant de proposer cette alternative (acceptée par la RATP) pour sauver sa campagne d’affichage. Et sans doute persuadée que ce ridicule objet ferait jaser... au profit de l’exposition.


            • Neris 26 avril 2009 11:15

              Vous vous souvenez de la dernière version télévisée du « Bossu » ?

              Où Lagardère n’épouse plus Aurore mais la mère d’Aurore !!

              C’est vrai quoi, épouser une gamine de 16 ans à 40 ans et en plus qu’on a élevé et vu grandir ! sale pédophile !

              Je n’en peux plus de toutes ces conneries.


            • bede 23 avril 2009 18:30

              Curieux quand une association de non-fumeurs, pour se faire un peu de pub et beaucoup de fric a assigné la SNCF parce qu’elle laissait fumer dans le hall d’une gare parisienne, lieu public à tous vents, personne n’a crié à la connerie. Et pourtant............

              Je ne me souviens plus de la décision de justice, mais chat échaudé...... La RATP s’est méfiée et elle a eu raison. La connerie est à trouver du côté du défenseur d’une loi qui dans de nombreux cas n’était et n’est pas applicable.


              • bestof32 bestof32 23 avril 2009 20:46

                Encore une tentative de manipulation des pauvres gogos que nous sommes.
                Cette affaire me semble cousue de fil blanc, en effet, nombre de lois sont à l’habitude appliquées avec beaucoup plus de discernement quand elles ne sont pas tout bonnement contournées ou oubliées, par les pouvoirs publics eux-mêmes.
                Le zèle présent de la RATP et le battage médiatique qui est fait n’ont qu’un but : amender cette loi et probablement (un vendredi soir à 3h00 du matin comme d’hab.) la vider de sa substance.
                Longue vie aux lobbyes...


                • Emin Bernar Paşa 26 avril 2009 23:12

                  il faut interdire la cigarette aux terrasses des cafés !
                  les cafetiers étendent leurs terrasses pour gagner plus !
                  la sécurité sociale paiera les frais !
                  à bas les profiteurs ! vive la République !
                  (interdire la pipe de Tati cest de la connerie bien sur, digne de la ratp !)

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