Pédophilie et médias : Un mariage à conséquences [Part. 3/3]
Lorsque les affaires de pédophile font les gros titres de nos journaux, ce n’est pas en tant que sujet de société qui pousse à la réflexion, mais en tant que fait-divers qui met en exergue les passions. Ainsi on oublie vite les bouc-émissaires sacrifiés sur l’autel de la vindicte populaire et l’influence de ces propos sur l’opinion publique, les professionnels concernés, et les pédophiles eux-mêmes...
Partie 3 : La diabolisation de la pédophilie empêche toute réflexion sensée sur le sujet
Le tabou est là. A tel point que dénoncer ce tabou nous ferait presque passer pour un pédophile. Malgré les Lewis Carroll, Roland Barthes, et Roman Polanski plus récemment, le thème de la pédophilie reste un interdit. On n’en parle pas, on n’y pense pas. Voilà la règle de savoir vivre à appliquer en occident. A tel point que même les psychanalystes refusent d’y réfléchir. Selon Serge André [3] « pour eux, recevoir un pédophile en analyse est une chose quasiment inconcevable » et ils considèrent « qu’il est contre-indiqué d’ouvrir l’accès de l’expérience analytique au pédophile. » Ainsi, en dehors de Serge André et quelques uns de ses collègues du courant Lacanien, le soin est laissé aux psychiatres de « traiter » les pédophiles sans pour autant apporter de réflexion concrète sur le sujet, hormis la liste des drogues indiquées pour ces cas...
Cette absence de réflexion se fait sentir à tous les niveaux de la société. A commencer par les proches des victimes. Dans une affaire citée par France 2[6], où une adolescente – suite a de longues discussions sur internet – s’est déshabillée devant sa webcam, la réaction de la mère illustre bien cet état de fait. Lorsque deux jours plus tard la vidéo est diffusée, et que l’adolescente se confie à elle, son premier soutien est une gifle. La mère dit s’être « senti violée ». Accentuant ainsi la force du traumatisme que subira la jeune fille. On imagine alors bien comment, dans le cas d’un acte de pédophilie, la réaction des proches peut devenir plus néfaste que salutaire.
Pour les enfants a Agde qui auraient subi une fellation – acte déjà traumatisant en lui-même – le calvaire ne s’arrête pas là. Après la plainte déposée le 13 du mois, ils sont conduits à l’hôpital de Béziers le 15 puis vers un médecin légiste de Montpellier le 16, pour être ensuite entendus « a plusieurs reprises par des psychologues » et enfin par la police « lors d’une audition sous caméra », précise l’avocat de la mère. Une manière de s’assurer que, même si l’acte n’était pas avéré, les enfants subissent un traumatisme. A l’heure d’aujourd’hui, on ne peut décemment pas se sortir d’une telle affaire sans en récolter les fruits, aussi pourris soient-ils.
En dehors des professionnels concernés et de la société civile qui subissent le joug des « bonnes mœurs », il ne faut pas oublier un dernier protagoniste qui prend part à cette bataille d’idées : le pervers pédophile. La radicalisation des idées relatives à la pédophilie auront en effet sur lui une toute autre influence. Car, toujours d’après Serge André, [3] « le monde dans lequel le pervers se voit introduit [...] est une comédie, une farce dont le côté grotesque est souvent manifeste. » Et plus nous tendrons vers le « grotesque », plus le pervers sera conforté dans l’idée qui est la sienne : la loi, l’autorité et l’interdit sont « de pures conventions de façade ». Car pour le pédophile incarné par l’abbé de la pièce de Montherlant [17] : « Dieu a créé des hommes plus sensibles que les pères, en vue d’enfants qui ne sont pas les leurs, et qui sont mal aimés ».
Il serait donc grand temps d’appeler un chat un chat. Temps de remettre le belge, le pédophile et le tueur en série chacun a leur place, débutant enfin une réflexion sur le sujet en mettant de coté toute les passions. Pour tenter de résoudre les problèmes soulevés par la pédophilie et à défaut d’y trouver des solutions, arrêter d’empirer la situation.
[3] Psychanalyste belge né en 1948, décédé en 2003 et qui a suivi plusieurs pédophiles en séance. Il a notamment fait une conférence a Lausanne intitulé la signification de la pédophilie dans la quelle il se sert de son expérience avec des sujets pédophiles pour tenter une définition de la pédophilie.
[6] L’émission Les Infiltrés de France 2 dont l’axe est le journalisme d’immersion, a centré l’un de leurs numéros sur ceux qu’ils nomment les « prédateurs sexuels ». Ce numéro la apparait par ailleurs en premier sur Google vidéo lorsque on recherche : Les Infiltrés.
[17] La ville dont le prince est un enfant, pièce de théâtre en trois actes d’Henry de Montherlant.
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