Race, genre, voile : l’avenir a le parfum du passé
Podemos, mouvement phare de la contestation « citoyenne », fera-t-il ouvrir des plages réservées aux femmes musulmanes voilées ? Des membres du mouvement, espagnols convertis à l’islam, le proposent.
Qui se ressemble…
L’argument ? Il existe des plages réservées aux nudistes et aux gays, pourquoi pas des plages pour d’autres groupes disposant de leur propre spécificité ?
Il y a quelque chose d’assez normal dans ce phénomène : les gens du même bord se retrouvent ensemble. Les people fréquentent les people, les prolos ne sortent pas de leur loyauté de groupe, les chef vont avec les chefs, et les princes avec les princesses. Avec parfois un ascenseur social motivé par la beauté d’une femme ou par la force ou l’audace d’un homme.
Nous sommes attirés par qui nous ressemble : âge, couleur, style vestimentaire, milieu social, etc, et le proche est plus proche que le lointain. Les humains s’agrègent en groupes. Ils fraient par affinités.
Tout groupe ou corporation tend à privilégier ses membres. Le bien commun, la chose publique, ne sont universels qu’idéalement. Dans les faits, et à part quelques exceptions, chacun et chacune travaille pour soi et pour son camp, si ce camp peut lui assurer quelques avantages.
C’est ainsi qu’à part le projet de plages réservées aux musulmanes en Espagne, à Paris une commission féministe de Nuit debout réserve une de leurs assemblées quotidiennes uniquement aux femmes et aux minorités de genre.
Séparons-les
Ce qui ne va pas sans faire grincer les esprits. Ainsi ce dialogue surréaliste relevé par une journaliste du Monde, Camille Bordenet :
« Vous vous comportez comme des oppresseurs en ne respectant pas notre choix ! », s’énerve une participante en s’adressant à un quinquagénaire décidé à rester. Lui s’emporte : « Je n’accepte pas, sur une place publique, d’être dépossédé du débat et d’être choisi comme cible ! Si vous rentrez dans une logique d’exclusion et de séparation, c’est plus Nuit debout mais Mort debout ! »
Que diraient-elles si les hommes faisaient de même ? S’ils commençaient à parler entre eux des multiples oppressions dont ils sont victimes, dans la société et dans le couple ?
Ce n’est pas tout. Le groupe PIR (Parti des Indigènes de la République), animé entre autres par Houria Bouteldja de triste mémoire, a prévu d’organiser cet été un Camp décolonial. Ce camp est ouvertement interdit aux blancs.
Entre ces deux communautés d’exclusion, féministe et antiraciste, la cible est claire : c’est l’homme blanc cisgenre (hétérosexuel).
Boubou
Pour moi le regroupement par communautés et affinités fait partie d’une normalité. Que des femmes souhaitent parler entre femmes, ou des hommes entre hommes, ne me choque pas plus que cela.
Que des africains déambulent en boubou dans nos rues, ou que des musulmanes portent délibérément le voile et des indiennes le sari, fait partie à mon sens de leur liberté individuelle dans notre société.
Donc je ne condamne pas ces décisions malgré leur relent d’apartheid grégaire dans le contexte où elles sont appliquées. Mais je refuse les connotations associées à ces exclusions, en particulier la connotation majeure : il ne faut pas se livrer face à l’oppresseur.
Je dis que l’oppression n’est pas le monopole de l’homme blanc cisgenre.
Un monde sans oppression impose de renoncer à désigner des ennemis, car qui dit ennemis dit rapport de force donc tôt ou tard nouvelle oppression. Rien que d’habituel dans la clanisation de la société, logique grégaire que l’époque contemporaine n’annule pas. Mais rien de nouveau non plus. L’avenir a le parfum du passé.
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