Rapport d’évaluation de la Loi relative au rattachement de la Gendarmerie au ministère de l’Intérieur : une démonstration d’auto-congratulation
Les deux parlementaires missionnés pour rendre ce rapport n’ayant pas jugé utile de répondre aux courriers qui leur ont été adressés par l’Association Gendarmes et Citoyens, c’est dans les 43 pages de ce compte rendu qu’il nous appartient de mesurer le poids qu’ils accordent à nos observations. Ayant eu l’occasion de lire des réponses à divers questionnements formulés aux membres du gouvernement ou aux parlementaires, les arguments particulièrement « passe-partout » habituellement employés n’auraient su nous satisfaire.
Pour remplir leur mission les deux parlementaires ont rencontré de hauts responsables de
S’agissant de l’étendue géographique de l’enquête on se rend compte qu’en dehors de la zone de défense de Metz, des régions Poitou-Charentes et Midi-Pyrénées les deux parlementaires se sont « déplacés » au niveau départemental dans l’Aveyron, dont Mme Escoffier est Sénatrice et dans l’Isère dont M. Moyne-Bressand est député. Le tout a été couronné par leur présence à deux cérémonies de sorties d’école des lieutenants de police à Cannes-Ecluses et officiers de Gendarmerie à Melun.
On ne saurait reprocher aux deux parlementaires de ne pas avoir rencontré plus de personnes concernées sur une zone plus large car le délai imparti, un peu plus de deux mois pour rendre « leur devoir », était particulièrement court ce qui pourrait laisser penser à un manque d’intérêt réel pour le sujet.
L’introduction pour la présentation du rapport est claire : « La mission a été confortée dans la conviction qui était la sienne de la bonne adaptation de cette loi à une évolution majeure de
Loi du 3 août 2009 entre opportunité et pugnacité :
La réforme était-elle inéluctable ? Oui car il faut conjuguer modernité et richesse de la tradition (on quitte les brodequins à clous et on garde les casernes).
Non si on se réfère aux valeurs et principes symbolisés par l’insigne de l’arme.
La loi « défendue » est un moyen terme entre tradition (des militaires soumis et silencieux) et modernité (mutualisation des moyens performants mis en place depuis longtemps).
S’en suit une explication de texte destinée à faire admettre (ou croire) que cette nouvelle politique initiée dans la « subtile alchimie de
On nous annonce tout de suite que « la préparation du budget
S’agissant d’un débat interne aux armées nous avons droit à du « grand art ». Après avoir souligné combien les textes anciens avaient codifié l’organisation et le service de
Viennent ensuite des paragraphes destinés à donner du sens à ce rattachement. On y trouve le symbole donné par la présence d’un policier et un gendarme à la grille de
Politique de sécurité, réponses opérationnelles qui renforcent l’efficacité de l’action de l’Etat :
Nous devons prendre acte qu’il est reconnu que sur le terrain police et gendarmerie ont appris, avant
Concernant la territorialisation et la mise à disposition des Préfets en conservant la chaîne hiérarchique, les problèmes de subordination et les relations d’autorités, la mission n’a pas trouvé de solution et il est probable que longtemps encore il existera une défiance des uns à l’égard des autres avec des abus d’autorités.
S’agissant de la police judiciaire il est dit que les magistrats conservaient le libre choix des services chargés d’une enquête. J’ignore si les magistrats de Paris ont été consultés, eux qui ne voient plus les gendarmes qu’en temps que chargés d’escortes. Toujours sur le même sujet il semblerait que les magistrats soient satisfaits des réunions de coordination des divers services, comme si elles n’existaient pas avant 2009. Il apparaît que l’autorité préfectorale s’immisce parfois dans le rôle judicaire.
Un petit paragraphe tente de justifier l’abandon de la réquisition en maintien de l’ordre en précisant que le Préfet n’avait plus lieu de requérir puisqu’il est maintenant responsable de l’organisation et de l’emploi des forces de sécurité.
Le ministère de l’Intérieur et les directeurs généraux ont en charge « la construction d’une organisation rassemblée, cohérente et forte de ses différences ». Très jolie formule dont la mise en application ne serait pas simple si, en définitive, tout n’était pas sous l’autorité des Préfets. On constate que chaque département gère ses problèmes sous l’autorité des Préfets et qu’ensuite les retours d’expériences sont adressés aux directions qui ont en charge de les « acter ». Tout ceci grâce à une coopération opérationnelle renforcée dans les agglomérations et les territoires (circulaire CORAT). Les GIR existaient on les départementalise à Grenoble, les UTEQ, les UMIR et d’autres structures ont été créées. Nous pouvons nous interroger sur leur efficacité dans la mesure où elles ne semblent pas vouloir se généraliser. S’agissant des réunions ouvertes à de nombreux intervenants elles ont tendance à se multiplier mais semblent entraîner des craintes sur des indiscrétions inopportunes.
Le principe de coordination opérationnelle étant posé arrive l’évocation de la mise à disposition des moyens pour éviter à l’un ou l’autre service d’avoir à s’en doter. Si une complémentarité des laboratoires centraux (équilibrée ou non) est acquise on sait pertinemment qu’en matière de moyens aériens, nautiques, cynophiles, police technique, véhicules spécifiques et motocyclistes, la gendarmerie en est largement pourvue ce qui représente un gros investissement sur son budget. Il ne faudra donc pas s’étonner de voir une mutualisation déséquilibrée.
Différentes structures ont été créées à grand renfort de sigles, l’une ou l’autre n’en est pas toujours satisfaite estimant qu’on lui retirait des prérogatives, la mission reconnaît que ces spécialisation devront être éprouvées et aménagées dans le temps. Certaines uniformatisations sont envisagées mais on peut douter de leur efficacité quand on sait que dans un même service elles sont parfois difficiles à mettre en place. On connaît également avec quelle réticence un service de renseignement unique chapeauté par la police est venu perturber l’institution Gendarmerie. La mission a mis le doigt sur ce problème sans prescrire de remède. Il est probable que dans certains secteurs on ait conservé, discrètement, un service de renseignement opérationnel.
La mutualisation de grands services ou des passations de marchés publics n’amènent pas de remarque particulière.
Entre confiance et méfiance :
La parité est évoquée par la mission, il s’agit d’une évolution constante et si la police dispose de puissants syndicats pour défendre les intérêts de leurs adhérents les gendarmes sont bien loin d’y parvenir. A noter que s’agissant des grilles indiciaires on se souvient brusquement de l’appartenance de
L’évocation des structures gendarmerie ne doivent pas intéresser outre mesure les militaires des unités de base, encore moins les réorganisations au niveau de l’administration centrale, à proximité du ministre.
Les réductions de budgets sont évoquées et la mission admet « qu’elles limitent singulièrement toute ambition d’entreprendre de grands changements de même que le domaine de l’immobilier est sévèrement touché ». Nous pouvons lire que la seule consolation de la gendarmerie est de « savoir que la police ne connaît pas un meilleur sort » Il s’agit d’une réflexion totalement déplacée les problèmes rencontrés par les policiers n’ont pas de quoi consoler les gendarmes qui sont embarqués sur la même galère.
La vision de la mission concernant le dialogue interne et le dialogue social est totalement erronée. Dire que les gendarmes éprouvent « un vague sentiment de frustration » parler de « l’institution d’un dialogue permettant aux militaires de faire entendre une voix discordante par rapport à leur hiérarchie » « Une représentation forte à l’image de celle des syndicats de police » « Une véritable réforme de la participation et de la concertation » « Ce système, s’il n’est pas symétrique de celui que connaît la police, permet de concilier dans un esprit constructif avec la hiérarchie, le principe du statut militaire et la liberté d’expression. Depuis qu’il a été mis en place
On ne pouvait éviter un paragraphe sur le statut militaire des gendarmes garant du dualisme policier. La mission soulève le risque pour
L’immobilier : La mission constate des problèmes préoccupants à ce niveau, entraînant parfois un climat social fragilisé. Bien quelle reconnaisse que ce logement permet au gendarme, « même en dehors de ses heures de service, de répondre à des situations d’urgence », elle alerte sur le fait que « la réduction du parc des logements ou son état de vétusté, s’ils devaient s’aggraver, seraient de nature à ébranler un pan du statut militaire de la gendarmerie. Il s’agit d’un enjeu primordial qu’elle tient à souligner avec gravité ».
Les parlementaires remarquent que « dans son appartenance au ministère de la défense, la gendarmerie bénéficiait du soutien des armées à un niveau que l’intérieur n’est pas en mesure d’assumer pleinement » dont acte, ceci va dans le sens de ce que constatent chaque jour les gendarmes : une dégradation des conditions de travail et de vie familiale.
Dans sa conclusion la mission assène « ses » vérités affirmant que « la réforme s’est calmement, presque sereinement installée, les doutes sur sa faisabilité on été levés, les obstacles statutaires progressivement tombent ramenant la confiance, tant chez les policiers que chez les gendarmes ». Faire de la militarité la qualité première des gendarmes est une erreur fondamentale. Pour les militaires en général et les gendarmes en particulier ils veulent être citoyens à part entière et pas citoyens entièrement à part. Ils veulent un droit d’expression (réel) et un droit d’association professionnelle.
Dire qu’être militaire « c’est ne plus s’appartenir, ne plus appartenir à sa famille ; c’est appartenir à
Christian Contini. Président AG&C http://sites.google.com/site/assogendarmesetcitoyens/
D’autres articles dans le magazine de l’association gendarmes et citoyens de septembre (en particulier un dossier sur les suicides en Gendarmerie).
http://issuu.com/agecassociation/docs/agec_magazine_septembre_2011_209
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