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Réflexions douces et amères

La gousse de l'ail

 

Chaque jour qui passe nous amène son lot d’infos, quand bien même nous voudrions y échapper qu’elles nous atteignent malgré tout.

 

Des courses à l’épicerie ? Il me faut un masque.

Un bon resto, un super film à l’affiche ? Ben non, pas pour moi.

Une balade au coucher du soleil ? Seule, en pleine campagne ? Ben non, ya couvre-feu.

J’ai le malheur d’être en bonne santé, et certaines activités me sont interdites pour des raisons que l’on ne peut vraiment plus qualifier de sanitaires.

J’ai beau ne pas vouloir choisir de camp, je me trouve bel et bien d’un côté de la barrière. Celui de la minorité, avec tous les désagréments que cette situation génère.

Sans télé ni radio ni journaux depuis des lustres, je ne peux pas, malgré tous mes subterfuges, ignorer ce mal qui ronge notre société, et qui n’a rien à voir avec un virus.

Le mal est profond, pernicieux, violent et durable.

 

La question est : comment sortirons-nous de cette crise ?

Pas quand, mais comment ?

 

C’est une question cruciale, comme par exemple, faut-il ou non ôter le germe des gousses d’ail ?

Dans ma culture familiale, il est impératif de l’enlever. Fidèle à l’injonction maternelle, j’ai longtemps traqué cet indésirable. Fendre la gousse, extirper le minuscule poireau vert et l’éjecter d’une pointe incisive de couteau, voilà qui fut réjouissant.

Pourquoi, je ne savais pas.

Après bien des années de doute et de remises en question, je finis par me poser la question. Un nouvel horizon s’ouvrait tout grand devant moi. Des ailes me sont poussées et puis j’ai enfin osé la transgression : j’ai laissé le germe et utilisé ma gousse d’ail comme si de rien n’était. Sentiment jubilatoire d’adolescente attardée.

Finalement il ne s’est rien passé d’extraordinaire.

Un rien de déception tout de même, jusqu’au jour où j’ai rencontré une personne réellement allergique au germe de l’ail, qui en cas d’ingestion intempestive, ressent des symptômes vraiment désagréables : douleurs abdominales, éructations pénibles, nausées...

Ainsi donc les précautions étaient justifiées.

 

Curieusement ce sont les mêmes symptômes que j’éprouve devant l’état de notre monde. Dire que j’y fais une allergie serait prendre un raccourci facile, j'en fais partie de ce monde, intégralement, qu'il me plaise ou non. Toute cette fièvre est si pénible, ces décisions insensées, la peur qui rampe dans tous les interstices, l’angoisse parfois, la folie enfin. Et ces enfants masqués toute la journée à l’école, bon sang ! Rien que d’y penser, la nausée s’intensifie.

 

Faudra-t-il d’un coup de canif faire sauter le morceau indigeste ? Il s’agit quand même d’un gros morceau, et je doute qu’un canif suffise. Mais l’image me plaît, c’est comme presser un point noir ou déloger un grain de framboise coincé entre deux dents. Ca soulage.

 

J’ai enfin compris, quand même, que ce mal affreux qui nous étouffe n’est pas toujours à l’extérieur. Bien sûr nous ne sommes pas tous des pervers, des vampires assoiffés de gloire et de profits. Bon nombre d’entre nous restent de braves gens, portés par le désir de bien faire, et de faire bien, sans trop d’histoires, et sans grande ambition.

Comme moi, finalement, même si apparemment j’ai choisi de ne pas me soumettre à tout ce qui nous est imposé.

 

Donc nous sommes une majorité de clampins bonhommes et amicaux, et nous nous laissons asservir par une petite bande de dégénérés, qui doivent bien rire au sommet de leur tour d’ivoire.

 

C’est quoi le problème ? Outre l’aveuglement, n’y aurait-il pas un brin de lâcheté ?

Probablement, mais c’est si difficile de s’extirper de son canapé, de s’extraire de derrière nos écrans et de se coltiner la réalité, la vraie, celle qui saigne et qui fait mal.

Oui, il y a bien de cela en moi. Je le vois. Ce petit germe, anodin et tapi au creux de la chair, qui empoisonne insidieusement et corrompt la vertu de l’être.

 

C’est peut-être cela finalement, le combat ultime. Se tourner vers l’intérieur, y regarder de près et affûter son canif.


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9 réactions à cet article    


  • Sergio Sergio 9 décembre 2021 09:03

    Bonjour Madame

    Vous avez du courage d’avoir écrit cela, je me reconnais dans ce que vous ressentez. Votre texte est un peu triste mais il apporte ici de la fraicheur et de l’honnêteté.

    « C’est peut-être cela finalement, le combat ultime. Se tourner vers l’intérieur, y regarder de près et affûter son canif. »

    Il est pour ma part très suspect que de nombreuses personnes veuillent votre bonheur à votre place, j’ose me permettre de vous suggérer de le retrouver vous même, vous verrez bien que le vert ou le ver n’y seront plus, mais je vous préviens : c’est épuisant de vouloir être heureux

    Cordialement


    • Samy Levrai samy Levrai 9 décembre 2021 09:12

      J’ai la même maladie et je crois que c’est grave


      • nono le simplet 9 décembre 2021 09:19

        joli texte ... surtout pour l’ail que j’utilise tout le temps par peur des vampires et force est de reconnaître que je n’en ai jamais vu ... faut dire que je l’utilise en chemise comme il est conseillé de faire dans tout manuel sérieux ... manuel de cuisine comme manuel contre les vampires ...

        moi c’est plutôt la montée de l’extrême droite qui risque de menacer ma vie et surtout ma liberté qui m’inquiète ...


        • Francis, agnotologue Francis, agnotologue 9 décembre 2021 09:49

          @nono le simplet
           
           ’’moi c’est plutôt la montée de l’extrême droite qui risque de menacer ma vie et surtout ma liberté qui m’inquiète ...’’
          > nono serait-il un immigrant clandestin ? un basané ?
           
          Ah, c’est sûr, ni l’ail ni les vaxxins ne marchent contre l’estrème drouate, et je ne connais pas de grigri en cette matière plus efficace que le bulletin de vote.
           
          Moi j’aimerais que l’ail me protège contre les piquouzeurs fous, mais hélas, j’ai comme un doute.


        • In Bruges In Bruges 9 décembre 2021 09:29

          @ l’auteur,

          Je vous conseille l’échalote, qui est un bon compromis ( la vie n’est que compromis merdiques) entre le nécessaire rehausseur de gout et le fait de maintenir un semblant de vie sociale, voire sexuelle...

          En plus, pour les oisifs qui s’ennuient, on peut faire des courses avec (NDLR : la course à l’échalote, très prisée dans certains milieux).


          • Francis, agnotologue Francis, agnotologue 9 décembre 2021 10:53

            Bel article, bravo.

             

            ’’La question est : comment sortirons-nous de cette crise ? ’’

              > Je prie pour que ce ne soit pas ’les pieds devant’ pour beaucoup d’entre nous, un sort que les autres en arriveraient à envier.

             

            ’’Et ces enfants masqués toute la journée à l’école, bon sang ! Rien que d’y penser, la nausée s’intensifie’’

            — > hier je regardais la cérémonie de Prestation de serment et installation officielle des nouveaux membres de la Haute Cour Constitutionnelle Tous ces beaux messieurs et belles dames dans leurs oripeaux étaient masqués jusqu’aux yeux. Cinéma ? Conviction ? Soumission ? C’est pas gagné !

             

            ’’Bon nombre d’entre nous restent de braves gens, portés par le désir de bien faire, et de faire bien, ....’’

            — > nuance : bien faire c’est la soumission, faire bien c’est la liberté. Mais la liberté fait peur. cf. La soumission volontaire.

             

            Conséquences psychologiques du port du masque par la population L’obscène
            par Jean-Claude Paye, Tülay Umay
            (attention : texte très élaboré)



            • wagos wagos 9 décembre 2021 12:07

              Ensuite, ce bal masqué auquel nous participons ou non, va au fur et à mesure prendre une couleur distinctive entre bon et mauvais citoyen, ou classe classe sociale, ou appartenance politique ou confessionnelle ...


              • Jean Keim Jean Keim 10 décembre 2021 15:47

                Le couvre-feu serait de retour, est-ce régional ou un effet de style ?

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