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Réforme du congé parental : Et si on laissait le choix aux parents ?

Le gouvernement a demandé au Haut Conseil à la Famille de réfléchir à une réforme du congé parental et de lui remettre ses recommandations pour la fin 2009.
Mais pourquoi réformer l’un des fleurons de la politique familiale française ?
 
Pour une fois, il ne s’agit pas du tout de faire des économies : rien ne coûte moins cher à l’Etat qu’un parent qui choisit de garder lui-même son enfant. Pour un enfant gardé à plein temps par un de ses parents, la CAF verse une allocation comprise entre 363 et 536 euros par mois et par famille. Rappelons que la CAF dépense 567 à 941 euros par mois pour un enfant gardé par une assistante maternelle et plus de 1.250 euros par mois pour un enfant gardé en crèche.
La demande ne vient pas non plus – nous l’avons vérifié – du MEDEF ou des entreprises qui s’adaptent en grande majorité très bien au dispositif existant.
Alors pourquoi une réforme ?
 
C’est que le congé parental – malgré ses atouts - a trois défauts : premièrement, il est pris à plus de 98% par les mères et s’oppose donc à tous les efforts faits en matière de parité pour la carrière des femmes et la répartition des tâches domestiques ; deuxièmement, il ne serait pas un vrai choix des parents, mais un choix par défaut – faute d’avoir trouvé une place en crèche ; troisièmement, il éloignerait les parents trop longtemps de l’entreprise et serait préjudiciable aux salariés précaires lorsqu’il s’agirait de retrouver un emploi.
L’idée maîtresse du gouvernement pour palier à ces écueils serait de supprimer unilatéralement le congé parental de 3 ans et de le remplacer par un congé très court (6 à 9 mois maximum), mieux rémunéré (67% du salaire brut), la durée du congé étant encore plus réduite si les deux parents n’en prennent pas chacun une partie. Cette réforme serait assortie de la création de 200.000 places de crèches pour mieux répondre aux besoins en terme de mode de garde.
 
Hélas, quand on analyse avec soin ce projet de réforme, les défauts sont si nombreux qu’il semble certain que le remède sera pire que le mal.
En terme de retour à l’emploi, il faut distinguer deux populations : la majorité des mères qui prennent un congé parental ont un emploi fixe (CDI). Dans 84% des cas, elles retrouvent leur emploi à l’issue du congé, le plus souvent au même poste. Certes, on n’atteint pas les 100%, mais n’oublions pas qu’une partie d’entre elles enchaînent sur une nouvelle grossesse. Globalement, leur situation peut donc être jugée très bonne.
Qu’en est-il pour les mères qui démarrent leur congé parental en situation précaire (salariées en CDD, en interim ou au chômage) ? Aucun travail ne les attend à l’issue de leur congé parental. Regardons les choses en face : c’est plus la maternité que le congé parental qui nuit à ces mères ! Leur imposer de retrouver un emploi avec un enfant en bas âge peut même être plus compliqué qu’une fois l’enfant scolarisé (réticence de l’employeur, mode de garde à trouver avant d’en avoir le financement,…).
Les chiffres indiquent que depuis sa création, le congé parental a plutôt contribué à augmenter le taux d’activité des jeunes mères. On est loin des idées reçues laissant penser qu’il éloigne les mères de l’emploi !
 
Concernant la parité, les études démontrent que c’est toujours le parent qui a la situation professionnelle la plus précaire qui opte pour le congé parental. Cette attitude risque de perdurer quel que soit le mode de rémunération proposé.
Quant au fait de réserver une partie du congé à chaque parent, il faut regarder ce qui se passe en suède – pays initiateur de cette politique. 80% des jours de congé parental pris par les pères suédois le sont sous forme de semaines ou de week-end prolongés pendant que la maman est elle-même en congé parental. Ils s’offrent des vacances en famille au frais du contribuable !
 
Il semble donc que les mesures envisagées aient peu de chances d’atteindre les objectifs poursuivis. C’est d’autant plus grave que l’impact de ces décisions pourrait être catastrophiques à plus d’un titre.
On risque une pénurie sans précédent de mode de garde. Rappelons que les 583.000 parents en congé parental gardent plus de 900.000 enfants. Si les deux tiers d’entre eux devaient reprendre le chemin du bureau, qui garderait les quelques 600.000 enfants en question ? On manque déjà de 350.000 places de crèches aujourd’hui. Même si 200.000 nouvelles places étaient créées, on voit bien que le compte n’y serait pas du tout.
Le coût financier pour l’Etat serait énorme. D’après nos calculs, le congé parental plus court et mieux rémunéré coûterait 4 fois plus cher pendant 4 fois moins longtemps. Ni surcoût, ni économie, donc. En revanche, il faudrait financer des modes de garde pour 600.000 enfants supplémentaires. La facture pourrait être de l’ordre de 6 milliards d’euros par an….tous les ans. La France a-t-elle les moyens de s’offrir un tel budget ?
La natalité française pourrait être gravement affectée par une telle mesure. Nous sommes fiers d’être en tête de l’Europe pour notre taux de fécondité. Mais rappelons que pour 46% des parents, le congé parental est l’un des éléments clefs pour décider d’agrandir la famille. Et que 83% des parents optent pour le congé parental à la naissance du 3ème enfant. Sans cette possibilité, beaucoup de familles pourraient renoncer à avoir un enfant supplémentaire, pourtant bien utile à notre équilibre démographique et à notre dynamisme économique.
Enfin, cette réforme serait très injuste pour les familles les plus modestes : la rémunération du congé étant fonction des revenus, elles n’y gagneraient rien ou très peu. Elles devraient ensuite assumer des frais de garde sur un tout petit salaire. Elles seraient enfin les premières victimes du manque de place en crèche, seul mode de garde qu’elles peuvent s’offrir financièrement.
 
On voit bien qu’il y a plus d’idéologie que de bons sens dans cette réforme. Elle serait inefficace, coûteuse, dangereuse et injuste.
Il est urgent de laisser le libre choix aux parents : libre choix de continuer à travailler ou de prendre un congé parental, libre choix de la durée de ce congé jusqu’à l’entrée à l’école de l’enfant, libre choix de le prendre à temps plein ou à temps partiel.
Dans notre pays, 63% des enfants de moins de 3 ans sont gardés par leurs parents et seulement 10% en crèche. Le congé parental est le premier mode de garde et celui que les parents préfèrent.
Alors pourquoi ne pas autoriser tous les parents qui souhaitent s’occuper eux-mêmes de leurs enfants à le faire dans de bonnes conditions ? Surtout quand c’est économique pour l’Etat et constructif pour la société.
Pourquoi valoriser le travail des puéricultrices et des assistantes maternelles et dénigrer celui qu’une mère joue auprès de ses propres enfants ? Merci de laisser le libre choix aux parents. Peut-être savent-ils ce qui est bon pour leur enfant et leur famille ?
 
Marie-Laure des Brosses
Mouvement Mondial des Mères France
 
NB : tous les chiffres cités sont issus du rapport Tabarot de juillet 2008 sur les modes de garde ainsi que d’études de la DREES et de la CAF de 2008 et 2009.
 

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7 réactions à cet article    


  • plume plume 7 juillet 2009 12:08

    un autre point me semble être le point clef de cette décision prise par l’état
    loin des problèmes de rentabilité et politique familiale :
    la destruction de la cellule familiale et des repérés

    l’enfant a les bases de son éducation , de sa culture , de ses repère des les 1er année de sa vie de 0 à 4 ans
    aujourd’hui la grande majorité des parents (surtout les mère)  préfèrent éduquer et transmette ainsi leur identité ,leur culture ,leur racine à leur enfant

    maintenant imagine que demain les parents (en majorité par obligation budgétaire ) doivent laissé leur enfant en bas âge ( + 6 mois ) en crèche
    ces enfants vont grandir sans vrais repère ou avec des repérer imposés par l’éducation nationale et ceux jusqu’à au minimum leur 16 ans

    une génération « sans famille », sans vrais appartenance familiale juste une éducation de groupe qui l’aura formaté au gré des réformes de l’éducation nationale

    résultat :des adultes soumis , contrôlable et totalement acquis à la cause
    cette recette n’est pas nouvelle, plusieurs dictature l’on déjà utilisé et usé :Chine , Allemagne ,hesbola , afrique etc ... et bientôt france

    il est plus facile de formaté un enfant que de lutter contre un adulte qui se rebelle


    • Lylyne 7 juillet 2009 12:51

      Je suis mère de deux enfants. Lorsque ma fille est née, j’ai pris le congé parentale à temps partiel. J’ai travaillé à 80% et j’ai pu m’occuper de ma fille le mercredi. Et cela a vraiment été profitable pour elle comme pour moi. J’avais pris le congé parental à mi-temps durant ses 6 premiers mois car la CAF ne verse d’indemnités de congé parental que les 6 premiers mois du premier enfant.
      Lorsque mon second enfant est né, j’ai pris le congé parental à mi-temps et je compte bien en profiter jusqu’à ses 3 ans.
      Je trouve que le système du congé parental à mi-temps est vraiment bien car l’enfant voit plus souvent sa mère (ou son père) que l’assistante maternelle ou la crèche. Et cela permet à l’enfant de voir d’autres personnes, d’autres enfants, d’apprendre d’autres choses, de manger d’autres choses.
      Si j’avais pu financièrement prendre le congé parental complet, je l’aurais fait (mais l’indemnité que verse la CAF pour le congé complet ne suffit pas à notre budget), mais en laissant tout de même mon enfant chez l’assistante maternelle deux jours par semaine afin qu’il puisse s’éveiller à d’autres choses qu’avec moi, ainsi qu’afin que je puisse faire quelque chose pour moi sans les enfants et m’occuper de la maison et des courses aussi sans les enfants.
      En effet, on parle du congé parental qui est bien pour le fait d’éduquer soi-même son enfant, ce qui est vrai, mais il y a un manque je pense dans le fait que la mère s’oublie complètement dans ce cadre.
      En prenant le congé parentale à mi-temps, nous avons une indemnité de frais de garde en plus de l’indemnité du congé parental, pour le fait que nous allons travailler et que nous faisons garder notre enfant.
      Mais nous travaillons, nous nous occupons de la maison, nous nous occupons de notre enfant, nous nous occupons de notre mari, et de nous jamais.
      Personnellement, j’essaie de faire quelques choses pour moi entre midi et deux les jours où je travaille, mais c’est la vraie course.
      Si je prends le congé parental complet, je n’ai pas d’indemnité de frais de garde car je ne travaille pas et donc n’ai null besoin de faire garder mon enfant. Mais pour qu’un enfant soit épanouïe, il faut que sa mère se sente bien. Et en s’oubliant complètement la mère ne peut pas se sentir bien. De plus, afin qu’un enfant s’éveille et s’épanouïsse, il a besoin de voir le monde différemment d’avec sa mère de temps en temps.
      Le seul changement à faire je pense est d’augmenter l’indemnité du congé parental complet (car elle est ridicule à côté de celle du congé à mi-temps) et d’y ajouter une indemnité de frais de garde afin que l’enfant puisse être garder une journée par semaine à la crèche ou chez une assistante maternelle.


      • titi titi 8 juillet 2009 08:10

        « Mais nous travaillons, nous nous occupons de la maison, nous nous occupons de notre enfant, nous nous occupons de notre mari, et de nous jamais.
        Personnellement, j’essaie de faire quelques choses pour moi entre midi et deux les jours où je travaille, mais c’est la vraie course. »
        Moralité ce que vous demandez ce n’est pas un congé parental.
        Mais un congé familial, avec une allocation « femme au foyer ».

        Ce qui est interessant dans l’évolution de la revendication de la condition féminine.


      • Gabriel Gabriel 7 juillet 2009 14:59

        Réforme du congé parental : Et si on laissait le choix aux parents ? Laisser le choix aux parents relève d’une pratique démocratique. Heureusement qu’avec notre Maximo Cullbuto cela ne peut pas se produire. Lui seul a les bonnes solutions car il a des idées sur tout ! Et il a surtout des idées.


        • Sinbuck Sinbuck 8 juillet 2009 10:47

          Ce n’est pas « la voix des parents » qui parle de chiffres et de stats...

          Plume a raison, et la cellule familiale alors ? Et l’amour, c’est un thème trop compliqué pour l’administration ou pour ceux qui défendent le droit des parents ?

          L’amour est-il un mot trop abstrait pour signifier quelque chose entre un enfant et ses parents ?

          Le congé parental est essentiel, mais qui doit payé ? Peut-être les entreprises, l’état, les parents, un peu tout le monde, mais il faut trouver des solutions qui vont dans le sens du « bon sens » en donnant aux parents la possibilité de vivre avec leurs enfants en bas age. De plus, on peut travailler à la maison, avec le télé-travail, des opportunités sont offertes dans ce sens. Bref, je ne cherche pas là les solutions, mais je réoriente le débat sur l’amour et la nécessité d’un contact prolongé entre les parents et leurs enfants...


          • lavoixdesparents 8 juillet 2009 11:09

            Cher Plume, Cher Sinbuck,
            Oui, l’amour, l’attention des parents pour leur enfant est essentiel et rien d’autre ne me motive quand je défends le congé parental.
            Si je n’utilise pas cet argument c’est volontairement.
            D’abord parce que je ne pense pas qu’il faille renvoyer toutes les mamans à la maison ni condamner celles qui continuent à travailler avec un jeune bébé.
            Ensuite parce qu’il y a suffisamment de raisons quantifiables de défendre le congé parental.
            Je veux juste qu’on laisse tous ceux qui souhaitent s’occuper de leur enfant le faire dans de bonnes conditions.
            Marie-Laure


          • emmyryan 8 juillet 2009 11:25

            Merci pour ce bel article !! Assitante maternelle et maman de 2 enfants et en attente du 3eme je me sent concernée par cette reforme que je trouve abérante !! jai en effet bénéficié du congé parental de 3 ans pour mon 2eme enfant et en est ressortie extremement convaincue pour le bien etre de celui ci.
            Je tiens egalement à reagir à un commentaire laissé et a signaler que si nous n’avons pas le droit a des aides pour la garde des enfants il existe des creches parentales dans beaucoup de villes et communes dont les tarifs sont basés sur les revenus des parents et en plus deductibles à 50% des impots bon moyen pour sociabiliser les enfants avant l’entrée à l’ecole une journée par semaine cela m’a en effet couté uniquement 50 euros pour l’année 2008 pour mon fils !!!
            Le plus important pour moi est de laisser le choix aux parents de prendre ou non ce congé et du choix de la durée de celui ci. je signale egalement qu’a partir du 3eme il est possible de ne prendre qu’un an mieux remunéré.
            Pour mon cas ayant des revenus comparables a un temps partiel (j’exercais un travail a 80% a 50kms de chez moi avant le congé parental de mon 2eme enfant ) je me suis installée ass mat a ses 3 ans pour continuer a m’occuper des mes enfants mais meme en ayant 2 agrements le salaire n’atteint pas un smic pour tout de meme une amplitude horaire de 55h de travail par semaine, mais c’est un choix que j’ai fait .
            J’espere pouvoir beneficier de ce congé pour mon 3eme sachant que je perd un agrement a son arrivée et qu’il me sera bien difficile de vivre avec un seul enfant à garder, et je souhaite me consacrer pleinement a son bien etre et son education.
            Rappelons aussi que les ass mat sont deja surchargées, les demandes ne manquent pas (au minimum 2 appels par semaine sachant que je suis pourtant inscrite indisponible sur les listes) et les places en creches impossibles a s’offrir pour les parents tellement peu nombreuses !!! Les enfants sont tout de meme mieux avec un parent qu’a courir un marathon tous les jours entre aller retour des parents selon les horaires de travail, rythme non respecté... etant bien placée pour en parler avec la garde d’enfants dont les parents travaillent en decalé et dont l’enfant n’a jamais les memes horaires de presence, pas facile pour la construction de sa securité affective.
            Merci donc de laisser le choix aux parents qui le souhaitent.

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