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Regard de primate sur le succès de Facebook

Comment expliquer le succès phénoménal et à l’échelle mondiale de Facebook, l’un des derniers-nés des réseaux sociaux grand public, qui compte près de 90 millions de membres et enregistre plus d’un million de nouveaux membres par mois !

Ces réseaux sociaux répondent à une motivation bien plus partagée que celle de la recherche de connaissances (motivation originelle des internautes), à savoir, la motivation « sociale ».

Ces réseaux nous donnent l’illusion de satisfaire nos besoins en tant qu’animal social, membre de la tribu humaine.

On a tendance à l’oublier, mais on est et on reste des primates, à ce titre nous sommes des êtres sociaux ; nos chances de survie sont quasiment nulles sans les autres. La perte de tout lien social chez les chimpanzés, nos proches cousins, signifie la mort ou presque.

On comprend mieux le syndrome « de l’abandon » qui conduit, nombre d’entre nous, droit au divan...

Il est donc crucial de construire des liens avec d’autres humains, de les entretenir pour assurer leur pérennité.

C’est encore plus vrai dans nos sociétés occidentales, les liens sociaux sont d’autant plus importants qu’ils viennent compenser d’autres types de liens qui se sont désintégrés ou fragilisés. Le lien familial (cellule familiale au sens large comprenant les grands-parents, parents, enfants...) n’a plus autant de sens aujourd’hui, en tout cas les différentes générations ne cohabitent plus sur un même territoire. Le lien conjugal s’est fragilisé avec l’augmentation des divorces, séparations.

Le lien social professionnel lui aussi a du mou. Dans les usines, la notion de performance individuelle s’est substituée à celle d’équipe, le travail en équipe autour d’un chef a progressivement disparu (même si l’on commence à revenir en arrière). Dans les services, les cols blancs n’ont jamais autant été confrontés à la pression individuelle : les rémunérations, la reconnaissance, la promotion, tout est de plus en plus individualisé. Dans ce contexte, la notion de collègue sonne un peu désuète par rapport à la notion de compétiteur-rival... Mais ce n’est pas propre à la vie professionnelle, d’une manière générale, les rapports de force dominent par rapport aux liens sociaux. On en est compétition pour obtenir une place pour son enfant à la crèche, puis plus tard dans la meilleure école, on est en compétition pour décrocher un poste et même pour obtenir un créneau avec le plus réputé des chirurgiens...

Dans ce contexte de compétition et de tension quasi permanente, c’est pas facile de se faire des amis ou de les garder !

De plus, le phénomène d’urbanisation a lui aussi engendré des frustrations au plan des liens sociaux :

o dans les régions qui se sont vidées ou qui ne parviennent qu’à fixer les plus âgés, on est en manque de liens ;

o dans les villes, la promiscuité imposée freine notre appétit social. La proximité nous rappelle que nous évoluons dans une bulle virtuelle, qui représente notre espace personnel. Seules les personnes faisant partie de notre intimité ont le droit d’évoluer dans le champ de notre haleine, les autres doivent respecter notre bulle : soit une distance d’au moins 60 à 80 centimètres (cela dépend de la culture, voire du statut social de chacun). Le fait que des étrangers (d’autres primates) violent cette bulle personnelle dans les magasins, l’ascenseur, le bus ou le métro, est vécu comme une vraie agression. Notre réflexe primate est de se sentir en danger et de réagir par la fuite (cela on ne peut pas en général) ou par l’immobilisme. On feint le « mort » ou presque. On ne parle pas, on respire le moins fort possible, on ne sourit pas et surtout on ne regarde pas l’autre, car le regard de près, fixe, est perçu comme un signal d’attaque. En d’autres termes, plus on est « collé serré » moins on a de chances de développer des liens sociaux.

On voit bien que toutes les conditions sont réunies pour générer des véritables frustrations en termes de liens sociaux aujourd’hui. La multiplication des associations, des recherches autour de la généalogie, du bénévolat... toutes ces initiatives tentent de recréer du lien social ou familial, mais elles supposent beaucoup de temps, un vrai engagement.

C’est dans ce contexte que sont apparus les réseaux sociaux sur le web, qui offrent la possibilité et tout au moins l’espoir de renforcer, réanimer des liens et d’en créer de nouveaux.

La première vocation des réseaux sociaux est de permettre de renforcer le lien avec ses amis, sa famille, des collègues. Un réseau social permet de se « groomer » virtuellement (activité très caractéristique des primates qui s’épouillent, se caressent pour entretenir les liens).

Les réseaux et en particulier Facebook qui a le plus la cote aujourd’hui, ont facilité les échanges de messages, photos, vidéos et de petits gadgets, cadeaux virtuels (on s’envoie un nounours, une fleur virtuelle). C’est pratique, cela prend moins de temps, cela coûte moins cher que d’envoyer un vrai bouquet. Le problème, c’est que cela « paye moins » aussi. Cela fait plaisir la première fois, puis on est vite écoeuré, saturé par ces cadeaux si facilement offerts.

On peut aussi réanimer un vieux contact, retrouver un copain de classe, ou un ancien collègue, voire un amant perdu de vue. Et ce, sans la crainte « de perdre la face ». Appeler quelqu’un par téléphone qu’on n’a pas vu depuis vingt ans, c’est une démarche pas facile, « poker » quelqu’un c’est moins impliquant, on envoie un coucou virtuel (il suffit de cliquer sur « Poke »), et l’autre choisit d’y répondre, dans ce cas, cela veut dire qu’on peut renouer le contact. Si l’autre ne répond pas, on peut mettre cela sur le compte d’un problème technique...

Quant à se faire de nouveaux contacts, c’est plus difficile. A priori, quand on ne se connaît pas, il faut se trouver un point commun suffisamment fort pour justifier le contact car un nouveau contact implique un « danger » pour notre cerveau reptilien. Sauf si l’on s’inscrit dans une perspective de drague.

Une passion peut réunir des personnes étrangères l’une pour l’autre, par exemple, des membres de Second Life peuvent rentrer en contact après avoir joué ensemble, échangé leurs tuyaux sur leurs passions communes. Mais c’est surtout pour des raisons professionnelles qu’on peut rentrer en contact avec des personnes inconnues. Linkedin, Viadeo sont des réseaux sociaux « historiques », plus anciens fondés sur cette promesse du développement des liens sociaux professionnels, ils ont réussi à se développer mais sans atteindre le succès de Facebook qui, lui, se veut grand public, mixant les liens professionnels, personnels voire familiaux et qui répond, comme on le constatera ultérieurement, à de nombreuses motivations.

A suivre...


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7 réactions à cet article    


  • Mescalina Mescalina 18 février 2008 13:47

    Analyse pertinente, merci.


    • tvargentine.com lerma 18 février 2008 13:50

      Nous voyons bien que les dirigeants en TURQUIE n’ont pas beaucoup de respect pour la société laique

      Le retour du voile dans les écoles du savoir est une marque sur la connaissance et du savoir avec à terme des dérives dont la religion sera à l’origine

      C’est un fascisme rampant


      • nostromo 18 février 2008 22:56

        [mode lerma = on]

        Et pourtant dieu sait si Devedjian adore la Turquie

        [/mode lerma = off]

         

        Vous êtes fatigué, reposez vous Lerma, vous avez encore posté au mauvais endroit , il n’y a point de "TSS" dans cet article...


      • jako jako 18 février 2008 14:56

        Facebook cela peut mener aussi à cela : www.agoravox.fr/article.php3


        • tvargentine.com lerma 19 février 2008 00:52

          Il faut etre un "journaliste" du "service publique’ pour croire que ce reseau est social

          C’est vraiment nul


          • adryan barlet 19 février 2008 19:21

            Chère Muzarde,

            J’ai eu l’étrange impression à la lecture de votre papier de me trouver assis, victime d’une de ces super-chiantes réunions de cadres où l’intervenant extérieur vient nous vendre sa salade en prévision de futurs honoraires juteux...Merde c’est hyper creux ! Facebook vous branche ? tant mieux, déguisez-vous, refaites-vous une personnalité et éclatez-vous ! faites comme ces 90 millions d’ectoplasmes qui sont obligés de se fabriquer des personnages pour exister ( chacun des membres physiques ne doit pas en gérer moins d’une dizaine). Ce qui nous ramène aux vieux mensonges des start-up internet qui annoncaient des chiffres mirobolants et des potentiels déments. La bulle internet les a rangés au placard mais la vieille astuce perdure.

            un membre passif de Viadéo

             


            • gecko gecko 20 février 2008 14:50

              Je vois beaucoup de réactions à facebook mais j ai l’étrange impression de beaucoup de paroles sur des a prioris et des on dits. Je dois avouer (honteusement ?) que je suis aussi sur facebook (fessebouc pour les petits malins ou les gens « in ») qu en dire... j ai trouvé en effet ca marrant de retrouver d anciens contacts « perdus » est ce que je leur ai demandé leur numéro ? est ce qu on s est fait une bouffe pour féter ça ? euh non par contre c est super bien pour pouvoir s imiscer sans le demander dans la vie de nos contacts, "tiens untel est de nouveau célibataire ah machin vient de changer de boite rhoo regarde lui ou il est parti en vacances ! facebook c est le bonheur des comères, et des gens qui ont besoin de se rassurer sur leur entourage (non je ne suis pas seul plus de 100 contacts sur facebook ! enfin... ce samedi ? ben plateau télé comme d hab et internet facebook/blogs, pourquoi ?...) Pour conclure je trouve facebook assez inutile (même si je ne me suis pas désinscrit ; vous pensez bien j’ai encore envie de voir les prochaines photos de vacances de mon ex !) et préfère de loin prendre mon telephone pour aller boire un verre et discuter de vive voix et de visu ! avec l’une des 10 personnes... seulement !? me direz vous ! euh oui des amis des vrais pas des « contacts » à qui j offre une biere virtuellement sur facebook(oui on peut faire ca aussi)... bon article

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