République dominicaine : l’enfance violée
« Paradis » antillais, la République dominicaine est aussi un « hot spot » du tourisme sexuel, pédophile en particulier. Mais, comme le révèle le documentaire « Vacances de rêve et tourisme sexuel », l’ennemi est parfois intérieur.
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Diffusé
le 23 septembre sur M6, Vacances de rêve et tourisme sexuel suit
une avocate qui s’efforce d’arracher enfants dominicains (et haïtiens) à la rue
et à la prostitution. Devant la caméra, elle ne s’attaque cependant pas à un
touriste prédateur, mais à "Coco", Dominicain dans la soixantaine qui
vit avec une fille de 12 ans, qu’il a violée lorsqu’elle en avait 8. Submergée
sous les enfants, sans ressources, la mère de la fillette a consenti à cette
"union" qui jette cependant la honte sur la famille, comme l’explique
le grand-père.
A partir de là, ça ne va pas du tout se passer comme un téléfilm. Bien sûr, le
magistrat qui pourrait intervenir sera surchargé de travail, refusera
d’intervenir. Sous l’oeil scrutateur de la caméra occidentale, un commissaire
envoie trois policiers au domicile de "Coco". L’homme est emmené,
bouclé en garde à vue.
Arrive la fillette au domicile de son violeur, le sien à présent, longiligne,
visage brouillé. Elle gémit, une plainte continue presque insupportable. Elle
pleure l’arrestation de l’homme, elle se désespère. Une fois dans le bureau de
l’avocate, elle lui arrache le téléphone des mains lorsque celle-ci appelle le
procureur. Avec une maturité surprenante, elle demande à lui parler.
Ce que ressent la gamine, explique l’avocate, c’est qu’elle risque de perdre
l’homme qui la nourrit, lui achète des vêtements. Elle a totalement intégré
qu’elle vivait en couple avec lui. Elle craint de retourner dans sa famille
misérable, refuse de dormir dans un foyer pour enfants abandonnés. Elle se bat
pour sa survie.
Elle exige de voir "Coco" à la prison. Elle l’appelle de l’extérieur.
Il vient à la fenêtre grillagée de la geôle surpeuplée. Avec une assurance
digne d’une fille bien plus âgée, elle lui crie qu’elle va le faire sortir de
là "dès lundi".
Morale : il n’y en a pas.
Depuis Paris, France, puis-je comprendre ? Probablement pas.
Quelques pistes, jetées sur le clavier :
Enfant abusée, aliénée par son violeur.
Enfant misérable, se sentant à l’abri du besoin, sachant qu’une perspective de
vie plus "normale" n’a rien d’évident.
Enfant sans enfance, tôt projetée dans la dépossession de soi.
Brecht : "Zuerst kommt das
Fressen, dann die Moral" (A bouffer,d’abord, ensuite la
morale). La misère sape les bases morales. A noter, cependant, que
la situation n’est pas considérée comme normale par le voisinage.
Dans tout cela, un mot : exploitation.
Ambiguïté du tourisme, des innocentes photos d’enfants des rues dominicains
trouvées sur Flickr.com.
La pauvreté comme spectacle, ou recherche de l’humanité ?
L’internationale
du sexe forcé
Le film nous introduit également dans une
"somptueuse" villa, où un Américain propose aux touristes masculins
une formule pension complète incluant une ou deux prostituées 24 heures sur 24.
Assez étrangement, on n’y trouve pas de superbes Dominicaines, mais de plus
classiques "étudiantes" ukrainiennes. Elles sont supposées être
recrutées par annonce pour des périodes de 6 semaines, et repartir avec un
pactole de 10 000 dollars, pas moins. Comme elles sont filmées en permanence en
présence du souteneur, on ne peut qu’accepter la version officielle. Cela
ressemble cependant à la traditionnelle comptine servie pour masquer les
trafics d’esclaves sexuels (article à venir...).
La lutte coordonnée contre la traite mondialisée des filles
et des femmes devrait constituer une priorité des années à venir. Ce qu’elle
n’est pas actuellement.
NB : sur le web, je trouve le nom du présentateur de l’émission Enquête
exclusive, pas celui du réalisateur... Dommage.
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