Retraites en détresse
De plus en plus de retraités font face à des difficultés financières toujours croissantes. Disent-ils que leur pension de retraite ne suffise plus pour vivre décemment. Nombre d’entre eux sont par ailleurs, contraints de vendre leur bien immobilier acquis péniblement grâce à de longues années de labeur.
Si, l’âge du départ à la retraite s’allonge inexorablement, la rumeur répandue selon laquelle plusieurs annuités d’efforts supplémentaires suffiraient pour améliorer le pouvoir d’achat des futurs pensionnaires et leur permettre ensuite de couler de vieux jours tranquilles, est un mythe absolu. Bien loin de ce cliché, la plupart de ces retraités tardifs terminent leur carrière sur les genoux avec pas moins de souci d’argent qu’imaginé. La vraie raison de la chute de leur moyens, est que malgré une carrière plutôt longue et harassante, nombreux de ces retraités ont perçu pendant toutes leurs années de travail des salaires tristement faibles et que par conséquent le calcul de leur pension au régime général se pratique sur 50% du salaire annuel moyen perçu au cours de la vie professionnelle. Faut-il encore ajouter que dans notre système d’assurance vieillesse par répartition, trop de jeunes au chômage, implique forcément la difficulté du financement des retraites actuelles. Devrais-je encore ajouter que les nouveaux retraités qui ont perçu une bonne partie de leurs salaires en Francs sont forcément perdants sur cette période dans cette méthode de calcul, même après conversion. Le coût de la vie était indubitablement inférieur et les salaires aussi par conséquent. Ceci jusqu’en 2001. On oublie trop souvent de le notifier. Un autre paramètre est la conséquence des petites retraites actuelles et de la misère sociale plus généralement : (l’absence d’évolution des carrières). L’ascenseur social est en panne depuis bien longtemps déjà, rares sont ceux qui évoluent professionnellement et profitent de ce biais pour voir augmenter leur niveau de vie. Contrairement à ce qu’on veut nous faire croire, l’allongement de l’âge de la retraite ne profite pas à tout le monde. Ceux qui devraient pouvoir bénéficier d’un repos bien mérité, deviennent des seniors au chômage, peu convoités par les entreprises quand ils sont licenciés avant l’âge légal du départ.
Les choses ont beaucoup changé dans le paysage professionnel. Il y a encore quelques années, même si on clôturait sa carrière professionnelle à soixante ans, l’évolution de carrière permettait à beaucoup de se retirer sereinement de la vie « active », avec de beaux projets de voyages et de croisières en tête. On quittait une activité pour une autre plus jubilatoire et plus salvatrice pour sa santé. Oui ça a vraiment existé et ça s’appelait les « trente glorieuses ! » C’était le temps ou l’on débutait sa carrière au plus bas de l’échelle, certes, mais avec un peu d’ambition après quelques années, il était encore possible de gravir les échelons sans être sorti de HEC ou de Saint-Cyr. On pouvait au moins prétendre à une fin de carrière satisfaisante. Un Ouvrier Spécialisé en fin de carrière accédait au poste de Chef de chantier, un employé pouvait devenir Cadre dans sa société à quelques années de sa retraite. Enfin, une « simple dactylographe » pouvait prétendre à partir à la retraite avec une qualification de Secrétaire de direction ou Responsable de secteur. Tout était possible à condition de faire ses preuves. La motivation aidant les ambitions ne se limitaient pas au simple désir de quelques déjeuners à la table du Directeur pour épater la galerie juste pour flatter les égos. On ne faisait pas semblant d’être, mais on était vraiment.
Depuis une trentaine d’années, ce principe de récompense au mérite naturel appliqué avant les années 80 est définitivement caduc aujourd’hui et la motivation n’y est plus vraiment. Histoire de schématiser rapidement pour le comparatif, nous allons dire qu’une employée d’Accueil par exemple, n’a pratiquement aucune chance de devenir un jour Assistante de direction ou Chef de projet, cela même en fin de carrière. Bien entendu qu’on lui permettra sûrement d’accumuler quelques formations bidons qui n’auront aucun lien avec ses projets de développement professionnel et encore. A aucun moment de son parcours et malgré tous les efforts du monde elle ne verra sa fiche de paie varier en conséquence. Le cursus Bac plus douze sera incontournable pour exiger dès le départ être au moins payé à la hauteur de ses diplômes, mais bien en dessous de ses prétentions personnelles évidemment.
Il y a cependant quelques exceptions : Prenons pour illustration le cas de personnes qui feraient agir leurs relations ou bénéficieraient de réseaux favorables. Eh bien même là il devient difficile de profiter des largesses amicales ou familiales à cause des répercutions du grippage diachronique des carrières sur l’économie globale. Aussi subtiles quelles soient, les incidences sont multiples autant qu’imperceptibles allant jusqu’à ralentir les curseurs de la croissance sans un coup de pouce majeur de l’État. Pour peu que ce dernier ne soit pas lui-même sanctionné par les mauvaises recettes fiscales dues au ralentissement économique des entreprises, elles-mêmes plombées par une chute de la consommation conditionnée par une morosité ambiante et une peur chronique de l’avenir. Bref tout ça pour dire que les retraités ne sont finalement pas les seuls à subir l’immobilisme de la finance et la frilosité des entrepreneurs français. Pendant ce temps, les investisseurs étrangers surfent sur nos faiblesses et ne perdent pas leur temps dans les états d’âme sans fondement pour rafler tous les marchés et racheter le patrimoine français en décrépitude. Ils occupent le marché, là où les investisseurs français sont absents et finissent par devenir des leaders dans des domaines que nous avons trop longtemps sous-estimés pour de simples questions philosophiques ou idéologiques. Nous perdons un peu chaque jour notre souveraineté économique à cause de nos jugements hâtifs et nos préjugés sur tout : les vieux, les jeunes, les banlieues, les diplômés, les sans diplômes, les étrangers, d’autres cultures, etc. Combien de temps encore nous reste-t-il avant de perdre complètement notre intégrité culturelle ? Combien de temps nous reste-t-il avant de voir d’autres pays nous dicter leur loi ? Les retraités d’aujourd’hui ne sont pas dans la misère par accident, mais bel et bien victimes de la frilosité ambiante des entrepreneurs français à bien des niveaux, trop animés par des états d’âme improductifs. Trop enfermés dans des mentalités archaïques ou passéistes qui freinent les ardeurs collectives, les ambitions, les audaces, les rêves et les projets. Bien payé ses employés ne signifie absolument pas se ruiner mais les motiver pour qu’ils se sentent partie prenante à la prospérité de l’entreprise. 10 000 employés bien payés c’est peut-être autant de producteurs satisfaits de leur carnet de commande en y réfléchissant bien. C’est peut-être le Maire d’une petite ville heureux de développer des structures supplémentaires favorisants les rencontres dans sa collectivité territoriale. En effet, plus de recettes fiscales c’est aussi plus de moyens pour la ville pour mettre en œuvre ses projets, surtout si les contribuables sont plus nombreux à se partager la charge fiscale pour alimenter les caisses de l’État. Il est préférable de dépenser pour améliorer la vie quotidienne que dans l’assistance sociale des chômeurs ou de gens qui n’ont jamais travaillé de leur vie et vivent déjà pris en charge par leurs proches. Comment les communes peuvent-ils dans une telle conjoncture s’occuper de leurs personnes âgées en grande solitude. Ces retraités en difficulté économique aujourd’hui à cause de leur petite pension, dans le passé, furent plus souvent au travail qu’à se préoccuper de construire une vie familiale ? Si en plus on ne peut même pas leur venir en aide par manque de fonds et trop empêtrés dans les problèmes sociaux c’est un comble.
Pour conclure je dirais que malheureusement nos retraités n’en sont qu’au début d’une galère graduelle dont ils devront s’accoutumer. Les jeunes ont de moins en moins d’avenir et ceux qui ont la chance d’avoir un emploi sont plutôt mal rémunérés. C’est à mon avis la preuve que les futurs retraités ne seront pas mieux lotis et la situation va apparemment se dégrader. Dites-moi où est la valeur travail si c’est pour ce résultat final. Quel modèle de société espérons-nous léguer à une génération témoin de ce fiasco ? Je dois dire que ça fait un peu peur !
Danièle Lony
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