Signature de la convention Unedic : reculer sans mieux sauter !
La probable signature de la convention Unedic se fait sur la base de mesures sans grande portée. Au-delà, c’est la légitimité des acteurs signataires qui est en cause.
La négociation de la nouvelle convention UNEDIC s’est donc achevée hier dans la nuit. L’enjeu pour le patronat et les syndicats était de s’entendre avant la date butoir du 31 décembre. Trois syndicats (CFDT, CFTC et CFE-CGC) ont décidé de signer le texte, FO a réservé sa réponse, et la CGT, quant à elle, ne le ratifiera pas.
Cela marque la fin de plusieurs semaines de négociation initiées le 8 novembre dernier. Comme d’habitude, la dramaturgie de ce type de rencontres a été respectée : pendant plusieurs réunions il ne se passe rien, les grincements de dents et les claquements de porte s’intensifient, puis l’échéance approchant, chacun lance des ballons d’essai, on enchaîne sur des séances marathon qui se terminent à 4 heures du matin, un ou deux derniers coups de théâtre ont lieu - c’est FO qui cette fois-ci a joué le rôle de celui qui fait mine de partir, et enfin, miracle, la veille de Noël,on annonce un accord.
Cette fois encore, la montagne a accouché d’une souris, et on se demande pourquoi il a fallu tant de discussions pour arriver à un résultat aussi médiocre : les deux mesures « phares » de l’accord sont une hausse des cotisations à parts égales entre salariés et employeurs (0,04% chacun) et la création d’une nouvelle filière d’indemnisation (dite A+) pour les salariés ayant travaillé entre 12 et 16 mois. On serait donc tenté de rire de cette situation si l’indemnisation de millions de Français et les cotisations de l’ensemble des salariés ne dépendaient pas de ces discussions.
En fait, tout le monde est conscient que le système n’est plus viable dans sa configuration actuelle, comme le reconnaissait Jean-Marie Toulisse, qui conduisait la délégation CFDT et indiquait : « Ce qu’il faut, c’est reconstruire un nouveau système ». Il faudrait donc définir un nouveau modèle d’indemnisation. Mais dans ce jeu du chat et de la souris, personne ne semble vouloir prendre les devants, car finalement, les scénarios de négociation actuels, avec les jeux de rôle des uns et des autres, sont beaucoup plus confortables. On est en terrain connu, c’est l’essentiel.
Plus grave : on peut se demander dans quelle mesure les négociateurs, MEDEF et syndicats, sont fondés à traiter seuls de ce sujet. On fera ici quelques remarques.
Tout d’abord, les principaux intéressés, les chômeurs, ne sont pas parties prenantes des discussions. Cela paraît absurde, mais c’est comme ça. Dans ce contexte, il paraît urgent d’organiser une représentation officielle des demandeurs d’emploi - on peut imaginer des élections professionnelles dont le collège électoral serait constitué des demandeurs d’emploi, et les élus seraient mandatés pour participer à ces discussions.
Ensuite, la représentativité des syndicats est de plus en plus sujette à caution ; rappelons que c’est arrêté du 31 mars 1966, complétant une décision du 8 avril 1948, qui fixe les critères de représentativité des syndicats et confère un monopole de droit et de fait sur ce type de négociation aux cinq centrales déjà citées. Les choses sont donc figées depuis presque 40 ans... Pendant ce temps, le taux de syndicalisation en France ne cesse de baisser (autour de 8,2% en 2004, source DARES) avec une exception dans le secteur public au sens large (administration et entreprises) qui masque un taux de syndicalisation dans le privé plus proche de 5%. Or, ce sont les salariés du privé qui sont le plus menacés par la perte d’emploi... Nouveau hiatus. Ce sont donc des syndicats faibles, non représentatifs dans la réalité - quantitativement et qualitativement, qui sont à la table des négociations, et cela sur la base d’un texte préhistorique.
Enfin le MEDEF, censé représenter le patronat, reste marqué par une sur-représentation des filières anciennes - bâtiment, métallurgie, dont est issu d’ailleurs Denis Gautier-Sauvagnac, le négociateur du MEDEF -, est perçu comme une organisation très parisienne, et défend une vision le plus souvent archaïque des relations sociales.
Tout ceci nous montre bien que, au-delà du contenu de futures discussions cruciales sur l’avenir de notre système d’indemnisation chômage, c’est l’identité même de ceux qui vont en discuter qui est à revoir. La présence des chômeurs, d’une façon ou une autre, une représentation plus ouverte et plus diverse des salariés et des employeurs, sont les préalables d’une négociation plus juste et plus équilibrée. C’est la vie au quotidien, le rapport au travail de millions de nos concitoyens qui en dépend.
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